Syndics et concurrence déloyale

par Stéphane BENILSI, maître de conférences à l'Université de Montpellier
Affichages : 464

Les syndics professionnels sont soumis, comme tous les entrepreneurs, quelle que soit leur activité, aux principes du droit du marché. Ils sont, ainsi, concernés par le droit de la consommation et par le droit de la concurrence. En particulier, ils sont tenus de se concurrencer de manière loyale : la liberté d’entreprendre ne saurait être absolue, et ses excès peuvent être qualifiés d’actes de concurrence déloyale, sanctionnés par la responsabilité civile extracontractuelle. Or la concurrence fait rage, et si certains seraient tentés par la création d’un ordre professionnel des syndics, la confraternité – qui n’empêcherait d’ailleurs pas ce genre de comportements mais les exposerait à des sanctions disciplinaires – semble bien étrangère aux relations entre syndics !

Cela fait peut-être partie des raisons pour lesquelles l’identité du syndic, «le cas échéant» mentionnée au registre d’immatriculation des copropriétés, n’est pas accessible aux tiers. L’article R. 711-17 du Code de la construction et de l’habitation prévoit, très clairement, que si les tiers peuvent consulter les données relatives à l’identification du syndicat, c’est «à l’exception du nom du syndic». Cela évite de faire du fichier un instrument de démarchage de clientèle dans les mains des syndics professionnels.

Les syndics professionnels sont, en réalité, confrontés à des tensions tant internes qu’externes. Au sein de la profession, la jurisprudence reconnaît une certaine forme de désorganisation structurelle, qui apparaît dans un arrêt récent rendu par la cour d’appel de Chambéry, faisant écho aux propos tenus par un syndic partie à une instance en concurrence déloyale : «la profession de gestionnaire de copropriété est actuellement peu prisée et […] connaît, de manière structurelle, un turn-over important». Cela se traduit, concrètement, par de nombreux litiges entre des syndics et d’anciens salariés ayant monté leur entreprise concurrente, ces derniers étant souvent accusés d’avoir utilisé des fichiers appartenant à leur ancien employeur.

À la frontière de la profession, de nouveaux intervenants sont apparus de manière spectaculaire, ces dernières années : les «néo-syndics». Certains d’entre eux ont orchestré des campagnes publicitaires tapageuses dénonçant la profession de syndic de manière assez générale. Or le dénigrement constitue un acte de concurrence déloyale.

Rappelons, à titre liminaire, que le doyen Roubier avait identifié trois catégories de fautes pouvant engager la responsabilité pour concurrence déloyale : la désorganisation de l’entreprise rivale, le dénigrement, et la confusion. La confusion entre syndics ne semble pas encombrer les prétoires, mais le fait de se faire passer pour un franchisé d’une enseigne connue ou de parasiter un syndic célèbre serait constitutif de concurrence déloyale. Certains auteurs ajoutent, à cette typologie des fautes, la violation de la loi. Certains gestionnaires d’immeubles pourraient, ainsi, occasionner une concurrence déloyale sur d’autres marchés que celui qui nous intéresse, notamment en favorisant certains professionnels dans l’attribution de contrats relatifs à des travaux.

 

Sur le marché des syndics, la jurisprudence révèle de nombreux litiges relatifs à la concurrence déloyale par violation de la loi (I), à la désorganisation de l’entreprise concurrente (II) et un cas célèbre de dénigrement (III).

Stéphane BENILSI, Maître de conférences à l’Université de Montpellier

Stéphane BENILSI, Maître de conférences à l’Université de Montpellier

PDF

Acheter cette étude en version PDF
pour 8,99 € seulement sur edilaix.com

Certaines images utilisées sur ce site proviennent de Adobe Stock.
Abonnez-vous ou connectez-vous pour lire la suite.