[N°632] - Typologie des travaux et farandole des majorités - Le balancier 24-25-26

par Nathalie Brocard, juriste
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Le balancier 24-25-26

La vigilance est de mise pour les travaux dont le calibrage peut faire varier la majorité à appliquer.

- En fonction de la nature des travaux d’accessibilité à entreprendre, ils pourraient requérir les majorités des articles 24 (art. 24-II d et e), 25 ou 26 (Pascale Burdy-Clément, Handicap et copropriété, entre l’universalité proclamée et la réalité des ERP, Inf. rap. copr., juil.- août 2016).

- Lorsque l’immeuble n’est pas équipé de stationnements sécurisés pour les vélos ou des installations électriques intérieures permettant l’alimentation de ces emplacements pour permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides ou des installations de recharge électrique permettant un comptage individuel pour ces véhicules, ces travaux et leurs conditions de gestion ultérieure du nouveau réseau électrique, sont adoptés, à la majorité de l’article 24 (24-5). Il en va de même pour la décision d’équiper les places de stationnement avec des bornes de recharge pour véhicules électriques (art. 24-II i) ; mais la majorité de l’article 25 j (voire 25-1) est requise pour installer ou modifier des installations électriques intérieures et réaliser des installations de recharge électrique permettant un comptage individuel (Paul Turenne, La copropriété à l’heure des transports alternatifs, Inf. rap. copr., janv.-fév. 2015).

- Après le DPE collectif ou l’audit énergétique, la règle de majorité à appliquer pour décider du plan de travaux d’économies d’énergie ou du contrat de performance énergétique dépend des travaux à valider (24-II h créé par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015, ou 25 f, voire 25-1 ; Nathalie Figuière-Brocard, Quelles majorités pour la rénovation énergétique ?, Inf. rap. copr., mai 2016).

À chaque fois que des «travaux importants» sont envisagés, il est obligatoire d’embarquer d’autres travaux, sauf exception (art. L111-10 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) ; décret n° 2017-919 du 9 mai 2017). Les notions de travaux d’isolation en cas de travaux de ravalement de façade, de réfection de toiture ou d’aménagement de locaux en vue de les rendre habitables ont été clarifiées par le décret n° 2016- 711 du 30 mai 2016.
En pratique, la règle de majorité à appliquer découle des travaux de performance énergétique à réaliser : les opérations d’amélioration de l’efficacité énergétique à l’occasion de travaux affectant les parties communes, sont votées à la majorité de l’article 24 (art. 24-II h) tandis que, les travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre relèvent de la majorité de l’article 25 f (voire 25-1 ; ces travaux pourraient comprendre des travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives, voire aussi l’article 10-1).

Cependant, la ligne de démarcation entre les catégories de travaux à voter aux articles 24 ou 25 n’est pas si aisée à cerner. Florence Bayard-Jammes rappelle que «l’amélioration est facultative ; elle apporte un confort ou de nouveaux éléments ; elle s’oppose à des travaux d’entre- tien ou obligatoires, nécessaires pour que l’immeuble ne se dégrade pas (Travaux d’amélioration : l’abaissement systématique des niveaux de majorité ? Inf. rap. copr., avril 2014). L’interprétation des cas sera certainement source de contentieux, d’autant que d’autres dispositions plus génériques de la loi de 1965 préconisent de recourir à la majorité de l’article 25 pour décider de travaux d’amélioration (art. 26 c) reformulé avec la loi ALUR en 25 n avec une suppression concomitante du dernier alinéa de l’article 26 offrant la possibilité de recourir à une deuxième assemblée pour voter ces travaux à une majorité moindre ; et article 30, al. 1er, qui requérait la double majorité de l’article 26 avant la loi ALUR). Il n’en demeure pas moins que si les travaux d’amélioration devaient aller à l’encontre de la destination de l’immeuble, leur approbation exigerait l’unanimité des copropriétaires.

- Quand ils sont impératifs, les travaux permettant d’installer un dispositif d’individualisation des frais de chauffage sont décidés à la majorité de l’article 24 (art. 24-9). Toutefois, l’installation de compteurs d’énergie thermique ou de répartiteurs de frais de chauffage requiert la majorité de l’article 25 l (voire 25-1 ; Julie Hainaut, Individualiser les frais de chauffage, Inf. rap. copr., juin 2017).

- La décision d’engager le diagnostic technique global d’une copropriété ainsi que ses modalités de réalisation, est prise à la majorité de l’article 24 (art. 24-II g et art. L. 731-1, al. 2, du CCH). À la première assemblée générale qui suit sa réalisation ou sa révision, le plan pluriannuel de travaux ainsi que les modalités générales de son éventuelle mise en œuvre requièrent la majorité de l’article 24 ou celle de l’article 25 en fonction des travaux projetés. Il en va de même pour les décisions relatives à la mise en œuvre du plan (art. L. 731-2 du CCH, art 24-II h, 25 f, voire 25-1 ; Julie Hainaut, Le diagnostic technique global au programme, Inf. rap. copr., janv.-fév. 2017).

- La majorité de l’article 24 permet de décider l’installation de la fibre optique dans les parties communes (art. 24-2) ; le pas- sage à la télévision numérique a dû égale- ment respecter cette majorité (art. 24-1 et 24-3). Ces dispositions dérogent expressément à l’article 25 h qui est circonscrit aux travaux sur des parties communes relatifs aux stations radioélectriques et à la modification d’une antenne collective ou d’un réseau de communications électroniques interne à l’immeuble (art. 25-1 envisageable dans ce cas).

- Le seuil de pourcentage de la cotisation annuelle du fonds de travaux (mis en place avec la loi ALUR) pourrait être revu à la hausse selon une décision prise à la majorité de l’article 25, voire 25-1 (art. 14-2-II). Par ailleurs, lorsque l’immeuble comporte moins de dix lots, le syndicat peut décider de ne pas constituer de fonds de travaux par une décision unanime de l’assemblée générale (à différencier de l’unanimité des copropriétaires visée à l’article 26, ainsi que le souligne David Rodrigues, Le fonds de travaux obligatoire, Inf. rap. copr. mai 2017).

- Les travaux permettant de sécuriser la fermeture d’un immeuble sont soumis à la majorité de l’article 24 (art. 24-II a, substitué avec la loi ALUR à l’ancien article 25 n). Cependant, les modalités d’ouverture des portes d’accès aux immeubles «sont prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix» (art. 26 c, Julie Hainaut, La fermeture de l’immeuble, Inf. rap. copr., mars 2017).

- La loi ALUR a facilité la surélévation ou la construction de bâtiments aux fins de créer de nouveaux locaux à usage
privatif en abaissant la règle de l’unanimité à la double majorité de l’article 26, voire en cas de bâtiment situé dans un périmètre sur lequel est institué un droit de préemption urbain, à la majorité des voix de tous les copropriétaires (art. 35 ; Julie Hainaut, Surélévation et ITE, pari gagnant ?, Inf. rap. copr., juin 2016). Mais la règle de l’article 25 b (voire 25-1) pourrait prévaloir pour des travaux de moindre ampleur.

- Lorsqu’en cas d’urgence le syndic fait procéder, de sa propre initiative, en application de l’article 18, à l’exécution de travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble (donc soumis à la majorité de l’article 24), il peut, par exception, «demander, sans délibération préalable de l’assemblée générale mais après avoir pris l’avis du conseil syndical, s’il en existe un, le versement d’une provision qui ne peut excéder le tiers du montant du devis estimatif des travaux» «en vue de l’ouverture du chantier et de son premier approvisionnement».
L’approvisionnement complémentaire exige qu’il convoque immédiatement une nouvelle assemblée (art. 37 du décret du 17 mars 1967). Par dérogation également, l’assemblée peut décider à la majorité de l’article 25 (voire 25-1), de consacrer tout ou partie des sommes déposées sur le fonds de travaux au financement de ces travaux (art. 14-2-II 2° de la loi de 1965).

- En cas de destruction totale ou partielle, l’assemblée générale des copropriétaires du bâtiment sinistré peut décider à la majorité des voix de ces copropriétaires soit, de la reconstruction de ce bâtiment, soit de la remise en état de la partie endommagée. Si la destruction affecte moins de la moitié du bâtiment et que la majorité des copropriétaires sinistrés la demande, la remise en état est obligatoire (art. 38 de la loi de 1965). En cas de catastrophe technologique, les décisions visant à autoriser le syndic à engager des travaux de remise en état rendus nécessaires par l’urgence sont facilitées, car elles nécessitent la majorité des copropriétaires présents ou représentés (art. 38-1). Les améliorations et additions suivront les règles habituelles de majorités (art. 39).

À défaut de “simplification”, une constante demeure : la législation est mouvante.