[N°657-658] - L’éco-rénovation, de la genèse du projet à l’après-travaux - I.- Le paradoxe de l’éco-rénovation en copropriété

par Sophie Michelin-Mazéran, journaliste
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I.- Le paradoxe de l’éco-rénovation en copropriété

Mettre en synergie les bénéfices de l’éco-rénovation avec le passage à l’acte

Nul ne conteste les bénéfices d’une éco-rénovation en copropriété. Elle apporte un meilleur confort de vie aux habitants, tout en diminuant la consommation énergétique de la copropriété et donc les charges. Rénover permet aussi une valorisation de l’immeuble, à capitaliser dans le prix de vente ou de location de chaque logement.

«Une opération globale est généralement plus efficace et moins coûteuse pour chaque copropriétaire qu’une rénovation individuelle», indique Benjamin Rougeyroles, chargé de mission à l’observatoire CoachCopro de la métropole parisienne. Surtout, il existe plusieurs solutions de financement adaptées dont les règles du jeu sont expliquées par les plateformes d’accompagnement des copropriétés, dont CoachCopro porté par l’Agence parisienne du climat (APC), les conseillers FAIRE, les agences locales de l’énergie et du climat (ALEC) ou encore les Espaces info énergie, sachant que ces services sont gratuits et indépendants.

Enfin, la réforme imminente du dispositif “Reconnu garant de l’environnement” (RGE) devrait raffermir la confiance des copropriétés dans l’expertise des entreprises labélisées, et mieux lutter contre certaines pratiques abusives d’éco-délinquants du bâtiment.

Pourtant, et c’est là que réside le paradoxe de l’éco-rénovation en copropriété : même si les avantages d’une rénovation sont désormais identifiés, même si les aides financières existent à foison, même si l’offre technique et d’ingénierie financière s’étoffe, les travaux demeurent encore trop rarement votés.

 

Des freins à l’éco-rénovation levés progressivement

Les freins qui empêchent les copropriétés à s’engager en rénovation sont également bien connus.

Tout d’abord, le statut de la copropriété est plutôt tourné vers la gestion quotidienne de l’immeuble avec une assemblée générale par an pour voter les travaux, et non vers la maîtrise d’ouvrage de projets ambitieux, comme une éco-rénovation. Ensuite, la décision de travaux suppose d’obtenir le vote favorable d’une majorité de copropriétaires aux profils socio-économiques variés, avec des intérêts distincts. Cette France miniature à l’échelle d’un immeuble n’avance donc pas toujours dans le même sens.

«C’est une décision engageante qui suscite un fort risque perçu, en dépit de l’appui technique et des financements mobilisables», précise Benjamin Rougeyroles. Résultat : les travaux se font souvent via la contrainte, comme le remplacement d’une chaudière collective obsolète, alors qu’une éco-rénovation repose sur une logique de planification.

Autre problème : les aides financières brillent par leur complexité. Dispersées entre plusieurs organismes, elles sont en outre instables d’une année sur l’autre, alors que la prise de décision s’étale sur plusieurs années.

Toutefois, les copropriétés entrent progressivement dans la rénovation énergétique. «Depuis deux ans, on assiste à un changement d’échelle à la faveur de trois éléments : des pouvoirs publics très engagés sur le chantier de la rénovation des bâtiments avec à la clé des financements renforcés, des professionnels mieux formés avec des solutions éprouvées selon la taille des copropriétés et des retours d’expériences d’éco-rénovation de plus en plus documentés qui convainquent».

Reste que rénover est toujours une aventure sociale collective, à mener pas à pas, qui se déroule dans le temps et implique plusieurs acteurs aux intérêts distincts.