[N°635] - Entretien avec Jean-Marc Torrollion

par YS
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«L’état doit rester à sa place et ne pas se substituer à la volonté des copropriétaires.»

Jean-Marc Torrollion est le nouveau président de la Fédération Nationale de l’Immobilier (FNAIM) depuis le 1er janvier 2018. Il succède à Jean-François Buet qui a accompli un mandat -non renouvelable- de cinq ans à la tête du premier syndicat des professionnels de France.
Diplômé d’une maîtrise de droit notarial de l’Institut de droit et d’économie appliqués à l’immobilier (ICH), Jean-Marc Torrollion est agent immobilier à Grenoble depuis 1987. Il a gravi tous les échelons du syndicat après avoir été, notamment, président de la FNAIM de l’Isère, puis de Rhône-Alpes.

 

Vous avez été élu par vos pairs avec le projet de «bâtir la fédération de l’avenir», pouvez-vous nous préciser les impacts de ce projet sur la FNAIM ?
«La Fédération de l’avenir, c’est une fédération ouverte, moderne, offensive et exigeante.
Les corps intermédiaires doivent séduire la nouvelle génération d’entrepreneurs qui ne perçoit pas forcément la valeur ajoutée d’un syndicat professionnel. L’image de notre syndicat doit évoluer pour être perçue comme un vecteur de modernité et être en phase avec son temps en répondant aux aspirations des adhérents et aussi aux exigences des consommateurs.
Nous allons réformer la structure interne de la fédération, et rendre l’adhérent acteur de son adhésion. Nous créons une commission prospective. Les commissions métiers seront renforcées et devront animer leur branche. Nous allons transformer fnaim.fr (10 millions de visites par an), en véritable hub de l’immobilier. Nous allons réformer notre organisation du lobbying en créant un réseau au travers de l’ensemble des comptes Facebook de nos adhérents et de nos chambres, ce que j’appelle la surface d’influence digitale de la profession.
Notre école de l’immobilier (ESI), qui délivre des formations initiales et de la formation continue, va créer et animer des filières de qualification pour permettre à nos entreprises et, nos collaborateurs de s’inscrire dans des plans de formation. La formation multi-modale, et notamment, distanciée sera développée.
Je souhaite également créer le Laboratoire économique du logement (LABEL), qui doit contribuer à soutenir nos arguments et crédibiliser nos propositions.
Ce ne sont que quelques aspects de notre projet qui s’appuie bien sûr, et c’est notre force,  sur les chambres départementales. La communauté des entrepreneurs de l’immobilier doit se reconnaiître au sein de la FNAIM. Les consommateurs doivent y trouver un marqueur de professionnalisme. Notre fédération n’a pas pour objet d’imposer un modèle d’entreprise mais un modèle de compétence.»

La FNAIM est perçue comme l’organisation principale en France de la transaction et de la gestion locative. Avez-vous des propositions en matière de copropriété, notamment en vue de la réforme de la loi de 1965, qui s’annonce pour fin 2018 ?
«La FNAIM, c’est le syndicat majoritaire puisqu’à lui tout seul il représente 50,13% de la branche. Nos 1 700 syndics gèrent près de 4 millions de lots de copropriété sur les 9 millions de logements en copropriété... Je rappelle que 92 % des copropriétés en France sont gérées par des syndics professionnels. 52 % de ces copropriétés sont de petites copropriétés où, là aussi, contrairement à une idée reçue, les professionnels sont très présents.
La volonté de réforme de la loi de 1965 ne doit pas se faire au détriment de la valeur patrimoniale des biens en copropriété ; elle doit préserver le droit du copropriétaire qui ne doit pas être étouffé par la collectivité. C’est un équilibre subtil. Bien sûr, nous allons être largement partie prenante dans le débat qui s’annonce. Nous articulerons nos propositions sur quatre axes :
- le droit de propriété ;
- la digitalisation de la gestion et sa modernisation ;
- la maîtrise des charges et les enjeux énergétiques ;
- la gouvernance et les enjeux sociétaux.
Nous pensons que la gestion par un syndic professionnel devrait être obligatoire au-delà de 30 lots. La loi ALUR a prévu un décret qui fixe les critères de contrôle des professionnels par leur garant financier. Nous pensons que la justification de ces contrôles devrait être présentée à chaque renouvellement du mandat. L’appréciation de la situation de trésorerie de la copropriété devrait être facilitée. La relation entre le conseil syndical et le syndic doit être modernisée. Le problème des lots uniques en volume en pied d’immeuble doit être traité.
Les sujets sont multiples mais il convient de ne pas perdre de vue qu’il s’agit d’organiser une relation qui concerne le droit de propriété et que nous sommes dans une relation contractuelle de droit privé. L’état doit rester à sa place et ne pas se substituer à la volonté autonome d’organisation et de gestion des copropriétaires».

La FNAIM a créé les Académies de la copropriété : avez-vous la volonté de développer ce type d’actions en faveur des copropriétaires ?
«Clairement oui et la réforme de la copropriété qui s’annonce peut être un moment unique de dialogue. Nous allons sensibiliser les copropriétaires. Encore une fois, c’est bien de leur patrimoine dont il s’agit, et il nous appartiendra de les informer en amont du projet. Ensuite, viendra le temps de l’explication ; là encore notre rôle sera déterminant pour que la copropriété reste attractive et soit le lieu d’une gestion sereine et efficace au profit de nos clients».