Encadrement des loyers vers une pérennisation ?

par Dalila Begriche, journaliste juridique
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Dalila BEGRICHE, auteur des Informations rapides de la copropriété

La loi ELAN du 23 novembre 2018 a créé une expérimentation d’encadrement du niveau des loyers dans les zones dites tendues. Elle s’applique actuellement dans 72 communes (dont Paris, Lille, Lyon ou Montpellier). Alors qu’elle doit s’achever en novembre 2026, les députés Inaki Echaniz (Socialistes) et Annaïg Le Meur (Ensemble pour la République) ont remis le 24 septembre un rapport d’évaluation de cette expérimentation.

La principale mesure préconisée par les députés est la pérennisation de l’encadrement des loyers. Ils veulent casser «l’idée reçue» selon laquelle ce dispositif serait la cause de la baisse de l’offre locative. Cette dernière résulterait notamment de la crise de la construction, de l’augmentation des meublés de tourisme et du manque de logements sociaux. Ils ajoutent qu’il n’a pas pour but de fausser le marché mais au contraire d’établir la réalité des prix et éviter les loyers excessifs. D’après Inaki Echaniz «A cet égard, l’encadrement des loyers a rempli son objectif».

Cependant, le dispositif, tel qu’il existe aujourd’hui n’est pas sans défaut puisqu’il est trop centralisé, trop lourd et trop lent. Les rapporteurs formulent ainsi plusieurs propositions.

Ils suggèrent d’étendre l’encadrement des loyers à toutes les communes volontaires où s’appliquent la taxe sur les logements vacants et de leur permettre de l’appliquer directement. Ils conseillent de doubler les amendes qui passeraient ainsi de 5 000 € à 10 000 € pour une personne physique (15 000 € à 30 000 € s’il s’agit d’une personne morale).

Ils ajoutent qu’actuellement le complément de loyer n’obéit à aucune règle et est souvent arbitraire. Ils suggèrent qu’il soit régulé, avec des éléments faciles à objectiver.

De plus, les procédures de contestation sont «incompréhensibles» d’après Annaïg Le Meur qui propose de les simplifier.

Autres mesures au bénéfice des bailleurs cette fois-ci : la possibilité de revaloriser le loyer au-delà du plafond majoré au renouvellement du bail, tant que le locataire ne change pas et la possibilité de valoriser directement les surfaces annexes.

La remise de ce rapport a évidemment fait réagir le secteur de l’immobilier. Pour l’UNIS (Union des syndicats de l’immobilier) «Des corrections utiles mais qui s’accompagnent de mesures néfastes». D’après Danielle Dubrac, présidente de l’UNIS «il aurait fallu attendre la fin de l’expérimentation pour faire un état des lieux. Le rapport laisse un peu perplexe car l’encadrement des loyers n’a pas réglé le problème du logement».

Loïc Cantin, président de la FNAIM (Fédération Nationale de l’Immobilier) abonde : «L’encadrement des loyers est une mesure inefficace, punitive et contre-productive». Il ajoute : «Plutôt que de décourager une fois de plus les propriétaires-bailleurs, il conviendrait de stimuler la construction et de rendre le statut du bailleur attractif».

Cet été déjà, les représentants des propriétaires et des professionnels s’étaient associés pour présenter un rapport critique sur l’encadrement des loyers. Ainsi, l’UNPI (Union nationale des professionnels immobiliers), l’UNIS et le SNPI (Syndicat des professionnels immobiliers) jugeaient ce dispositif en partie responsable de la baisse de l’offre locative (cf. cette revue, n° 711, sept. 2025, p. 10). Ils demandaient, au mieux sa suppression, au pire une adaptation, notamment avec une remise en question du mode de calcul du loyer de référence.

De son côté, la Fondation pour le logement a publié courant septembre de cette année la 5e édition de son baromètre de l’encadrement des loyers. Dans ses conclusions, elle demande aux parlementaires de prolonger «cette politique sociale efficace et peu onéreuse». La fondation se réfère à l’étude réalisée par l’APUR (Atelier parisien d’urbanisme) qui estime que les locataires économisent en moyenne 141 € par mois grâce à l’encadrement des loyers. D’après cet organisme «aucune baisse durable du nombre d’annonces ne semble directement imputable à l’encadrement» (Impact de l’encadrement des loyers à Paris en 2024, note 276, juin 2025).

Ce rapport se veut complémentaire de la mission d’évaluation gouvernementale prévue par la loi, lequel doit être remis au Parlement avant mai 2026.

Les députés Inaki Echaniz et Annaïg Le Meur prévoient de déposer dans les prochaine semaine une proposition de loi sur la base de leurs observations et préconisations.