Copropriété | Le financement de la rénovation énergétique Fonds de travaux et emprunt collectif - I.- La rénovation du fonds de travaux

par Stéphane BENILSI, maître de conférences à l'Université de Montpellier
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Stéphane Benilsi, intervenant lors du colloque anniversaire Edilaix 60 ans de copropriété
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Index de l'article

I.- La rénovation du fonds de travaux

Le fonds de travaux avait été rendu obligatoire par la loi ALUR. Il s’agissait d’obliger les copropriétaires à constituer une cagnotte, définitivement acquise au syndicat de copropriétaires, permettant de faire face en cas de travaux. L’avantage de ce fonds de travaux est d’encourager le vote de travaux qui paraissent indolores aux copropriétaires s’ils sont intégralement financés par ce fonds.

La loi Climat et Résilience de 2021 a modifié le régime de ce fonds de travaux qui a, par ailleurs, changé de place dans la loi du 10 juillet 1965, passant de l’ancien article 14-2 au nouvel article 14-2-1.

Ce léger déménagement s’accompagne de quelques modifications qui sont toutes désormais applicables, puisque le nouveau texte s’applique à toutes les copropriétés depuis le 1er janvier 2025, à la suite d’une entrée en vigueur différée en fonction de la taille des syndicats, désormais classique en droit de la copropriété.

Voyons l’obligation de constituer un fonds de travaux (A), la cotisation au fonds de travaux (B) et l’utilisation du fonds de travaux (C).

 

A.- L’obligation de constituer un fonds de travaux

Il y a ici, avec la loi Climat de 2021, à la fois une extension et une réduction du domaine du fonds de travaux.

Extension du domaine.- Il n’y a plus d’exception possible, que ce soit pour les copropriétés de moins de dix lots ou pour celles dont le diagnostic technique global faisait apparaître une absence de besoin de travaux dans les dix années suivantes. Dans ces deux cas, aujourd’hui, le fonds de travaux doit être institué.

Réduction du domaine.- Le moment à partir duquel il faut commencer à constituer le fonds de travaux a été retardé. Aujourd’hui, l’obligation ne vaut qu’à l’issue d’une période de dix ans à compter de la date de réception des travaux de construction de l’immeuble, contre cinq ans dans l’ancienne version.

 

B.- La cotisation au fonds de travaux

Le fonds de travaux a été adapté au plan pluriannuel de travaux (PPT). Si ce dernier a été adopté, la cotisation ne peut pas être inférieure à 2,5 % du montant des travaux prévus, ni à 5 % du montant du budget prévisionnel. À défaut d’adoption du PPT, le seul plancher est celui de 5 % du budget prévisionnel.

De la même manière, la suspension des cotisations est possible, par un vote en assemblée générale, lorsque le montant du fonds de travaux excède le montant du budget prévisionnel et 50 % du montant des travaux prévus dans le PPT adopté.

Les sommes sont attribuées définitivement au syndicat des copropriétaires. La loi Climat et Résilience a ajouté, à ce propos, une précision dont l’utilité n’est pas évidente : «l’acquéreur peut consentir à verser au vendeur un montant équivalent à ces sommes en sus du prix de vente du lot».

Cet ajout ne crée, bien sûr, aucune obligation. La formulation est intéressante. On aurait pu penser que le prix de vente pouvait tenir compte du montant du fonds de travaux. Or ici on nous parle d’une somme versée en sus du prix de vente du lot.

Cela ne peut aucunement correspondre à une cession de créance, puisque les copropriétaires n’ont aucune créance de restitution sur le syndicat au titre du fonds de travaux.

Mais il faut relire le début de ce III : les sommes versées au titre du fonds de travaux sont attachées au lot.

En effet, si elles deviennent définitivement la propriété du syndicat, ces sommes seront affectées à des dépenses au titre du lot. Il y a donc un compte, attaché au lot, qui est cédé avec ce dernier et qui peut faire l’objet d’un paiement distinct du prix de vente.

 

C.- Utilisation des sommes

La loi de 2021 a restreint la possibilité d’utiliser le fonds de travaux. Seuls peuvent, aujourd’hui, être financés par ce fonds :

- l’élaboration du PPPT ou du DTG ;

- la réalisation des travaux prévus dans le PPT adopté ;

- les travaux décidés par le syndic en cas d’urgence ;

- les travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble, à la préservation de la santé des occupants et à la réalisation d’économies d’énergie, non prévus dans le PPT.

Le fonds de travaux est donc désormais fléché vers les travaux qui paraissent les plus importants, dont ceux de rénovation énergétique. Ce fléchage, qui peut sembler attentatoire à la propriété du syndicat, renforce la probabilité de disposer des sommes nécessaires aux travaux visés.

Notons que la décision d’utiliser le fonds de travaux se vote à la même majorité que les travaux. Or la loi Habitat dégradé de 2024 a institué une passerelle simplifiée pour les travaux d’économie d’énergie et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui pourront être votés à la majorité de l’article 24 même si un tiers des voix n’a pas été obtenu lors du premier vote, à condition qu’une nouvelle assemblée générale soit convoquée dans les 3 mois. Cette passerelle devrait, logiquement, concerner à la fois le vote des travaux et celui de leur financement pas le fonds de travaux.