II.- L’encadrement du métier de syndic
Le syndic est un acteur incontournable car tout syndicat des copropriétaires doit désigner un syndic. Compte tenu des missions qui lui incombe, le syndic joue un rôle central. Il est donc essentiel que les syndics soient formés. Cette formation est d’autant plus importante que le droit de la copropriété fait l’objet de nombreuses réformes. Il est tout aussi essentiel que la profession soit encadrée, certaines dérives désormais relativement anciennes ont contraint le législateur à renforcer l’encadrement de cette profession.
Cet encadrement peut être décliné en plusieurs points.
A.- Le contrôle de l’accès au métier de syndic
Ce contrôle s’est effectué par l’institution d’une carte professionnelle dont l’obtention est conditionnée à la justification d’une aptitude professionnelle. Sur ce point, il semble que la condition de diplôme exigée par le législateur ne permette pas de justifier d’une véritable aptitude professionnelle à l’exercice de la fonction de syndic, d’autant plus qu’il peut y être dérogé.
Précisons ici que, concernant les personnes morales exerçant l’activité de syndic, l’obligation de détenir une carte professionnelle ne s’applique qu’à leur représentant légal ou statutaire ainsi qu’aux personnes qui assurent la direction de chaque établissement, succursale ou agence. Leurs collaborateurs doivent quant à eux détenir simplement une «attestation professionnelle» qui ne nécessite aucune justification de compétence initiale.
Une problématique a été soulevée : les collaborateurs, gestionnaires d’immeubles, qui exercent leur métier sans ladite attestation professionnelle semblent nombreux ; 41 % des gestionnaires ayant répondu à une enquête de l’ANGC en 2022 n’avaient pas cette «carte collaborateur» ou ne «savaient pas» ce dont il s’agissait. Par ailleurs, l’absence de justification de compétence pour l’obtention de cette attestation professionnelle est elle aussi problématique. En pratique, ces collaborateurs sont amenés à gérer un portefeuille d’immeubles de façon autonome, et compte tenu de la complexité de la tâche, il est essentiel que leur aptitude professionnelle soit encadrée.
Cet encadrement a été amorcé par la loi ALUR du 24 mars 2014, imposant que les collaborateurs justifient d’une «compétence professionnelle» dont les conditions devaient être fixées par décret. A ce jour, soit plus de dix ans plus tard, ce décret n’est toujours pas paru. La FNAIM a introduit, le 15 mars 2024, un recours devant le Conseil d’État pour obliger le gouvernement à adopter ce décret d’application. Le Conseil d’Etat a fait droit à cette demande par un arrêt rendu le 25 février 2025 qui enjoint au Premier ministre d’adopter ce décret dans un délai de six mois à compter de la notification de cette décision.
B.- La formation continue
Le développement de la formation contribue non seulement à contrôler l’accès à la profession mais également à maintenir les compétences nécessaires tout au long de son exercice. La durée de la formation continue est de 14 heures par an ou de 42 heures au cours de trois années consécutives d’exercice. Le rapport de la commission d’enquête du Sénat, relatif à la Paupérisation des copropriétés, déposé le 18 juillet 2024, propose d’étoffer les obligations de formation continue des syndics, notamment en incluant l’obligation, au cours de leur formation continue, de suivre des modules de formations en lien avec la transition énergétique des copropriétés ou la lutte contre la dégradation globale de ces ensembles. Sur les quatorze heures de formation continue annuelle nécessaire pour le renouvellement de la carte professionnelle, un nombre d’heures, à définir, pourrait être consacré aux enjeux spécifiques de la gestion des copropriétés dégradées.
Il est toutefois regrettable que ce rapport n’ait pas cru bon de proposer un renforcement de cette formation continue qui, en termes de volume (14 heures par an, soit deux jours de formation par an) semble légère compte tenu de la mouvance du droit de la copropriété et de la technicité des fonctions de syndic.
C.- L’encadrement des honoraires
L’encadrement des relations contractuelles syndic/syndicat des copropriétaires est ancien. Dès 1986, un arrêté imposait au syndic de fournir à l’assemblée générale un décompte détaillé des honoraires auxquels il pouvait prétendre. Ce décompte allait s’avérer insuffisant puisqu’en novembre 1995, la Commission des clauses abusives adoptait une première recommandation mettant en lumière l’accumulation de prestations particulières et le caractère abusif de certaines clauses des contrats de syndics. En 2007, Le Conseil national de la consommation publiait un rapport aux termes duquel il constatait les nombreuses plaintes des consommateurs relatives aux honoraires des syndics.
Ces démarches ont abouti à la promulgation de l’arrêté du 19 mars 2010 ayant établi une liste minimale de prestations courantes devant obligatoirement être incluses dans le forfait annuel et ne pouvant donner lieu à une rémunération supplémentaire. Les prestations particulières pouvaient donner lieu à rémunération, prévue au contrat. L’arrêté fut toutefois jugé insuffisant par les associations de consommateurs et de copropriétaires et un rapport de la DGCCRF du 14 mars 2014 constatait une complexification des contrats de syndic qui rendait difficile les comparaisons entre les prestations courantes et les prestations particulières.
C’est dans ces conditions que le contrat type allait être rédigé à la virgule près par la loi ALUR du 24 mars 2014 et le décret n° 2015-342 du 26 mars 2015. D’un point de vue financier, la liste des prestations particulières est limitativement énumérée. Elles peuvent donner lieu à des honoraires complémentaires qui doivent être prévus au contrat. Toutes les autres prestations sont assimilées à des prestations courantes qui sont incluses dans les honoraires forfaitaires.
Mais alors que la liste des prestations particulières doit faire l’objet d’une concertation bisannuelle en vue de son éventuelle révision, elle ne l’a pas été depuis son adoption il y a désormais dix ans. Ainsi notamment, le contrat-type ne prévoit aucune prestation en lien avec la rénovation énergétique alors que ce sujet occupe bon nombre de syndicats des copropriétaires et donc de syndics.
Par ailleurs, le contrat-type devait permettre de fluidifier, ou faciliter, la compréhension des honoraires du syndic par les copropriétaires. Ce souhait se solde manifestement par un échec car sa complexité a conduit à l’instauration d’une «fiche d’information sur les prix», sorte de synthèse du contrat, entrée en vigueur le 1er janvier 2022.
D.- La déontologie
Le décret n° 2015-1090 du 28 août 2015 a créé un Code de déontologie pour les professionnels exerçant les activités de transaction et de gestion des immeubles et fonds de commerce. Le syndic ne doit plus seulement être efficace, il doit adopter un comportement moralement acceptable.
La loi ALUR du 24 mars 2014 avait créé la commission de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilière (CCATGI), compétente pour connaître, en première instance, des actions disciplinaires exercées à raison de faits commis par les intermédiaires immobiliers. Cette instance a été supprimée par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté. Il était prévu de transférer ses pouvoirs au Conseil National de la Transaction et de la Gestion Immobilière (CNTGI). La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite loi ELAN, a finalement rétabli la CCATGI mais en a fait une commission interne au CNTGI, uniquement chargée de l’instruction des dossiers de pratiques abusives signalées au CNTGI et, le cas échant, de leur transfert à l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation.
Cette commission devrait compter dix membres devant représenter à part égale les professionnels et les consommateurs. Toutefois et à ce jour, l’arrêté de constitution de la commission de contrôle n’a toujours pas été pris, près de sept ans après la promulgation de la loi ELAN. Il en résulte que la commission de contrôle n’est pas effective ; de surcroit, aucune disposition ne précise la procédure et les sanctions applicables en cas de manquement aux règles déontologiques.
Si les textes inhérents au statut de la copropriété n’ont pas pour vocation d’encadrer les fonctions de syndic, si ce n’est par la définition – sans doute trop extensible – de ses missions, cet encadrement résulte de textes épars. Cet encadrement est sans doute perfectible, notamment s’agissant de la formation des syndics, et permet de s’interroger sur la pertinence de prévoir un organe représentatif de la profession de syndic. Sur ce point, des organisations professionnelles jouent un certain rôle en matière de représentativité de la profession, mais pas seulement.