[N° 612] - Gardien-concierge : un licenciement strictement encadré

par Paul TURENNE
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Une copropriété qui souhaite se séparer de son gardien-concierge doit respecter une procédure précise, sous peine de risquer de devoir s’acquitter de lourds frais de justice. Rappel des règles.

Si l’employeur officiel d’un gardien concierge est la copropriété, c’est bien le syndic qui a la responsabilité de gérer cet emploi, comme l’indique l’article 31 du décret du 17 mars 1967. C’est donc à lui que revient la responsabilité du recrutement et de l’organisation des conditions de travail, en définissant notamment les tâches et les rémunérations, dans le respect des textes en vigueur. L’assemblée générale des copropriétaires n’a, elle, qualité que pour fixer le nombre et la catégorie des emplois, lors d’un vote à la majorité de l’article 24. Les copropriétaires vont ainsi choisir s’ils souhaitent plutôt un employé d’immeuble de catégorie A (non logé, travaillant au temps horaire) ou bien un gardien concierge catégorie B (logé et payé en unités de valeur).
Le pouvoir de licenciement appartient également au syndic (CA Paris, 14e Chambre, 7 novembre 1979, D 1981, IR., 100). S’il a la possibilité d’« ordonner les mesures qui lui paraissent les plus propres à sauvegarder le droits de la minorité des copropriétaires » (Cass., 3e civ., 29 octobre 1969) – et par là-même de congédier le gardien même en cas d’opposition de l’assemblée générale –, son intérêt est plutôt de suivre les directives des copropriétaires. En effet, lorsque le syndic prend l’initiative d’un licenciement, le syndicat des copropriétaires peut engager la responsabilité de son mandataire, afin de solliciter sa garantie pour tout ou partie des sommes que le syndicat serait amené à verser en cas de licenciement abusif. (JOAN Q 17 avril 2000, Rép. minist. n° 37247, p. 2485). Attention toutefois : ces règles générales peuvent être remises en cause si le règlement de copropriété prévoit des mesures spécifiques.
Un licenciement soumis aux règles “classiques”
Régi par la convention collective des gardiens d’immeubles du 11 décembre 1979, étendue par arrêté du 15 avril 1981, le licenciement d’un gardien d’immeuble obéit à des règles précises. Outre le fait qu’il doit être motivé – comme le précise l’article 14 de la convention collective –, l’employeur est tenu de respecter la procédure prévue aux articles L. 1232-2 du Code du travail, comme n’importe quel autre salarié. A savoir :     
• convocation du salarié à un entretien préalable à la mesure de licenciement ;
• entretien préalable ;
• lettre de licenciement notifiée par courrier recommandé, précisant la durée du préavis (un mois pour un salarié de catégorie A, deux mois s’il a plus de deux ans d’ancienneté et trois mois pour un salarié de catégorie B).

Arrêts maladie : attention au licenciement abusif !

Lorsque de nombreux arrêts maladie empêchent le gardien concierge de réaliser correctement et avec suivi, son travail habituel, la copropriété ne peut simplement évoquer ces raisons pour le licencier.
Si les absences répétées désorganisent réellement le fonctionnement de l’immeuble et que la copropriété a la ferme intention d’embaucher une autre personne à des conditions similaires, le licenciement a cependant toutes les raisons d’être accepté, à condition que le dossier et les documents légaux soient correctement établis. Pour ce faire, la lettre de licenciement doit ainsi :
- invoquer la perturbation du fonctionnement de l’immeuble du fait des absences répétées du gardien concierge ;
- démontrer concrètement en quoi ces absences perturbent le fonctionnement de l’immeuble (les preuves écrites sont indispensables) ;
- faire état du besoin impératif de la copropriété de procéder au remplacement définitif du gardien concierge.
En revanche, si la copropriété souhaite profiter de l’occasion pour supprimer le poste, un licenciement pour raison d’arrêts maladie à répétition, a toutes les chances d’échouer. La cour d’appel de Paris a ainsi jugé – dans un arrêt du 7 février 2012 – un tel licenciement comme abusif car aucune des pièces produites antérieures au licenciement, comme le procès-verbal d’assemblée générale au cours duquel a été votée la décision de renvoi, ne faisait état de difficultés ou de dysfonctionnement. La désorganisation n’ayant pas été clairement démontrée, la cause réelle et sérieuse du licenciement n’était donc pas pas caractérisée. (CA Paris, 6e ch. 7 février 2012, n°10/05203, O. c/ Synd. copr. de l’imm. 6 square Villaret de Joyeuse).