Rassembler, unir les voix pour mieux faire fonctionner les immeubles en copropriété au Québec, voilà la mission que s’est donnée Yves Joli-Cœur depuis une quarantaine d’années. Il s’y emploie au quotidien, en tant qu’avocat associé, médiateur, arbitre, lobbyste, enseignant, auteur, membre fondateur d’une association destinée à aider les copropriétaires...
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 701 de septembre 2024
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Lors de notre entretien en visioconférence (plus de 5 000 kilomètres nous séparent), on découvre un sémillant sexagénaire au verbe net et chantant. Seul, au milieu d’un open space typiquement outre-Atlantique, qui pourrait croire qu’Yves Joli-Cœur soit devenu une figure tutélaire du droit de la copropriété au Québec ?
Pionnier de la matière dans les années 80-90, à une époque où se développe la copropriété dans le paysage immobilier québécois, et plus largement canadien, il poursuit depuis toujours un seul et même objectif : conseiller, en tant qu’avocat associé dans l’un des cabinets les plus importants de la Belle Province, tout en sensibilisant ses compatriotes aux caractéristiques de la vie en copropriété «où l’on partage un actif et un toit», selon ses propres mots.
Fin connaisseur des différents modèles de copropriété en Europe, ce boulimique de travail prévient d’emblée : «Bien que la législation québécoise se soit inspirée de votre loi de 1965, elle s’en distingue tant dans sa philosophie que dans sa déclinaison pratique». Certes, il existe comme en France un syndicat, c’est-à-dire une entité légale regroupant tous les copropriétaires, mais la loi n’impose pas de recourir à un syndic professionnel. «Ici, on a une vision plus collective qu’individuelle de la copropriété, où chacun doit prendre sa part au bon fonctionnement de l’immeuble», explique l’avocat, tout sourire.
Concrètement, deux organes décisionnels sont à la manœuvre.
D’un côté, une assemblée de copropriétaires aux pouvoirs limités. Elle se réunit tous les ans pour prendre des décisions collectives (budget, élection des administrateurs,…).
De l’autre, un conseil d’administration, aux pouvoirs étendus, qui agit comme mandataire du syndicat. Composé généralement de plusieurs copropriétaires, il a la responsabilité de la conservation de l’immeuble et de l’entretien de ses parties communes, outre toutes les opérations d’intérêt commun. À cette fin, il peut mandater un gestionnaire pour l’assister dans ses tâches administratives. «Il peut arriver que le syndicat mobilise un professionnel de la gestion immobilière, notamment pour superviser l’administration de grandes copropriétés. C’est un phénomène qui est d’ailleurs susceptible de s’amplifier, car faute de foncier désormais disponible sur notre territoire, la surélévation des copropriétés existantes va s’imposer progressivement, avec pour corollaire une augmentation de la taille des bâtiments», souligne Yves Joli-Cœur, le bien nommé.
En effet, il est à l’origine en 1999 du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec, un organisme à but non lucratif, destiné à aider les copropriétaires et les administrateurs qui, de façon bénévole, œuvrent à la bonne marche et à la valorisation de leurs immeubles. Animé d’un réel goût du partage, il est également l’instigateur d’un site de vulgarisation sur la copropriété : condolegal.com. Dans le même esprit, il anime des colloques, des formations et est l’auteur de treize ouvrages dont un co-écrit sur les copropriétés en difficulté. A ce titre, Yves Joli-Cœur ne ménage pas sa peine pour que la réalisation périodique d’une étude du fonds de prévoyance et la mise en place d’un carnet d’entretien par des professionnels deviennent obligatoires. Ces deux mesures, adoptées fin 2019, ne sont toujours pas entrées en vigueur. «Il faut responsabiliser les copropriétaires sur la nécessaire anticipation des travaux !», lance-t-il.
Celui qui cite volontiers Le Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry : «Je ne suis pour toi qu’un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de l’autre», veut aussi se faire passeur auprès des jeunes générations. Il projette ainsi de créer une bande-dessinée sur la copropriété.
Qui a dit qu’Yves Joli-Cœur était à court d’initiatives ?