[N°652] L'étiquette de boîte aux lettres

par Gilles Frémont, directeur copropriété / président ANGC
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Tout commence par un courriel anodin : «Monsieur le syndic, je viens d’acheter mon appartement et j’emménage demain ; je vous remercie de bien vouloir mettre une étiquette de boîte aux lettres à mon nom et celui de ma femme. Cordialement».

C’est poli et courtois, je réponds poliment et courtoisement : «Monsieur, j’accuse bonne réception de votre demande et je fais le nécessaire». Simple et efficace, j’expédie les demandes privatives pour lesquelles je travaille gratuitement dans les affaires courantes.

Je commande les étiquettes. Le tableau indicateur étant fermé à clé et n’ayant plus de gardien sur place, j’ordonne une fourniture plus pose. Puis je reçois la facture que j’impute naturellement sur le compte du copropriétaire. Mission accomplie.

Deux mois plus tard, mon copropriétaire reçoit ses charges et voit passer la note. Attention, nouveau mel de sa part, moins feutré que le premier : «Monsieur le syndic, je ne vous cache pas mon étonnement. Je découvre que vous faites appel à un organisme extérieur et n’ai nullement été informé de votre forfait à 74,53 € que je trouve totalement scandaleux pour quatre étiquettes. Sur le site du fournisseur l’étiquette boîte est à 10 € et l’étiquette tableau à 12,40 €. Je conteste formellement ce débit. En tant que syndic, il vous incombait l’obligation de m’annoncer les tarifs et me présenter les différentes options. Si vous aviez procédé ainsi, ce qui est l’usage normal de tout syndic agissant en parfaite bonne foi, je me serais déplacé en personne récupérer la clé afin d’installer les étiquettes. En tant que nouveau copropriétaire, je ne peux que regretter que ce type de manœuvres soient pratiquées au sein de votre cabinet».


Allons bon. Les mots ne sont pas filtrés, je ne le prends pas mal. Je tente une réponse à chaud : «Monsieur, ce n’est pas mon forfait mais la facture de l’entreprise. Les étiquettes sont privatives mais vous avez préféré les commander au syndic par commodité ; j’ai géré votre affaire pour vous être agréable, mais je ne suis pas votre prestataire de service. Je regrette pour ma part que vous ne vous intéressiez au prix qu’une fois livré. Vous avez sollicité la Copropriété ; vous devez maintenant lui rembourser ses frais».


À peine mon mel envoyé, sa réponse me revient comme dans un “tchat”. Pêle-mêle, j’ai droit au couplet sur les droits du consommateur, le coût de la main d’œuvre, et comment il faisait avant dans son autre immeuble avec son autre syndic.


Effet papillon. Voilà donc comment dégénère une situation banale en copropriété pour un qui-fait-quoi et qui-paye-quoi. Voilà donc un nouveau copropriétaire qui dira à son entourage tout le bien qu’il pense de son syndic, et qui sans nul doute viendra parler de son étiquette à la prochaine assemblée, voire même l’inscrire à l’ordre du jour, voire même voter contre le renouvellement de mon mandat. Demain, j’ouvrirai une filiale de conciergerie.

 

Chronique assurée et rédigée par l’Association nationale des gestionnaires de copropriétéMembre de l'ANGC ? Abonnez-vous à la revue à un tarif préférentiel !
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