La transmission des archives

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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Les archives constituent la mémoire de la copropriété : origine, évolution, sinistres, litiges, comptabilité... A ce titre, la conservation de certains documents est indispensable pour assurer une bonne gestion de l’immeuble : règlement de copropriété, plans ou encore les principaux contrats souscrits. C’est sur le syndic que repose la mission de conserver les archives, à charge pour lui de les transmettre à son successeur si les copropriétaires étaient amenés à se séparer de lui.

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Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 696 de mars 2024

Définition des archives et obligation de détention du syndic.- L’obligation de détention des archives de la copropriété incombe au syndic (art. 18, L. 10 juillet 1965). A ce titre, il doit avoir en sa possession, en original ou en copie, le règlement de copropriété comprenant l’état de répartition des charges, l’état descriptif de division, les conventions par lesquelles un propriétaire ou un tiers se réserve l’exercice d’un droit accessoire aux parties communes (tels les droits de surélévation ou de construire) ainsi que «toutes conventions, pièces, correspondances, plans, registres, documents et décisions de justice relatifs à l’immeuble et au syndicat. Le syndic doit également détenir les registres contenant les procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires et les pièces annexes ainsi que les documents comptables du syndicat, le carnet d’entretien de l’immeuble et, le cas échéant, les diagnostics techniques». Le syndic ne peut réclamer aucune rémunération complémentaire pour la réalisation de cette obligation (art. 33, D. 17 mars 1967). 

Toutefois, l’assemblée générale peut décider, à la majorité de l’article 25, de confier les archives à une entreprise spécialisée. Dans ce cas, si cette décision intervient en cours de mandat, le montant de la rémunération forfaitaire annuelle hors taxes du syndic est imputé, soit d‘une somme forfaitaire, soit du coût réel facturé par ladite entreprise (art. 7.1.5 du contrat de syndic type). 

Quant à la durée de conservation des documents, celle-ci varie selon la nature de la pièce. Il va sans dire que le règlement de copropriété, l’état descriptif de division, les plans de l’immeuble ainsi que leurs actes modificatifs doivent être conservés sans limitation de durée. Pour le reste, il est imposé au syndic de conserver les pièces justificatives de toute écriture comptable pendant dix ans, sauf dispositions expresses contraires. En cas de changement de syndic, il appartient alors au syndic sortant de prendre ses propres dispositions afin de conserver les copies des pièces justificatives qu’il estime nécessaires pour la justification des opérations comptables qui lui incombaient (art. 6, D. n° 2005-240 du 14 mars 2005 relatif aux comptes du syndicat des copropriétaires).

La transmission des archives au syndic successeur.- En cas de changement de syndic, l’ancien syndic est tenu de remettre à son successeur, dans le délai de quinze jours à compter de la cessation de ses fonctions, la situation de trésorerie, les références des comptes bancaires du syndicat et les coordonnées de la banque. 

Dans le délai d’un mois, toujours à compter de la cessation de ses fonctions, l’ancien syndic remet l’ensemble des documents et archives du syndicat ainsi que, le cas échéant, l’ensemble des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou aux lots gérés figurant dans l’Extranet de la copropriété. Ces documents doivent être dans un format téléchargeable et imprimable. Dans l’hypothèse où le syndicat des copropriétaires a fait le choix de confier tout ou partie de ses archives à un prestataire spécialisé, il est tenu, dans ce même délai, d’informer le prestataire de ce changement en communiquant les coordonnées du nouveau syndic.

Et dans un délai de deux mois à compter de l’expiration du précédent délai d’un mois, l’ancien syndic doit fournir au nouveau, l’état des comptes des copropriétaires ainsi que les comptes du syndicat après apurement et clôture (art. 18-2, L. 10 juillet 1965). 

La transmission des documents et archives du syndicat, ainsi que, le cas échéant, l’ensemble des documents dématérialisés figurant dans l’Extranet de la copropriété, doit être accompagnée d’un bordereau récapitulatif dont une copie est remise au conseil syndical (art. 33-1, D. 17 mars 1967).

L’obligation de transmission des archives est générale et s’applique à toutes les pièces visées par les textes. Autrement dit, le syndic sortant ne peut effectuer un tri entre les pièces qu’il souhaite ou non remettre à son successeur (CA Paris, 18 janv. 2006, n° 05/11561). Toutefois, l’obligation de transmission comporte des limites et le syndic ne saurait être contraint de remettre des documents qu’il n’a pas en sa possession (Cass. 3e civ., 10 oct. 1990, n° 88-18.554), mais à charge pour lui d’en apporter la preuve (CA Paris, 21 sept. 2005, n° 05/03619).

Les recours en cas d’absence de transmission des archives.- Faute pour le syndic sortant de remettre les archives, le nouveau syndic ou le président du conseil syndical pourront, après mise en demeure restée infructueuse, demander au président du tribunal judiciaire statuant en référé, d’ordonner sous astreinte la remise des pièces, informations et documents dématérialisés ainsi que le versement des intérêts provisionnels dus à compter de la mise en demeure, sans préjudice de toute provision à valoir sur les dommages et intérêts (art. 18-2 précité, dernier alinéa). L’action intentée par le syndic ne nécessite pas d’autorisation préalable de l’assemblée générale (CA Paris, 27 mars 2012, AJDI 2013, p. 291).

Lorsque cette action est réalisée par le président du conseil syndical, elle s’exerce aux frais avancés du syndicat des copropriétaires. Un état des frais de justice prévisionnels accompagné de devis doit alors être présenté au syndic afin qu’il puisse procéder aux avances nécessaires à la conduite de ces procédures (art. 57, D. 17 mars 1967).

En cas de comportement fautif du syndic sortant, celui-ci pourra voir sa responsabilité engagée, notamment s’il en résulte des difficultés dans la gestion de l’immeuble (impossibilité de recouvrer les charges, par exemple).