Copropriété | Lisa BENHAMOU, CITÉMÉTRIE

par La rédaction
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Lisa BENHAMOU, Citémétrie«La requalification de copropriétés en difficultés est un processus long»

Le bureau d’études Citémétrie intervient à la demande de collectivités locales et établissements publics fonciers pour repérer les copropriétés fragiles ou en difficultés et mettre en œuvre des dispositifs d’intervention en vue de leur redressement.

L’antenne Ile-de-France Copropriété est spécialisée dans l’animation de ces dispositifs sous maîtrise d’ouvrage publique. Citémétrie est actuellement l’opérateur de onze dispositifs ANAH : POPAC, OPAH-CD, Plan de sauvegarde.

Diplômée en économie de l’aménagement et du développement local, Lisa Benhamou est responsable de ce département.

Quels regards porte-t-elle sur la loi du 9 avril 2024 sur l’Habitat dégradé ?

Pouvez-vous présenter les clients et les missions Citémétrie ?

Identification et repérage des copropriétés, audit et diagnostic, appui administratif, technique, soutien financier et social, création d’outils de veille, calibrage de programmes d’intervention publique, suivi-animation de ces derniers ...

c’est sur ces volets que le service dont j’ai la responsabilité au sein de la Direction des Opérations, intervient. En Ile-de-France, huit EPCI nous ont ainsi accordé leur confiance en nous désignant en tant qu’AMO, opérateur dédié de sept Plans de sauvegarde, quatre OPAH-CD (en périmètre ORDCOD, NPNRU ou politique de la ville). Les copropriétés visées sont de taille variable entre 30 à 850 lots, mais rencontrent toutes des difficultés d’ordre technique, organisationnel, juridique, social, ou encore urbain …

Nous proposons un écosystème de compétences complémentaires et déployons un accompagnement transversal pour permettre l’assainissement du fonctionnement et la requalification du bâti de ces copropriétés.

 

Quels seraient éclaircissements attendus du volet réglementaire de la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 ?

L’article 18 élargit les critères de saisine et de désignation du mandataire ad hoc (MAH) chargé d’auditer et proposer des mesures préventives pour rétablir l’équilibre des comptes. L’objectif de ce nouveau texte est louable : remonter la pente avant que la situation ne soit gravement compromise. Désormais, l’absence d’approbation des comptes depuis au moins deux exercices justifie la saisine du tribunal judiciaire. Sur le terrain, nous sommes de plus en plus confrontés à des syndicats de copropriétaires dont les comptes ne sont pas adoptés depuis plusieurs exercices. Cette situation fait obstacle à l’engagement des procédures de recouvrement à l’encontre des copropriétaires débiteurs. La sanction du non-déclenchement de la procédure d’alerte est particulièrement sévère puisqu’elle fait peser sur le syndic la prise en charge totale ou partielle des honoraires de l’administrateur provisoire éventuellement désigné à la suite de la mission du mandataire ad hoc. Les syndics risquent d’abandonner le navire dès les premières difficultés pour éviter des pénalités laissant ces copropriétés sans gestion et dans une spirale de dégradation.

Cette nouvelle loi permet aux acteurs qui ont les informations sur la fragilisation de la copropriété, de déclencher la procédure de désignation. Les collectivités locales, déjà investies dans la lutte contre l’habitat indigne, pourraient jouer là un rôle plus actif, en disposant d’un registre des copropriétés fiable avec une analyse poussée des indicateurs de fragilité. Cependant, si la désignation est initiée par un autre acteur que le syndic, la procédure au fond reste couteuse en matière d’honoraires d’avocats. Même s’il est toujours plus rentable d’intervenir en amont que de mettre en place des outils palliatifs.

Cette analyse poussée des indicateurs économiques, de gestion et de fonctionnement des copropriétés du territoire et la formulation de préconisations et de mesures rectificatives c’est ce qui est demandé aux opérateurs AMO dans le cadre des dispositifs de VOC et de POPAC. Cette prestation dure six mois tout au plus et est subventionnée par l’ANAH contrairement aux missions du MAH.

Enfin, il est dommage que les modalités de calcul du taux d’impayés n’aient pas été revisitées. L’article 61-2 du décret du 17 mars 1967 modifié exclut du calcul du taux d’impayés «les sommes devenues exigibles dans le mois précédent la clôture de l’exercice». En pratique, le taux d’impayés est toujours calculé sur la base de l’annexe 1, c’est-à-dire après répartition de charges qui ne sont pas encore exigibles auprès des copropriétaires et qui impactent les soldes débiteurs des comptes copropriétaires.

Une meilleure définition des missions du MAH, une réduction des coûts, une responsabilisation progressive des syndics, une implication accrue des collectivités locales et une sensibilisation des acteurs concernés sont autant de pistes pour améliorer l’efficacité de cette loi.

 

Pouvez-vous présenter un chantier exemplaire de sauvegarde ?

La requalification de copropriétés en difficultés est un processus long souvent renouvelé au-delà des cinq à sept ans initialement prévus pour permettre d’achever une réhabilitation globale des parties communes. Les deux premières années se concentrent sur l’amélioration de la gestion comptable du syndicat, la massification du recouvrement des impayés et le suivi social des copropriétaires pour évaluer leurs capacités contributives et limiter tout effet de basculement de la situation par le lancement de travaux qui ne seraient pas soutenables.

Parallèlement, nous menons avec le conseil syndical et le syndic des ateliers de travail pour engager les travaux urgents et prioritaires (levé des éventuels arrêtés de mise en sécurité), et désigner un architecte qui aura pour mission de concevoir un programme de réhabilitation complet intégrant un volet d’amélioration énergétique ambitieux. Notre objectif est de rechercher toutes les solutions de financement (collectives et individuelles) permettant des restes à charges maitrisés. La finalité : le retour à un fonctionnement pérenne et la réhabilitation complète du bâti visant à réduire les charges, notamment énergétiques, et retrouver une attractivité sur le marché immobilier. Bien entendu, cette dernière composante ne dépend pas uniquement de l’état de l’immeuble bâti mais également de son insertion urbaine, entendu son environnement immédiat, son quartier.

Le projet urbain doit alors se concevoir à la lumière des dysfonctionnements existants pour répondre à des besoins de réaménagement tels que la rétrocession d’espaces privatifs, une DUP (aménagement pour démolition partielle, portage de lots ciblé ou massif …).

Une stratégie de requalification globale inclus alors un interventionnisme public sur le parc privé complété d’investissements pour le réaménagement des espaces publics avoisinants souvent tout aussi déqualifiés.