Copropriété : La superficie privative du lot

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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©zephyr_p_AdobeStock_214810826Tout acte de vente d’un lot en copropriété doit mentionner la superficie privative de ce dernier, appelée plus couramment surface «loi Carrez».

Il s’agit d’informer et de rassurer le candidat acquéreur sur les modalités de calcul de la superficie du lot afin d’éviter toute mauvaise surprise dans l’hypothèse où le logement serait situé sous les combles.

Attention, toutefois, car la surface Carrez est spécifique à la copropriété et ne s’applique pas en matière locative.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 686 de mars 2023

Ce que l’on nomme communément «loi Carrez», du nom du député qui en est l’auteur, est la loi n° 96-1107 du 18 décembre 1996 améliorant la protection des acquéreurs de lots de copropriété. Cette dernière a créé un article 46 au sein de la loi du 10 juillet 1965. De fait, la loi Carrez n’existe pas en tant que texte autonome, ses dispositions étant incluses dans la règlementation relative à la copropriété.

Vente d’un lot et mention de la superficie de la partie privative

Conformément à l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 précité, «toute promesse unilatérale de vente ou d’achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d’un lot ou d’une fraction de lot mentionne la superficie de la partie privative de ce lot ou de cette fraction de lot». Ne sont ici concernées que les ventes, à l’exclusion donc des mutations à titre gratuit, telle une donation. De même, l’obligation de mentionner la superficie du bien ne s’applique ni aux ventes en l’état futur d’achèvement (Cass. 3e civ., 11 janv. 2012, n° 10-22.924) ni, en matière locative, aux congés pour vente (art. 15, loi n° 89-462 du 6 juill.1989). Par ailleurs, sont exclus de l’obligation de mesurage les caves, garages, emplacements de stationnement et les lots ou fractions de lots d’une superficie inférieure à 8 m² (art. 46, al. 3, précité et 4-2 décret du 17 mars 1967).

On notera que l’obligation de mention de la superficie privative n’existe pas au stade de la petite annonce immobilière, contrairement aux baux d’habitation où la surface habitable doit être expressément indiquée (arrêté du 10 janvier 2017, arrêté du 21 avril 2022).

Calcul de la superficie privative

La superficie de la partie privative d’un lot ou d’une fraction de lot est celle des planchers des locaux clos et couverts après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d’escalier, gaines, embrasures de portes et de fenêtres. Par ailleurs, il n’est pas tenu compte des planchers des parties des locaux d’une hauteur inférieure à 1,80 mètre (art. 4-1, décret du 17 mars 1967).

Défaut de mention de la superficie privative

L’absence de mention de la superficie privative dans le contrat constatant la vente entraîne la nullité de l’acte. L’acquéreur doit alors intenter l’action en nullité dans le délai d’un mois, au plus tard, à compter de l’acte authentique constatant la vente. Toutefois, si la superficie n’est pas mentionnée dans les contrats précédant l’acte authentique (promesse de vente…) mais l’est finalement dans ce dernier, alors l’acquéreur est déchu de son droit à poursuivre l’action en nullité de la promesse ou du contrat qui a précédé l’acte authentique (art. 46, al. 5, précité).

Dans la pratique, cette action demeure assez rare en raison de l’intervention du notaire, celui-ci devant s’assurer que l’acquéreur ait bien reçu les différentes informations exigées par les textes. A l’inverse, la communication d’une surface erronée est plus fréquente.

Erreur de métrage

S’il apparaît que la superficie réelle est supérieure à celle exprimée dans l’acte, l’excédent de mesure ne donne lieu à aucun supplément de prix. En revanche, si la superficie est inférieure de plus de 5 % à celle exprimée dans l’acte, le vendeur supporte alors une diminution du prix proportionnelle à la moindre mesure. Dans ce cas, l’acquéreur doit intenter une action en diminution du prix dans le délai d’un an à compter de l’acte authentique constatant la réalisation de la vente, à peine de déchéance (art. 46, al. 6, et 7 précité).

La diminution du prix concerne l’entièreté de la différence de superficie dès lors que l’écart est supérieur à 5 % et non la seule portion excédant ce taux.

Exemple de réduction du prix : Soit un logement de 80 m² vendu 300 000 €. Il apparaît que la superficie réelle est de 74 m², soit un écart de 6 m². La différence étant supérieure à 5 % (80 x 5 % = 4 m²), l’action en réduction du prix est recevable. Le nouveau prix est alors de : 300 000 x (74/ 80) = 277 500 €. Le vendeur devra donc restituer la somme de 300 000 – 277 500 = 22 500 €.

Au regard des conséquences que peut entraîner une erreur de métrage, et bien que cela ne soit pas obligatoire, il est conseillé de faire appel à un expert pour procéder au mesurage des locaux. Le vendeur qui se lancerait dans cette opération le ferait à ses risques et périls, même s’il pense maîtriser la formule de Héron d’Alexandrie sur le bout des doigts !

Distinction avec la surface habitable

La superficie privative ne doit en aucun cas être confondue avec la surface habitable, définie à l’article R. 156-1 du Code de la construction et de l’habitation. Cette dernière s’applique notamment en matière de baux d’habitation et doit impérativement être mentionnée, non seulement au stade de la petite annonce (cf. supra) mais également dans le bail (art. 3, loi du 6 juill. 1989). Bien que semblables, ces deux superficies comportent des différences notables. Ainsi, à titre d’exemple, les combles non aménagés, les greniers et vérandas sont-ils comptabilisés dans le cadre de la loi Carrez mais sont écartés pour le calcul de la surface habitable. Il est donc déconseillé de reporter automatiquement sur le bail la superficie du logement mentionnée dans l’acte de vente. Le mieux, ici encore, est de faire appel à un professionnel qui se chargera de mesurer les lieux.

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