[N° 557] - Maintenance ascenseur : réduisez vos coûts !

par Paul TURENNE
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Compliquée, fastidieuse, difficile à contrôler... La maintenance des ascenseurs reste pourtant un poste de dépenses important au sein d’une copropriété. Le point sur les éléments à surveiller pour allier économies, sécurité et efficacité.

Paul TURENNE

Pour comprendre les enjeux des contrats de maintenance ascenseur et le cadre réglementaire, mieux vaut effectuer un retour en arrière. Car jusqu’en 2004, la réglementation délimitait deux types de contrat. Le premier dit « simple » comprenait l’entretien préventif sur la base d’une visite de périodicité mensuelle, le contrôle semestriel des éléments de suspension, la vérification annuelle du bon fonctionnement du parachute, le nettoyage annuel de la cuvette, de la machinerie, du toit de cabine et les interventions de dépannage.
L’organisation et le contenu des prestations restaient à l’entière discrétion de l’entreprise soumise à une obligation de résultats uniquement pour les réparations. Mais tout remplacement de matériel, hormis quelques «petits» éléments listés dans l’arrêté du 11 mars 1977,  était à la charge des copropriétaires.
« L’ascensoriste effectuait donc tranquillement ses visites mensuelles et même si l’entretien était mauvais, le risque était reporté sur la copropriété » souligne Gervais Becquet, consultant exerçant depuis 20 années dans le conseil, contentieux et la maîtrise d’oeuvre en ascenseurs*. « D’où une incertitude financière importante du fait de l’absence de prévisibilité des dépenses en cas de défaillance. »
Le deuxième type de contrat dit « complet » obligeait l’entreprise, en plus des prestations du contrat « simple », à remplacer, à sa charge, des pièces telles que la machine de traction et le système de commande, hors actes de malveillance. Le coût de ce forfait devait correspondre à 27 % de la part du contrat, mais aucun critère de remplacement précis n’était fixé. « L’entreprise pouvait ainsi juger que les câbles, par exemple, étaient encore en bon état et attendre l’extrême limite pour les changer. » Autre problème fréquemment rencontré : les vis et couronnes, pièces situées sur le treuil, qui devaient être remplacées au titre du contrat, une fois la tolérance d’usure atteinte. « Or la plupart du temps, les ascensoristes arguaient de l’absence de pièces de rechange au dernier moment pour faire payer le remplacement du treuil aux copropriétaires. » De plus en plus de voix se sont donc élevées pour dénoncer l’absence de
visibilité des réparations réellement effectuées en dépit du surcoût, certains copropriétaires demandant même le remboursement des sommes versées.
Des demandes sans aucun fondement légal, s’agissant de contrats à fonds perdus. Dernier point litigieux : l’aspect trompeur du terme contrat « complet », puisque ce dernier excluait, de fait, les cas de vétusté, et manquait de transparence concernant les prestations d’entretien préventif et les horaires d’intervention.


Evolution législative

Face à ce flou et aux protestations, le législateur a donc réagi en abrogeant l’arrêté interministériel du 11 mars 1977 définissant les anciennes conditions d’entretien, et en introduisant de nouvelles obligations contractuelles en novembre 2004 (cf. encadré « Contrat de maintenance : des obligations à respecter »). Le contrat de base reprend ainsi le principe du contrat simple, les pièces en garantie étant élargies aux éclairages cabine, de secours, aux systèmes de liaison bidirectionnelle et aux alarmes. Quant au contrat dit étendu qui remplace le complet, il ne comprend plus de liste normative et formatée, ce qui implique que le remplacement des pièces détachées n’est pas systématiquement inclus dans les obligations minimales d’entretien. Les cocontractants doivent donc décider, parmi les pièces détachées principales constituant l’ascenseur, celles bénéficiant d’un remplacement dans le cadre du contrat et celles à la charge des copropriétaires en cas de défaillance. D’autre part, la limite de remplacement des pièces détachées usées est fixée en nombre d’années et figure dans le contrat d’entretien. « Reste que dans 99 % des cas, c’est l’ascensoriste qui décide des pièces incluses, car le syndicat de copropriétaires manque souvent de connaissances pour imposer les siennes » constate Gervais Becquet. Exemple typique : les appareils hydrauliques qui comportent des vérins et consomment donc de l’huile. « Si vous prenez un contrat ascensoriste, l’huile du vérin n’est jamais pris en charge. Vous allez donc payer 2 000 euros le remplacement de l’huile tous les cinq ans, alors qu’en l’ayant préalablement inclus, cette dépense serait à la charge de l’exploitant. » L’autre difficulté vient de la difficulté à déterminer les pièces réellement prises en charge, certaines d’entre elles étant mentionnées à la fois dans les conditions générales et dans les conditions particulières.
« D’autre part, il faut souvent lire le libellé complet du contrat pour comprendre si l’on a affaire à un contrat de type étendu ou de base, chaque ascensoriste utilisant ses propres termes commerciaux » déplore l’expert. De quoi brouiller et complexifier encore le message...


Veiller au carnet d’entretien

En contrepartie de ces avancées pour les copropriétaires, le législateur a laissé la possibilité aux ascensoristes d’espacer leurs visites d’entretien jusqu’à 6 semaines, au lieu d’une par mois auparavant.  « Par ailleurs, en dehors des essais de câbles ou des nettoyages dont la périodicité est clairement fixée, le contenu des visites est laissée à la libre appréciation de l’entreprise qui peut mettre en oeuvre les procédures et les méthodes qu’elle souhaite » rappelle Gervais Becquet. Le législateur s’est en effet contenté de formater quelques prestations de sécurité, mais n’a fixé aucune règle concernant le déroulement de la prestation globale. Une évolution qui ne serait pas sans influence sur la qualité de l’entretien, les techniciens étant souvent amenés à voir 20 ou 25 machines par jour. Beaucoup trop, alors que la durée à consacrer par ascenseur ne devrait pas descendre en dessous de trente minutes, selon Michel Misandeau, expert de la commission «ascenseur» de l’Association des responsables de copropriété (Arc). Seule solution pour s’assurer du sérieux de la prestation : vérifier le travail effectué en examinant le carnet d’entretien. Mais le législateur n’ayant pas précisé la nature du support de ce dernier (papier ou informatique), les entreprises délaissent bien souvent la version papier au profit d’outils de pointage en temps réel.
Et pour celles qui le laisse sur place, les écueils sont nombreux, tant pour l’entreprise que pour les copropriétaires : accès machinerie périlleux avec échelle, trappe, fermeture à clef, absence de gardien ou bien encore, horaires non compatibles. « Pour y remédier, certaines copropriétés ont mis en place une boîte aux lettres dédiée au carnet d’entretien et accessible à quelques membres du conseil syndical, à proximité de la machinerie ou de l’ex-loge du gardien » indique Gervais Becquet.
En ce qui concerne le contenu du carnet, l’heure d’arrivée et de départ des interventions doivent obligatoirement y figurer, ainsi que la nature des prestations effectuées par l’ascensoriste. En revanche, celles-ci sont souvent codées (cf. encadré « Exemples de codes d’intervention »). Ces sigles parlants pour les techniciens qui savent à quoi ils correspondent, sont en revanche incompréhensibles pour les copropriétaires. Même si une légende est fournie, voilà qui est loin de faciliter la clarté et la compréhension des actions menées. Des difficultés qu’il reste possible de déjouer en contractualisant les choses.

* Gervais Becquet Consultant Ascenseur (GBCA) :
- agrément à la pratique du droit à titre accessoire nécessaire à l’activité de conseils
- intervenant  formateur pour les organismes liés au logement social

 


Contrat de maintenance : des obligations à respecter

Obligatoire en copropriété, le contrat de maintenance est conclu pour une période minimale d’un an entre les propriétaires de l’ascenseur et l’ascensoriste chargé de sa surveillance, son entretien et son dépannage le cas échéant.
Le législateur fixe les clauses et obligations minimales du contrat de maintenance. On peut citer :

- La durée du contrat, les modalités de sa reconduction ou de sa résiliation
- La description, établie contradictoirement, de l’état initial de l’installation, puis de celui en sortie de contrat
- Les conditions de disponibilité et de fourniture des pièces de rechange, et l’indication du délai garanti pour le remplacement des petites pièces de l’installation présentant des signes d’usure excessive (boutons, pommelles de porte, ampoules...)
- L’obligation d’effectuer une visite de maintenance toutes les 6 semaines au minimum
- Un engagement sur le délai maximal de dépannage
- L’obligation d’intervenir 24 heures sur 24 pour sortir des personnes bloquées dans l’ascenseur
- L’obligation de tenir à jour le carnet d’entretien mentionnant les visites, opérations et interventions effectuées
- L’obligation de remettre au propriétaire un rapport annuel d’activité
- Les garanties apportées par les contrats d’assurances de l’entreprise d’entretien
- Les pénalités encourues en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution des obligations contractuelles ainsi que les modalités de règlement des litiges
- Les conditions et modalités de recours éventuel à des sous-traitants
- Les conditions dans lesquelles peuvent être passés des avenants
- La formule détaillée de révision des prix

 

En savoir plus :
Décret n°2004-964 du 9 septembre 2004 relatif à la sécurité des ascenseurs et modifiant le code de la construction et de l’habitation.
Article R125-2-1 du Code de la construction et de l’habitation

A noter : Un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction et de l’industrie établit la liste des petites pièces mentionnées au a du 2° de l’article R. 125-2-1 et précise, en tant que de besoin, le contenu des dispositions minimales d’entretien ainsi que les modalités de tenue du carnet d’entretien.  Les références du contrat d’entretien de l’ascenseur ainsi que sa date d’échéance doivent notamment y être inscrites.


10 conseils pour bien négocier son contrat :

•Le prix d’un contrat de maintenance se calcule en fonction des caractéristiques techniques de l’installation (charge maximale, nombre d’étages, accès au sous sol…), de l’environnement (nombre de logements par palier, âge de l’ascenseur…), sans oublier le trafic d’utilisation.

• Signer un contrat d’un an maximum avec trois mois de préavis. Certains ascensoristes essaient parfois de faire signer des contrats de cinq ans avec 6 mois de préavis, mais en cas de problème, il devient très difficile de se défaire de l’exploitant.

• S’appuyer sur les guides édités par l’Arc ou l’Ucim (cf. coordonnées à la fin du dossier) pour rédiger une liste de pièces prises en charge, relativement confortable.

• Négocier les délais d’intervention en cas de panne (entre 45 minutes et 4h) et les délais de  réparation une fois le technicien sur site (12h maximum) en les modulant en fonction du type de pièces défaillantes.

• Vérifier le respect de ces délais en contrôlant le carnet d’entretien. L’analyse des heures d’appel, d’arrivée et de départ est souvent instructive sur les performances d’organisation des entreprises.

• Moduler les taux de pénalité en fonction de la gravité des manquements des ascensoristes. Ces derniers fixent toutefois la limite à 5 %, ce qui reste dérisoire, alors qu’il n’existe légalement aucune limite. Sous la pression, les poids lourds du secteur, qui raisonnent en nombre de contrats totaux, sont toutefois prêts à faire quelques sacrifices qui seront compensés de façon globale.

• Même si ce n’est pas une obligation légale, faire établir un état des lieux de l’installation lors d’une consultation préalable et irrévocable, et non pas après la désignation de l’entreprise.

• Demander à ce que le contenu du bilan annuel intègre une base de référence en fonction du type et des caractéristiques de l’ascenseur, afin de disposer d’éléments de comparaison.

• Exiger contractuellement que le matériel remplacé en cas de défaillance soit standard et donc réparable dans le futur par n’importe quel prestataire, sans surcoûts importants du fait des différences de technologie. Les gros du secteur ont, en effet, tendance à vendre des équipements perfectionnés, et donc chers,  alors que des pièces universelles de qualité existent chez des fabricants généralistes comme Sodimas, Autinor ou Octé.

• Enfin exiger, autant que faire se peut, des coûts de prestations détaillés sur le contrat d’entretien. Les entreprises ne rentrent, en effet, jamais dans le détail du montant des pièces et du taux horaire, ce qui ne permet pas de voir le coût des dépenses réelles et si les montants demandés sont justifiés.


Aller plus loin

L’AFNOR a élaboré un référentiel qui propose un guide de contrat «  étendu ». En savoir plus : www.afnor.org
« Ascenseurs et monte-charge - Guide pour l’élaboration d’un contrat d’entretien à clauses minimales réglementaires et d’un contrat d’entretien étendu à caractère volontaire »
(référence FD P82-022)

Consulter l’Union de copropriétaires immobiliers (Ucim)
82 rue Cuvier LYON       
Tel . 04 72 74 12 90  
www.ucim-inter-coproprietes.org

Ascenseurs : comment éviter le pire ? (2ème édition Octobre 2006) Guide réalisé par la Commission «ascenseur» de l’Association des responsables de copropriété (Arc)
www.unarc.asso.fr