Réforme ELAN : A propos du conseil syndical

par YS
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3 questions posées à Catherine Blanc-Tardy, Flavien Bonnette et Stéphane Bandini.


Que pensez-vous de la possibilité pour le conseil syndical de bénéficier d’une délégation générale de l’assemblée générale ?


Catherine Blanc-Tardy Catherine Blanc-Tardy :

«Prendre des décisions : voici une nouvelle fonction définie et encadrée depuis l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019. Elle complète les missions historiques : assister, contrôler le syndic et donner son avis. Auparavant, le conseil syndical ne pouvait bénéficier de la part de l’assemblée générale que d’une délégation pour «un acte ou une décision déterminée».

Nous pouvons nous féliciter de l’intention du gouvernement de rendre réactive la prise de décision en copropriété rythmée jusqu’à présent par l’assemblée générale.

Un cadre est prévu : c’est l’assemblée générale qui seule vote cette délégation à la majorité des voix de tous les copropriétaires, fixe le montant maximum des sommes allouées pour une durée de deux ans, renouvelable par l’assemblée et encore faut-il que le conseil syndical comprenne trois membres minimum. Certaines décisions sont exclues de cette possibilité de délégation. Le syndicat devra souscrire une assurance de responsabilité civile personnelle pour chaque membre du conseil syndical.

Le conseil syndical pourra ainsi gérer directement les travaux d’entretien des parties communes et de maintien de l’immeuble en bon état (réparation des escaliers, réfection partielle de la toiture...). Les membres mandatés pourront choisir entre plusieurs entreprises sans solliciter l’approbation de la copropriété. Pour les décisions, le conseil délibérera à la majorité de ses membres. En cas de partage des voix, la voix du président l’emportera.

Il demeure, et cela vient d’être rappelé par le ministre de la Justice, que le conseil syndical n’est toujours pas un organe de gestion ou d’administration.»


Le dispositif ELAN a réécrit les modalités de la mise en concurrence des contrats de syndic opérée par le conseil syndical. Comment percevez-vous cette procédure ?

Flavien Bonnette

Flavien Bonnette :

«Les conseils syndicaux n’ont pas besoin qu’on leur impose de procéder à la mise en concurrence de leur syndic s’ils ne souhaitent pas en changer. L’obligation pour le conseil syndical de procéder à une mise en concurrence régulière du syndic n’aboutit qu’à l’ajout d’une nouvelle résolution à l’ordre du jour de chaque assemblée générale précédant un renouvellement de mandat, afin de dispenser le conseil syndical de cette obligation. Dans 99 cas sur 100, la dispense est votée car les copropriétaires ne veulent pas ouvrir une faille juridique dans laquelle un copropriétaire procédurier pourrait s’engouffrer pour contester la résolution, voire l’assemblée suivante si le conseil syndical manquait à son obligation.

Les syndics consultés lors d’une “mise en concurrence loi ALUR” savent tout de suite si le conseil syndical a réellement le souhait de soumettre un remplacement du syndic, ou s’il ne fait que s’astreindre à l’obligation qui lui est faite de comparer les offres. C’est pourquoi les dés sont pipés : le syndic ne va pas analyser les besoins réels pour affiner son offre, et le conseil syndical ne va pas tirer de conclusions fiables de ce travail. Chacun aura juste perdu un peu de son temps (…).

Les conseils syndicaux et copropriétaires savent faire la part des choses, et on ne change pas de syndic pour gagner 5 € par lot simplement après avoir comparé des contrats. S’il est légitime de doter le conseil syndical de prérogatives, l’obliger à mettre en concurrence le syndic régulièrement ne répond pas à un besoin».


La délégation donnée au président du conseil syndical d’agir en responsabilité contre le syndic est-elle un progrès selon vous ?

Jean-Lucien MICHEL

Stéphane Bandini :

«Sur un plan théorique, il faut souligner la volonté du législateur de conférer de nouveaux pouvoirs au président du conseil syndical dans le but d’obtenir la réparation du préjudice que pourrait causer le syndic. En pratique, la situation est beaucoup plus compliquée pour le président qui voudrait user de ce dispositif. En effet, toute la difficulté repose sur le fait que l’action est engagée contre le syndic en place. Dès lors, il va falloir pouvoir porter à l’ordre du jour un projet de résolution parfaitement rédigé pour ne pas être «attaquable», puis persuader une assemblée générale, à laquelle assistera le syndic mis en cause (en principe, il tiendra également le secrétariat, sauf décision contraire), de voter l’action en justice contre ce syndic.

D’autres problèmes surviennent par la suite comme le financement de la procédure et notamment des honoraires de l’avocat alors que c’est le syndic mis en cause qui dispose des fonds du syndicat. De plus, le législateur a précisé qu’en cas de succès, la charge des frais de procédure non supportés par le syndic est répartie entre tous les copropriétaires proportionnellement aux quotes-parts. Il sera difficile d’avoir un contrôle en «profondeur» alors que c’est le syndic en cause qui procèdera à la ventilation et à la tenue de la comptabilité (…).

Pour combler les freins à l’application de ce nouveau dispositif, le législateur devrait encore affiner ce texte en offrant la possibilité de révoquer le syndic, puis d’en élire un nouveau lors de la même assemblée générale et uniquement après avoir voté la délégation conférée au président du conseil syndical d’ester contre le syndic jusqu’alors en place.»

 


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article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 663 de novembre 2020