Ordonnance Covid et copropriété : nouvelle version

par Jean-Marc ROUX - Directeur scientifique des éditions Edilaix
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copropriété - assemblée généraleFace à la virulence du variant Omicron, les pouvoirs publics ont décidé de réactiver l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020. On se souvient que ce texte avait permis, grâce aux règles dérogatoires qu’il comportait, d’assurer à la fois la continuité de la gestion des copropriétés et d’organiser des assemblées générales dématérialisées.

Dans les grandes lignes, la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 (JO 23 janv.) renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le Code de la santé publique, a conservé les mêmes mécanismes que ceux qui avaient été mis en place lors du premier confinement en les assortissant de quelques aménagements.

L’articulation des articles 22 et suivants de l’ordonnance du 25 mars 2020 est maintenue puisque sont abordés successivement le mandat du syndic (I), celui des conseillers syndicaux (II) et la tenue des assemblées générales virtuelles (III).

I.- Le renouvellement du mandat de syndic

L’objectif de l’article 22 de l’ordonnance consiste à éviter la carence de la représentation légale du syndicat et tout en pérennisant l’administration de l’immeuble. Il était donc nécessaire que les mandats arrivant à échéance puissent être reconduits jusqu’à ce que les copropriétaires soient en mesure de statuer sur l’identité du gestionnaire de leur copropriété. Comme par le passé, c’est la technique du renouvellement de la convention conclue avec le syndic qui a été privilégiée.

Ainsi, lorsque l’assemblée générale appelée à désigner un syndic n’a pas pu ou ne peut se tenir, il a été décidé que le contrat de syndic qui expire ou a expiré entre le 1er janvier 2022 et le 15 février 2022 inclus, est renouvelé dans les mêmes termes jusqu'à la prise d'effet du nouveau contrat du syndic désigné par la prochaine assemblée générale des copropriétaires. Cette prise d'effet devra intervenir au plus tard le 15 avril 2022 (ord. 2020, art. 22, al. 1er, mod.). Les gestionnaires devront alors faire preuve de diligence afin que l’assemblée puisse s’exprimer sur ce point dans le délai imparti.

A l’instar des dispositions antérieures, la rémunération forfaitaire du syndic sera déterminée selon les termes du contrat qui expire ou a expiré, au prorata de la durée de son renouvellement dans le respect des conditions ci-avant définies (ord. 2020, art. 22, al. 2).

 

II.- Le renouvellement des mandats des conseillers syndicaux

On ne rappellera jamais assez l’importance d’un conseil syndical impliqué et actif au sein d’une copropriété. Nous en avons d’ailleurs constaté les vertus lors du premier confinement puisque le dialogue entre le syndic et les copropriétaires avait pu être maintenu grâce, précisément, à des conseillers syndicaux assumant leur mission d’assistance et d’information.

D’où la nécessité, là encore, de conserver le bénéfice d’un conseil syndical, quand bien même l’assemblée générale n’aurait pas été à même de statuer sur la désignation de ses membres.

Il a été prévu que lorsque l’assemblée générale appelée à élire les membres du conseil syndical n’a pas pu ou ne peut se tenir, le mandat confié par décision de l'assemblée générale aux conseillers syndicaux, qui expire ou a expiré entre le 1er janvier 2022 et le 15 février 2022 inclus, est renouvelé jusqu'à la tenue de la prochaine assemblée générale des copropriétaires.

Comme cela a été retenu pour le syndic, cette assemblée générale interviendra au plus tard le 15 avril 2022 (ord. 2020, art. 22-1, mod.).

 

III.- Le retour des assemblées générales dématérialisées

Tout a été dit (ou presque) sur la période que nous avons connu il y a encore quelques mois lorsque les décisions des syndicats de copropriétaires étaient adoptées grâce au recours massif aux formulaires de vote par correspondance (perte du débat démocratique, ordre du jour figé, incompréhension des copropriétaires, difficultés d’interprétation des textes, formulaires parfois difficilement exploitables, surcharge des tâches des syndics…).

En dépit des inconvénients inhérents à la tenue des assemblées générales virtuelles, mais compte tenu des risques liés au rassemblement de nombreuses personnes dans un lieu clos, les mesures exceptionnelles autorisant le gestionnaire de l’immeuble à décider qu’une assemblée générale ne se tiendrait pas en présentiel, ont été réintroduites dans notre droit positif.

On se souvient que le syndic pouvait prévoir que les copropriétaires ne participeraient pas à l'assemblée générale par présence physique jusqu'au 30 septembre 2021. Cette opportunité lui est reconnue à nouveau et ce jusqu’au 31 juillet 2022 (ord. 2022, art. 22-2 I, al. 1er, mod.).

En principe, les deux modalités de vote à distance peuvent coexister (vote par voie électronique et vote par correspondance) afin de tenir l’assemblée générale (ord. 2022, art. 22-2 I, al. 2). Dans ce contexte, afin de faciliter la tenue de réunions à distance, et ce jusqu'au 31 juillet 2022, le syndic pourra décider des moyens et supports techniques permettant à l'ensemble des copropriétaires de participer à l'assemblée générale par visioconférence, audioconférence ou tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification, la transmission de leur voix, ainsi que la retransmission continue et simultanée des délibérations. Ces moyens et supports techniques seront utilisés jusqu'à ce que l'assemblée générale se prononce sur leur utilisation (ord. 2022, art. 22-5, mod.).

Toutefois, comme cela lui avait été autorisé auparavant, le syndic pourra prévoir que les décisions du syndicat seront prises au seul moyen du vote par correspondance lorsque le recours à la visioconférence ou à tout autre moyen de communication électronique, apparait impossible (ord. 2022, art. 22-2 I, al. 3, mod.).

Trois précisions nouvelles ont été apportées par la loi du 22 janvier 2022.

Tout d’abord, l’impossibilité servant de fondement à la décision du syndic devra être fondée sur « des raisons techniques et matérielles ». Seules des considérations objectives pourraient donc être invoquées par le syndic. Cela semble exclure des motifs d’opportunité ou de convenance. Quid alors d’une décision du syndic qui repose sur la volonté de se montrer prudent et/ou en présence de copropriétaires qui ne souhaitent majoritairement pas recourir au vote par voie électronique ?

Ensuite, le recours au seul vote par correspondance sera choisi « après avis du conseil syndical ». Cette dernière indication parait tout à fait justifiée car, même si son avis n’est pas liant, il est normal que le conseil syndical soit associé à l’initiative du syndic.

Enfin, et alors que la précédente version de l’ordonnance du 25 mars 2020 était muette sur cet aspect, il a été indiqué que lorsqu’un vote par correspondance est organisé en lieu et place de la tenue d’une assemblée générale donnant lieu à la rémunération forfaitaire visée au premier alinéa de l’article 18‑1 A de la loi du 10 juillet 1965, les prestations fournies par le syndic au titre du traitement de ce vote sont comprises dans le forfait (ord. 2022, art. 22-2 I, al. 3, mod.). En d’autres termes, le surplus de travail apporté par le dépouillement des formulaires de vote et par les diligences tendant à faire signer le procès-verbal dans les huit jours de l’assemblée, ne sera pas susceptible de justifier la facturation d’honoraires supplémentaires, ce que les syndics apprécieront sûrement…

Il est constant que lorsque le syndic décidera de faire application des dispositions dérogatoires et que l'assemblée générale des copropriétaires aura déjà été convoquée, il en informera les copropriétaires au moins quinze jours avant la tenue de cette assemblée par « tout moyen permettant d'établir avec certitude la date de la réception de cette information » (ord. 2022, art. 22-2 II, al.1er).

Néanmoins, il a été ajouté que si le délai d’information de quinze jours ne pouvait être respecté, le syndic pourra prendre la décision - seul - de reporter la tenue de l’assemblée générale et, le cas échéant, décider de recourir à une assemblée générale entièrement dématérialisée. Pour cela, il en informera les copropriétaires, au plus tard le jour choisi pour la tenue de cette assemblée, par tout moyen permettant d’établir avec certitude la date de la réception de cette information. Cette assemblée générale virtuelle se tiendra dans un délai qui ne pourra être inférieur à quinze jours à compter de la date initialement prévue (ord. 2022, art. 22-2 II, al. 2, mod.). 

Autre mesure temporaire destinée à créer un contexte favorable à l’adoption des résolutions, le mandataire d’un copropriétaire pourra recevoir plus de trois délégations de vote si le total des voix dont il dispose lui-même et de celles de ses mandants n'excède pas 15 % des voix du syndicat (contre 10 % habituellement), et ce jusqu'au 31 juillet 2022 (ord. 2022, art. 22-4, mod.).

Pour être relativement complet sur le régime d’exception en vigueur jusqu’au 31 juillet prochain, rappelons que lorsque le syndic décide la tenue d’une assemblée générale entièrement dématérialisée, les règles suivantes sont - à nouveau - applicables :

- l'assemblée générale des copropriétaires est convoquée sans qu'un lieu de réunion soit déterminé, ni indiqué dans la convocation ;

- la convocation précise que les copropriétaires ne peuvent participer à l'assemblée générale que par visioconférence ou tout autre moyen de communication électronique, sans préjudice de la possibilité de voter par correspondance. Lorsque le recours à la visioconférence ou à tout autre moyen de communication électronique n'est pas possible, la convocation précise que les copropriétaires ne peuvent voter que par correspondance ;

- le président de séance certifie exacte la feuille de présence et signe, le cas échéant avec le ou les scrutateurs, le procès-verbal des décisions dans les huit jours suivant la tenue de l'assemblée générale ;

- lorsque les décisions sont prises au seul moyen du vote par correspondance, le président du conseil syndical, ou à défaut, l'un de ses membres, ou en leur absence, l'un des copropriétaires votant désigné par le syndic, assure les missions qui incombent au président de séance en application des dispositions du décret du 17 mars 1967 (ord. 2022, art. 22-3).

Gageons que l’expérience acquise par les praticiens, comme par les copropriétaires, entre 2020 et 2021 permette de gérer cette nouvelle période de crise dans les meilleures conditions.

 

Copropriété - AG et mandats