[N°614] - La palette des assemblées

par Nathalie FIGUIERE-BROCARD
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Pour légitimer un certain nombre de réformes, il est devenu d’usage de se fonder sur la volonté de simplifier les règles existantes. Mais cela se traduit parfois par une (trop ?) grande variété de possibilités. Le phénomène n’a pas échappé au domaine des assemblées générales de copropriété, ...

puisqu’il existe dorénavant de multiples occasions de convoquer des assemblées. Tel un artiste s’apprêtant à choisir sur sa palette les bonnes couleurs pour composer son tableau, le praticien doit maîtriser les différentes solutions qui s’offrent à lui afin de faire un choix qui ne sera pas contesté par la suite.

 Par Nathalie Figuière-Brocard, Juriste à l’Association nationale de la copropriété et des copropriétaires (Ancc)

 

I.- L’assemblée générale annuelle

Il est tenu au moins une assemblée générale annuelle dans tous les syndicats (art. 7, al. 1er, du décret du 17 mars 1967, d’ordre public ; Sylvain Grataloup, L’assemblée générale après la loi ALUR, Inf. rap. copr. novembre 2014, p. 27). Le règlement de copropriété peut imposer une cadence plus importante qu’il faut alors respecter.
L’objet de cette assemblée, qui réunit tous les copropriétaires, porte principalement sur l’approbation du budget prévisionnel (art. 14-1 de la loi de 1965).

Exception : les copropriétés en difficulté
Lorsque l’administrateur provisoire est investi «de tous les pouvoirs de l’assemblée générale» par le président du tribunal de grande instance (sur le fondement de l’article 62-7 du décret de 1967), il n’est pas contraint de convoquer une assemblée générale annuelle (art. 7, al. 3 du décret de 1967).

II.- Autres motifs de convocation d’assemblées
La seconde assemblée générale
Lorsque l’assemblée générale n’a pas décidé à la majorité absolue des voix de tous les copropriétaires, et que «le projet n’a pas recueilli au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, une nouvelle assemblée générale» peut de nouveau statuer dans des conditions de majorité plus faibles (art. 24 de la loi de 1965), si elle est convoquée dans le délai maximal de trois mois (art. 25-1 de la loi de 1965, exception faite des décisions inscrites aux n et o de l’article 25 ; J.-M. Roux, L’article 25-1 de la loi du 10 juillet 1965 : explications et mode d’emploi, Loyers et copr., mars 2014, p. 7).

L’assemblée générale spéciale
Une assemblée réunissant seulement certains copropriétaires peut être réunie par exemple, lorsqu’il existe dans la copropriété des syndicats secondaires ou lorsque le règlement de copropriété «met à la charge de certains copropriétaires seulement les dépenses d’entretien d’une partie de l’immeuble ou celles d’entretien et de fonctionnement d’un élément d’équipement» et prévoit que «ces copropriétaires seuls prennent part au vote sur les décisions qui concernent ces dépenses» (art. 24-III de la loi de 1965).

L’assemblée générale convoquée en urgence
«Lorsqu’en cas d’urgence le syndic fait procéder, de sa propre initiative, à l’exécution de travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble, il en informe les copropriétaires et convoque immédiatement une assemblée générale», qui a pour objet de faire ratifier les travaux par l’ensemble des copropriétaires et de valider d’éventuels appels de fonds complémentaires afin de les financer (art. 37 du décret de 1967).

La convocation en vue de désigner un syndic
La loi du 24 mars 2014, dite ALUR, a prévu qu’«en cas d’empêchement du syndic, pour quelque cause que ce soit», le président du conseil syndical puisse convoquer une assemblée générale appelée à désigner un nouveau syndic (art. 18-V de la loi de 1965 modifié).
L’assemblée générale des copropriétaires peut également être convoquée par tout copropriétaire, aux fins de nommer un syndic (art. 17, d. dernier al., de la loi de 1965, modifié suite à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dite Macron).

«L’assemblée générale extraordinaire»
Depuis la loi ALUR, par dérogation aux règles sur le syndicat coopératif prévues à l’article 17-1 de la loi de 1965, «lorsque le syndicat de copropriétaires comporte moins de dix lots à usage de logements, de bureaux ou de commerces et que son budget prévisionnel moyen sur une période de trois exercices consécutifs est inférieur à 15 000 €», et «en cas d’empêchement du syndic ou de défaillance de celui-ci mettant en péril la conservation de l’immeuble, la santé ou la sécurité des occupants, chaque copropriétaire peut prendre l’initiative de convoquer une assemblée générale extraordinaire pour désigner un nouveau syndic ou prendre les décisions nécessaires à la conservation de l’immeuble, de la santé ou de la sécurité de ses occupants» (art. 17-1-1 2° de la loi de 1965).

L’ensemble de ces règles ne fait pas obstacle à ce que d’autres auteurs que le syndic soient à l’initiative de la convocation d’assemblées générales (art. 8 du décret de 1967 offrant cette faculté, dans certaines conditions, au conseil syndical, à un ou plusieurs copropriétaires représentant au moins un quart des voix de tous les copropriétaires -à moins que le règlement de copropriété ne prévoie un nombre inférieur de voix-, au président du conseil syndical, ou encore, à tout copropriétaire à la suite à une autorisation judiciaire).

Il reste à espérer que face à cette grande diversité, il n’y ait pas de doublons et que la sagesse de chacun participe au travail quotidien d’une composition harmonieuse de la vie de la collectivité du syndicat. ●