Quand un sujet apparemment simple révèle l’ampleur du hiatus entre le législateur, qui réforme, et les professionnels censés appliquer…
Point d’orgue des réformes de la loi du 1965 commencées par la loi ELAN de 2018 et l’ordonnance de 2019, la loi Climat et résilience de 2021, en rendant obligatoire la programmation pluriannuelle des travaux dans les copropriétés, a redonné de l’importance au «fonds de travaux». Créés par la loi ALUR de 2014, mais alimentés jusqu’ici a minima, les fonds de travaux des copropriétés ont généralement été mobilisés au fil de l’eau pour des petits travaux courants, et ont de ce fait été maintenus à un étiage très bas.
Cela ne pourra plus être le cas désormais : d’une part, les cotisations se feront nécessairement plus importantes (elles devront permettre de financer 25 % au moins des plans pluriannuels de travaux) et d’autre part, les fonds ne pourront plus être utilisés que pour financer les travaux des plans adoptés. Les fonds vont donc grossir, et devront être utilisés pour des travaux dont la répartition s’effectue majoritairement en charges spéciales : bâtiment, escaliers, ascenseurs, etc.
Or, à l’heure actuelle, la profession a largement sous-estimé un problème comptable redoutable qui se cache sous ce dispositif. Et n’a pas obtenu subséquemment que les éditeurs des logiciels mettent en place les process automatisés, sans lesquels la gestion des fonds de travaux risque de s’avérer complexe et surtout chronophage.
Le fonds de travaux étant attaché à chaque lot, le problème vient de la distorsion inévitable entre la répartition des appels de cotisations du fonds, obligatoirement en tantièmes généraux, et celle des affectations au financement des travaux, qui «doit tenir compte de l’existence de parties communes spéciales ou de clefs de répartition des charges» (art. 14-2-1, L. 1965).
La conséquence inévitable est la nécessité de tenir un sous-compte du fonds de travaux par lot et non un compte 105 global comme prévu par le plan comptable. Sans cela, il sera impossible au moment de boucler le financement d’une opération de travaux, de connaître le disponible réel dans le fonds de travaux des lots participants.
À l’occasion de formations, lorsque le sujet est évoqué avec des gestionnaires et des comptables, ils tombent généralement des nues et envisagent devoir travailler sur tableur et procéder par écritures manuelles lot par lot !
À suivre…
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 709 de juin 2025