Portrait : Florence Tulier-Polge, une âme de sauveteuse

par Sophie Michelin-Mazeraux, Journaliste juridique
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 ©Sebastien DOLIDONAdministrateur judiciaire depuis près de trente ans, Florence Tulier-Polge s’attelle à ses missions avec toujours autant de ferveur.

De la cité du Chêne Pointu en Seine-Saint-Denis à celle de Grigny 2 dans l’Essonne, elle est même devenue une figure incontournable de l’administration provisoire des copropriétés en difficulté.
Travailleuse acharnée, elle défend également les intérêts de sa profession.

Une femme qui a toujours un projet devant elle. 

«Quand on fait ce métier, on prend le risque de ne pas être aimé», glisse sans ambages Florence Tulier-Polge. Nous voilà prévenus ! Nul doute que l’administrateur judiciaire n’est pas un auxiliaire de justice comme les autres. Il intervient dans des situations d’urgence pour dénouer des crises, trouver des solutions, accompagner des décisions parfois difficiles, comme le “recyclage” d’une copropriété en déshérence par voie d’expropriation publique. 

Cela ne l’a pourtant pas empêchée de ressentir un véritable «coup de foudre», selon ses propres mots, pour cette profession, au sortir d’un double cursus juridique, un magistère de droit des activités économiques et un diplôme d’études supérieures spécialisées en droit des affaires, obtenus à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Un solide bagage complété par des études littéraires et de langues, car Florence Tulier-Polge n’aime rien tant que la multiplication des expertises au service de l’intérêt collectif.

A l’issue d’un stage professionnel effectué au sein d’une étude en Seine-Saint-Denis où elle éprouve son goût pour le terrain et les responsabilités exigeantes, elle prête serment en 2001, avant de fonder quelques années plus tard son propre cabinet d’administrateur judiciaire à Evry dans l’Essonne. 

«Comme la plupart de mes confrères, j’étais à l’origine essentiellement une commercialiste», raconte Florence Tulier-Polge. Dit autrement, elle était mandatée pour restructurer des entreprises en difficulté dans le cadre notamment de procédures de sauvegarde, de redressement ou de cession. 

Puis, à la faveur d’heureux hasards, comme elle se plaît à le dire, et parce qu’il n’existait pas dans les années 2000 d’administrateurs franciliens prêts à s’investir auprès de copropriétés en difficulté, alors que près de la moitié d’entre elles sont concentrées en Seine-Saint-Denis, elle développe progressivement une expertise sur ce segment.

«Rétablir l’équilibre financier d’une copropriété constitue à la fois une splendide et lourde tâche, qui nécessite des compétences croisées, de l’endurance -les dossiers se déploient sur deux à trois ans minimum- du sang froid, de la polyvalence, des compétences techniques et comptables, des qualités de communication au regard de la multiplicité des interlocuteurs concernés et une indépendance sans faille», assure-t-elle. 

Et de poursuivre, «je ne suis pas le bras armé du maire, du préfet ou encore des opérateurs fonciers, mobilisés autour de certains grands ensembles très dégradés, comme à Grigny 2. Chacun doit occuper la place qui est la sienne, se déployer dans toute sa compétence et rien que sa compétence».    

Reconnue désormais comme une administratrice spécialisée, et rare professionnelle à détenir un mandat civil et commercial, elle est aujourd’hui désignée sur toute la France pour remettre à flot des copropriétés prises dans la tourmente de problèmes financiers, voire sociaux. 

Mais Florence Tulier-Polge n’a pas d’yeux que pour les immeubles fragilisés, elle officie également au sein du Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, pour défendre la profession, comme elle l’a déjà fait en 2015 à propos de la mise en place d’un tarif réglementé applicable au mandat ad hoc et à l’administration provisoire de copropriétés en difficulté. Son prochain cheval de bataille : la modernisation des textes sur la carence et la scission de copropriété.