Copropriété : La consultation obligatoire du conseil syndical

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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copropriétéLe conseil syndical est un organe incontournable dans le bon fonctionnement des copropriétés en ce qu’il fait office d’intermédiaire entre les copropriétaires et le syndic. Mais encore faut-il que ce dernier entretienne des relations régulières avec les conseillers syndicaux, à charge pour eux de faire preuve de réactivité. Pour éviter que certains syndics ne fassent preuve de trop d’autonomie, le législateur est intervenu pour imposer une consultation du conseil syndical, sans pour autant aller jusqu’à mettre en place l’obligation de suivre l’avis rendu.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 678 de mai 2022

Les cas de consultation obligatoire 

Les cas de consultation obligatoire du conseil syndical concernent les actes les plus importants de la vie d’une copropriété, notamment l’organisation de l’assemblée générale, tout en laissant une marge d’appréciation aux parties prenantes.

1/Elaboration de l’ordre du jour de l’assemblée générale.- Le syndic est tenu de se rapprocher du conseil syndical pour l’élaboration de l’ordre du jour de l’assemblée générale. On notera que l’article 26 du décret du 17 mars 1967 qui fixe cette obligation, utilise le terme de «concertation», lequel va bien au-delà d’une simple consultation puisqu’il suppose un accord entre les parties. Autrement dit, une résolution qui n’aurait pas reçu l’aval du conseil syndical ne peut, du moins en théorie, être inscrite à l’ordre du jour. Pour autant, le texte ne fixe aucune sanction en cas de violation de cette obligation, ce qu’a d’ailleurs rappelé la jurisprudence (CA Orléans, 18 juin 2018, n° 16/03784).

2/Détermination du budget prévisionnel.- Corolaire de l’ordre du jour de l’assemblée générale, le budget prévisionnel doit également être élaboré en concertation avec le conseil syndical (art. 18, L. 1965). Ici encore, la terminologie employée peut laisser penser que l’avis des conseillers syndicaux doit s‘imposer, à ceci près, qu’il n’est prévu aucune sanction en cas de défaut de consultation. Par ailleurs, le syndic étant un professionnel et ayant une vision globale sur la gestion de l’immeuble, il est le plus à même de déterminer au mieux le montant du budget prévisionnel. 

3/Consultation obligatoire pour certains marchés et contrats.- L’assemblée générale, statuant à la majorité de l’article 25, détermine un montant des marchés et contrats à partir duquel la «consultation» du conseil syndical est obligatoire (art. 21, L. 1965). Dans la pratique, ce montant est déterminé en fonction des caractéristiques de la copropriété, notamment sa taille et son budget prévisionnel. Il s’agit de trouver un juste équilibre afin de garantir la consultation du conseil syndical en vue de préserver les intérêts de la copropriété tout en accordant au syndic une certaine liberté afin qu’il puisse gérer au plus vite sans avoir à attendre systématiquement une réponse qui pourrait tarder.

4/Les travaux urgents.- En cas d’urgence, le syndic est tenu de procéder aux travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble. Il lui est alors possible d’appeler auprès des copropriétaires des provisions en vue de l’ouverture du chantier et de son premier approvisionnement, sans délibération préalable de l’assemblée générale mais après avoir pris l’avis du conseil syndical. Cette provision ne peut excéder le tiers du montant du devis estimatif des travaux (art. 37, D. 1967).

5/Désignation d’un administrateur provisoire.- Lorsque la copropriété est en difficulté, le syndic doit consulter au préalable le conseil syndical avant de demander la nomination d’un administrateur provisoire (art. 62-2, D. 1967).

6/La consultation consécutive à une décision de l’assemblée générale.- L’assemblée générale peut tout à fait décider, à la majorité de l’article 24, que sur un dossier particulier, le syndic devra consulter au préalable le conseil syndical (remplacement d’un prestataire, élaboration d’un cahier des charges…).

 

Communication de l’avis du conseil syndical 

L’avis du conseil syndical est notifié aux copropriétaires, au plus tard en même temps que l’ordre du jour, mais à titre informatif uniquement (art. 11 II-3°, D.1967). Toutefois, on notera que cette obligation concerne les cas où la saisine du conseil syndical est obligatoire en raison du montant des marchés et contrats adopté en assemblée générale. On ne saurait toutefois trop inviter les conseillers syndicaux à communiquer le plus possible sur les avis transmis au syndic, y compris lorsque ceux-ci ne sont pas obligatoires. 

 

Conséquences du défaut de consultation 

Malgré l’hétérogénéité des termes employés pour désigner la saisine préalable du conseil syndical (concertation, consultation, demande d’avis…), il n’en demeure pas moins que celle-ci demeure, dans l’esprit des textes, comme une formalité n’engageant pas le syndic. A aucun moment il n’est prévu l’obligation pour le syndic de suivre l’avis du conseil syndical, ce qui peut toutefois se concevoir. En effet, celui-ci est tenu non seulement aux obligations inhérentes à sa fonction, mais également à un devoir de conseil en tant que professionnel et au respect de règles déontologiques. Exiger qu’il applique un avis qui s’avèrerait illégal ou contraire à une résolution de l’assemblée générale ne saurait sur ce point être concevable. En revanche, que les textes ne prévoient pas de conséquences en cas d’absence de saisine préalable peut être davantage problématique.

S’il ne s’agit pas d’enferrer le syndic dans un formalisme trop contraignant contraire aux intérêts de la copropriété, surtout si le conseil syndical tarde à répondre aux sollicitations qui lui sont faites, on ne saurait pour autant rendre cette consultation purement théorique. La cour d’appel de Paris a rendu une décision intéressante à ce sujet. En l’espèce, le syndic avait remplacé le contrat d’assurances en cours par un contrat plus onéreux souscrit auprès d’une autre compagnie alors même que l’assemblée générale avait décidé que le conseil syndical devait obligatoirement être consulté pour tout marché ou contrat, sauf urgence. Les juges ont considéré qu’en procédant ainsi, quand bien même l’ancienne police d’assurance pouvait paraître inadaptée à la copropriété, le syndic avait commis une faute. Ce dernier a donc dû prendre en charge une partie du surcoût de la prime d’assurance (CA Paris, 13 janv. 2000).