[N°657-658] - La crise du COVID-19 dans la copropriété - IV.- Le paiement des charges de copropriété

par Jean-Marc ROUX - Directeur scientifique des éditions Edilaix
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IV.- Le paiement des charges de copropriété

La présence de parties communes et d’éléments d’équipement communs implique nécessairement une contribution financière des copropriétaires. Telle est la raison d’être de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965. Qu’en est-il de l’impact de la pandémie sur les finances du syndicat ?

 

L’obligation de payer les charges

Peut-on estimer, comme le pensent nombre de copropriétaires, que la crise sanitaire et ses répercussions économiques puisse influer sur leur devoir de régler les charges de copropriété ? Autrement dit, peut-on être dispensé (ou refuser) de payer les charges ?

La réponse est sans ambiguïté. Confronté à une obligation impérative, un copropriétaire ne saurait arguer de la crise sanitaire pour s’exempter du règlement. Comme l’a très clairement exprimé la troisième chambre civile il y a maintenant de nombreuses années, «la contribution de chacun des copropriétaires aux charges constitue le soutien de l’obligation du syndicat et correspond automatiquement à une créance de celui-ci sur chacun des copropriétaires».

La diminution (ou l’apparente diminution) des tâches du salarié du syndicat, voire du syndic, l’interruption de certains travaux ou l’impossibilité de recourir à tous les services habituels dans l’immeuble ne sont pas susceptibles de justifier l’absence de paiement des charges, comme la diminution de leur montant. Aucun texte dérogatoire n’a été adopté par les pouvoirs publics en ce sens. Il faut donc s’en remettre au caractère d’ordre public des prévisions légales. Il ne serait d’ailleurs pas plus pertinent de vouloir diminuer les honoraires du syndic en arguant d’une activité prétendument allégée !

 

Le recouvrement des charges

Le syndic est non seulement en charge de la gestion comptable et financière du syndicat mais aussi du recouvrement des sommes dues par les copropriétaires. En dépit des circonstances, il lui appartient d’assumer pleinement sa mission.

A ce titre, il pourra adresser les appels de fonds conformément aux dates entérinées par les décisions de l’assemblée générale.

Toutefois, s’il peut également recourir aux moyens traditionnels de recouvrement, notamment la mise en demeure et les procédures judiciaires (article 19-2 de la loi de 1965, saisie immobilière), le syndic tiendra généralement compte de la situation exceptionnelle, en particulier pour les personnes éprouvant des difficultés personnelles ou financières. Des délais de paiement seront souvent consentis, en pratique au cas par cas. Là encore, il faudra faire preuve de discernement, certains copropriétaires de mauvaise foi pouvant prétexter la situation sanitaire pour tenter d’échapper à leur obligation financière. Sans compter la paralysie des institutions judiciaires qui constituera un obstacle dirimant (sur les délais pour agir, voir supra).

 

Confrontés à une crise sanitaire d’ampleur mondiale, il nous faut tenter de trouver des solutions qui, parfois, nous amènent à prendre quelques libertés avec des textes qui sont impératifs. Mais, à l’image des dérogations d’ores et déjà adoptées par les pouvoirs publics, l’application pure et simple de notre droit positif révèle ses limites. C’est dans ces moments difficiles que nous devons faire preuve de discernement et d’adaptabilité.