Préconisation du GRECCO n°12 - 2.- Les hypothèses de mise en conformité du règlement de copropriété

par YS
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2.- Les hypothèses de mise en conformité du règlement de copropriété

Plusieurs situations peuvent se présenter. Parmi elles :

2.1. L’existence des parties communes spéciales est expressément mentionnée dans le règlement de copropriété et une grille de répartition des charges, correspondante est prévue

Dans cette hypothèse, aucune mise en conformité du règlement de copropriété n’est nécessaire en application de l’article 209 II de la loi ELAN. Le règlement de copropriété est d’ores et déjà conforme à l’article 6-4 de la loi du 10 juillet 1965.

 

2.2.- L’existence de parties communes spéciales est expressément mentionnée dans le règlement de copropriété, mais sans grille de répartition des charges correspondante

Dans cette hypothèse, aucune mise en conformité du règlement de copropriété n’est nécessaire en application de l’article 209 II de la loi ELAN.

Toutefois, la création d’une grille de répartition des charges correspondante est conseillée, pour que le règlement de copropriété soit conforme à l’article 6-2 de la loi du 10 juillet 1965, par application de l’article 24 f de la loi du 10 juillet 1965.

 

2.3.- Les parties communes spéciales sont uniquement mentionnées dans l’état descriptif de division

Il est fréquent que les parties communes spéciales ne figurent que sous la forme de la mention, dans le descriptif du lot ou dans le tableau récapitulatif, voire dans le descriptif de l’immeuble, de droits de propriété relatifs à des parties communes spéciales (par ex, il existe dans le tableau récapitulatif une colonne «parties communes spéciales du bâtiment A»).

Dans cette hypothèse, la mise en conformité doit conduire à identifier les parties communes spéciales dans le règlement de copropriété par leur mention expresse.

Cette mise en conformité devrait être complétée par l’introduction d’une clef ou d’une grille de répartition de charges correspondante à ces parties communes spéciales, dans une seconde résolution.

 

2.4.- Les parties communes spéciales sont mentionnées dans l’état descriptif de division et une grille de répartition des charges correspondante aux parties communes spéciales se trouve dans le règlement de copropriété

Cette grille ou cette clef peut-elle constituer une «mention expresse des parties communes spéciales» exigée par le texte de l’article 6-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ?

Dans cette hypothèse, l’identification des parties communes spéciales pourrait être insuffisante ; une mise en conformité du règlement de copropriété semble nécessaire, afin d’intégrer dans le règlement de copropriété la mention expresse des parties communes spéciales.

 

2.5.- Les parties communes spéciales sont mentionnées dans tout autre document que le règlement de copropriété

Cette mention peut résulter notamment :

- d’une résolution d’assemblée générale qui n’a pas donné lieu à une modification du règlement de copropriété, soit que le procès-verbal n’ait jamais été publié, soit qu’il ait été publié sous la forme d’un dépôt de pièce ;

- d’un autre acte tel un acte de partage.

Dans ces hypothèses, la mise en conformité s’impose, afin d’intégrer dans le règlement de copropriété la mention expresse des parties communes spéciales.

 

Point de vigilance : lorsque le document n’a pas été publié au service de publicité foncière, se pose avant tout un problème d’opposabilité aux tiers. S’agissant, par exemple, d’une décision d’assemblée générale figurant dans un procès-verbal non publié, cette décision n’est pas opposable aux copropriétaires ayant acquis leur lot postérieurement à la décision, sauf s’ils ont explicitement adhéré, dans leur acte, à la décision de l’assemblée.

À défaut d’opposabilité de la décision à tous les copropriétaires, il n’est pas possible de réaliser une simple mise en conformité du règlement de copropriété ; il est nécessaire de réitérer la décision en assemblée générale à la majorité requise, laquelle pourrait être a minima celle de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ou l’unanimité s’il s’agit de créer des parties communes spéciales (cf. point 2.6.3).

 

2.6.- Les parties communes spéciales ne sont mentionnées ni dans le règlement de copropriété ni dans l’état descriptif de division (pas de tantièmes de propriété), mais il existe une clef de répartition des charges propres à certaines parties de l’immeuble

Cette hypothèse ne relève pas de la mise en conformité du règlement de copropriété visée par l’article 209 II de la loi ELAN (2.6.1). Elle pourrait néanmoins poser des difficultés au regard de la nouvelle rédaction de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 (2.6.2). En fonction de l’intention du rédacteur, la situation pourra être régularisée selon des modalités différentes (2.6.3).

 

2.6.1.- L’absence de mise en conformité obligatoire du règlement de copropriété au titre de l’article 209 II de la loi ELAN

Dans ce cas, la mise à jour n’entre pas le cadre de l’article 209 II de la loi ELAN du 23 novembre 2018. Il n’est donc pas possible de procéder à la mise en conformité du règlement de copropriété dans les termes de cette disposition.

 

2.6.2.- La non-conformité du règlement de copropriété aux nouvelles dispositions légales

Cette hypothèse pose néanmoins problème, non plus par référence aux articles 6-2 et 6-4 de la loi du 10 juillet 1965, mais au regard de la nouvelle rédaction de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, qui reprend partiellement l’ancien article 24 III. Celui-ci permettait la création de charges d’entretien d’une partie de l’immeuble, sans création corrélative de parties communes spéciales. L’ordonnance a déplacé ces dispositions, mais ne les a reprises que partiellement, en limitant cette faculté aux seuls éléments d’équipement et services collectifs (art. 10, dernier al.) .

«Lorsque le règlement de copropriété met à la seule charge de certains copropriétaires les dépenses d’entretien et de fonctionnement entraînées par certains services collectifs ou éléments d’équipements, il peut prévoir que ces copropriétaires prennent seuls part au vote sur les décisions qui concernent ces dépenses. Chacun d’eux dispose d’un nombre de voix proportionnel à sa participation auxdites dépenses».

Il résulte de ce texte que l’existence de charges spéciales à certains copropriétaires n’est justifiée que dans les hypothèses suivantes :

- les charges sont corrélées à des parties communes spéciales ;

- ces charges sont des charges de services collectifs ou d’éléments d’équipements au sens du premier alinéa de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 ci-dessus rappelé.

 

En dehors de ces hypothèses, la répartition des charges «spécialisée» sur certains copropriétaires seulement pourrait être réputée non écrite, sous réserve de l’interprétation qui sera donnée de ce nouveau texte par les juges .

En tout état de cause, cette clause du règlement de copropriété subsiste tant que le juge ou l’assemblée générale ne s’est pas prononcé sur ce caractère non écrit.

 

2.6.3. L’adaptation éventuelle du règlement de copropriété au titre de l’article 24 f) de la loi du 10 juillet 1965

Il faut rappeler que l’assemblée générale des copropriétaires a compétence pour supprimer une clause réputée non écrite du règlement de copropriété, par application de l’article 24 f) de la loi du 10 juillet 1965 : «f) les adaptations du règlement de copropriété rendues nécessaires par les modifications législatives et réglementaires intervenues depuis son établissement. La publication de ces modifications du règlement de copropriété est effectuée au droit fixe».

Si l’assemblée est appelée à supprimer la clef de répartition de charges spéciales afférente à l’entretien d’une partie commune générale, sans que celle-ci soit corrélée à des parties communes spéciales, l’adaptation parait possible par application de l’article 24 f) de la loi du 10 juillet 1965.

À l’inverse, il est possible de créer des parties communes spéciales, pour conserver la grille de répartition des charges spéciales. Toutefois, cette décision de création de parties communes spéciales relève a minima des majorités des articles 26 et 26-1 de la loi du 10 juillet 1965, s’agissant de transférer la propriété de droits indivis de tous les copropriétaires à certains d’entre eux. L’unanimité pourrait même être requise si ce transfert a lieu sans contrepartie.

Au surplus, une telle création va poser des problèmes pratiques, car la création de parties communes spéciales a pour conséquence de priver les autres copropriétaires de tous droits dans les parties communes spéciales nouvellement créées. Ainsi, il faut rappeler que le prix de vente d’une partie commune spéciale n’est réparti qu’entre les copropriétaires titulaires de droits dans ces parties communes spéciales (article 16-1 de la loi du 10 juillet 1965). En outre, la création de parties communes spéciales pour une cage d’escalier a pour conséquence de priver les autres copropriétaires du droit d’accès dans cette cage d’escalier, ou du droit de solliciter la réalisation, dans cette partie de bâtiment, de travaux sur parties communes (création d’ascenseur). De même, si la rampe de parking est constituée en partie commune spéciale aux parkings, il ne sera plus possible de faire sortir les poubelles via cette rampe de parking.

Pour ces raisons, il parait difficile d’admettre la création de ces parties communes spéciales sous couvert d’une mise à jour du règlement de copropriété par application de l’article 24 f) de la loi du 10 juillet 1965, nonobstant les avantages pratiques que cela pourrait représenter.

 

Nota : Lorsque l’existence de cette «clef de charges spéciales» résulte d’une décision d’assemblée générale qui n’a pas été suivie d’un modificatif du règlement de copropriété, la situation est identique, mais il convient en outre de s’assurer de l’opposabilité de la décision à tous les copropriétaires, avant d’effectuer une quelconque mise en conformité (cf. point 4).