Comment et pourquoi végétaliser sa copropriété ?

par Nathalie Coulaud, Journaliste
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immeuble végétalisé
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Enlever le bitume pour planter des arbres dans une cour, faire grimper des plantes sur la façade ou encore végétaliser sa toiture est à la mode mais reste plus compliqué qu’il n’y paraît.

En théorie, tout le monde est pour la végétalisation mais, en réalité, la présence de végétaux peut être source de conflits. Cette copropriété du 5e arrondissement de Paris l’a appris à ses dépens : «Nous avions une belle glycine qui partait de mon rez-de-jardin et nous avons décidé de la laisser pousser sur la façade de l’immeuble. Mais certains copropriétaires râlaient quand la glycine est arrivée sous leurs fenêtres. Ensuite, elle a poussé sur l’immeuble d’à côté et ce dernier nous a obligés à tout couper», explique Laurent, président du conseil syndical. Pourtant, le parfum des fleurs, la biodiversité liée à la plante mais aussi une fraicheur accrue dans les logements en cas de canicule aurait pu faire réfléchir les copropriétaires. Pour convaincre et réussir un projet de végétalisation, l’Agence parisienne du climat (APC), à la pointe dans ce domaine, conseille de commencer par la sensibilisation et l’information des copropriétaires qui considèrent souvent ce type de projet comme secondaire. Le site internet de l’APC (www.apc-paris.com) et des webinaires réguliers permettent à des personnes ne résidant pas en Ile-de-France d’y avoir accès. Comme Paris, la métropole du Grand Lyon est également très active dans ce domaine et soutient financièrement la plantation de végétaux dans les espaces extérieurs des copropriétés.

L’argument le plus évident pour convaincre est l’amélioration du cadre de vie de la copropriété. Dans bien des cas, des cours, des bordures d’allées sont goudronnées pour faciliter l’entretien. Mais il est plus agréable de rentrer chez soi en traversant un jardin qu’une cour sans attrait. Et il est intéressant d’avoir accès à un espace végétalisé, notamment en cas de forte chaleur. En été, les plantes vont agir comme un brumisateur naturel qui améliore sensiblement le confort d’été. Même chose pour les toitures où il est beaucoup plus agréable d’avoir une vue sur un toit terrasse végétalisé plutôt que sur un revêtement d’étanchéité banal. Par ailleurs, une toiture végétalisée est mieux isolée qu’une toiture simple aussi bien contre le froid que contre la chaleur car la terre et les plantes permettent au bâtiment d’être mieux régulé thermiquement.

Des initiatives réussies

A Paris, l’atelier d’urbanisme a ainsi recensé 128 000 toitures terrasses dont 18 % sont plates, donc facilement exploitables. Parmi les initiatives les plus en vue, on peut citer la transformation en potager du toit de l’Opéra Bastille avec l’aide de l’entreprise Topager. Plusieurs terrasses voient ainsi pousser tomates cerises, salades, etc. Les productions sont distribuées aux collaborateurs de l’Opéra de Paris et aux restaurants alentours. En Ile-de-France, on peut également citer l’exploitation de toiture du centre-commercial les Arcades à Noisy-le-Grand avec l’entreprise de maraîchage «Ma Salade à Toit», une ferme urbaine dotée d’un espace restauration sur place. Les légumes nécessitent peu de terre et peuvent tout à fait pousser en toiture. Ce type d’initiative est poursuivie jusqu’à présent pour des préoccupations environnementales plutôt que d’une rentabilité, mais cela pourrait constituer une source de revenus pour la copropriété. Les toitures pourraient être louées comme c’est le cas pour les panneaux solaires. Enfin, dans un secteur inondable, la transformation de surfaces artificielles en surfaces perméables, qu’elles soient en toiture ou au sol, permet de limiter le ruissellement et d’éviter les inondations.

Par qui se faire aider ?

Lorsqu’on n’est pas un spécialiste, se faire conseiller est indispensable pour savoir à quel endroit il est possible de végétaliser, quelles essences planter. La question se pose notamment lorsqu’il s’agit d’un espace sur dalle comme celles qui recouvrent, par exemple, des niveaux de parkings, un cas assez fréquent en copropriété. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les dalles peuvent être végétalisées mais l’étanchéité doit absolument être préservée, ce qui nécessite des compétences spécifiques. L’APC propose un annuaire des bureaux d’études ou des paysagistes sur son site. Autre solution pour bénéficier de conseils : aborder la végétalisation lors d’un rendez-vous avec le bureau d’études chargé d’élaborer le diagnostic technique global (DTG) et le plan pluriannuel de travaux (PPT) de la copropriété. La végétalisation peut, en effet, être intégrée dans une démarche liée au confort d’été, obligatoirement incluse dans la réflexion sur la rénovation énergétique.

Quel coût ?

Pour arriver à élaborer un projet, la question cruciale est le coût. En effet, s’il s’agit de plantations simples et d’un arrosage manuel, un espace de 100 m2 peut être végétalisé pour un montant compris entre 3 000 et 10 000 euros si un revêtement de sol doit être enlevé. Mais pour un projet plus ambitieux avec un système d’irrigation, un aménagement paysager, des végétaux déjà de taille importante, les coûts peuvent être beaucoup plus élevés. Il faut également prévoir le coût de l’entretien, ce qui nécessite de créer un nouveau poste de charge voté en assemblée. L’entretien de massifs fleuris ou même la tonte nécessitent, en effet, un passage régulier et, en général, un contrat avec un jardinier. Sans entretien, la végétation peut se transformer en friche ou bien dépérir. Ces coûts peuvent décourager une partie des copropriétaires. C’est donc seulement s’ils y trouvent un meilleur confort et une valorisation de leur bien que le projet peut arriver à terme. Parfois, la végétalisation peut aussi être menée dans le cadre d’un projet plus large, ce qui permet qu’il soit mieux accepté. Il peut par exemple s’agir de la création d’un garage pour les vélos ou d’une réfection du «local poubelle». Reste ensuite à voter le projet en assemblée générale, en principe à la majorité de l’article 25 qui englobe tous les travaux portant transformation, addition ou amélioration. La végétalisation, notamment si elle participe à un meilleur confort thermique peut être votée dans le cadre du PPT.

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