[N° 575] - 3 questions à Stéphanie Leconte,Directrice de l’ICH Ouest, Maître de conférences associé à l’Ecole supérieure des géomètres topographes (ESGT)

par Edilaix
Affichages : 2622

L’épineuse question du stationnement en copropriété

Pouvez-vous nous présenter les Scot et les Plu et nous rappeler les impacts sur la création et la gestion des places de stationnement dans les copropriétés ?
Le schéma de cohérence territoriale (SCOT) et le plan local d’urbanisme (PLU) sont désormais les documents d’urbanisme de référence pour la réalisation de tout projet immobilier.
La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite Grenelle II, a fait du SCOT un document plus opérationnel, plus riche, destiné à couvrir l’ensemble du territoire national d’ici à 2016. Il doit organiser le développement durable d’un territoire intercommunal de dimension variable. Son document d’orientation et d’objectifs (DOO), fixe désormais des contraintes particulières, directement opposables aux demandeurs d’autorisation d’urbanisme. Il peut ainsi prévoir des obligations minimales ou maximales de réalisation d’aires de stationnement pour les véhicules motorisés et des obligations minimales de réalisation d’aires de stationnement pour les véhicules non motorisés (article L 122-1-8 alinéas 2 à 5 du Code de l’urbanisme).
Les PLU compris dans le périmètre du SCOT devront se conformer à de telles exigences. Si le SCOT est muet sur les questions de stationnement, le PLU pourra lui-même fixer de telles contraintes. La loi Grenelle II permet notamment aux PLU d’imposer un nombre maximum de places de parking pour les véhicules motorisés s’agissant des bâtiments destinés à un usage autre que d’habitation (article L 123-1-12 du Code de l’urbanisme).
En cohérence avec son objectif de limitation des déplacements en centre-ville, la loi de 2010 autorise ainsi les élus à limiter le nombre d’aires de stationnement réalisées à l’occasion de projets immobiliers pour les véhicules motorisés et à imposer la réalisation d’aires de stationnement pour les véhicules non motorisés.
L’évolution des documents d’urbanisme en termes de stationnement pourront avoir des répercussions sur les copropriétés. Qu’il s’agisse d’imposer des stationnements pour véhicules non motorisés ou de limiter les places dédiées à ceux dotés d’un moteur, il faudra en tenir compte dans la gestion des copropriétés concernées. Toutefois, on sait que l’indépendance des législations ne permet pas aux élus de s’assurer qu’au-delà du permis de construire, les syndicats de copropriétaires respecteront ces obligations. Il appartiendra aux copropriétés d’adapter leurs règlements à ces nouvelles contraintes.

L’article 8-1 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que le règlement de copropriété peut prévoir une clause de priorité en faveur des copropriétaires en cas de cession de places de parkings. Les copropriétaires doivent-ils s’attendre à des règles plus contraignantes allant dans ce sens ?
L’article 8-1 a été inséré dans la loi du 10 juillet 1965 afin de favoriser, au profit des copropriétaires, le maintien des places de stationnement prévues au sein de la copropriété. Les élus ne pouvant imposer aux promoteurs l’insertion de clauses interdisant la vente des parkings à des personnes extérieures à la copropriété, c’est la mise en place d’un droit de priorité qui a finalement été envisagée.
En limitant le nombre de places de parking et en incitant les copropriétaires à partager l’usage de ces places, notamment avec des personnes extérieures à la copropriété, les documents d’urbanisme vont conduire les syndicats à repenser les conditions de jouissance et d’usage de ces emplacements.
Les règles à adopter vont dépendre de l’appropriation privative ou commune de ces emplacements. S’il s’agit de parties communes, il suffira au règlement d’en fixer les conditions de jouissance et d’usage. Ces conditions seront un peu plus délicates à mettre en place si les parties en questions sont susceptibles d’être utilisées par des personnes extérieures à la copropriété. S’il s’agit des parties privatives d’un lot, les restrictions à l’utilisation et à la libre disposition de ces parties seront plus difficiles à imposer. Le rédacteur du règlement se heurtera au droit de propriété du copropriétaire et toute limitation de ce droit devra être justifiée par le respect de la destination de l’immeuble (article 8 de la loi de 1965). Il faudra démontrer que la destination de l’immeuble impose de maintenir les places de stationnement au sein de la copropriété ou justifie les limites apportées aux conditions d’usage.

Avec l’arrivée des véhicules à propulsion électrique semble poindre l’émergence d’un droit à la prise dans les parkings. Pouvez-vous nous expliquer quelles sont les obligations actuelles dans les copropriétés ?
A partir du 1er janvier 2012, les immeubles à usage d’habitation équipés de places de stationnement individuelles couvertes ou d’accès sécurisé devront être dotés de gaines techniques, câblages et dispositifs de sécurité nécessaires à l’alimentation d’une prise de recharge (article L 111-5-2 I. du CCH).
Pour les immeubles collectifs existants, seuls ceux à usage tertiaire devront être équipés avant le 1er janvier 2015. L’installation de ces équipements dans les autres bâtiments reste une démarche volontaire.
Toutefois, afin de favoriser le développement des transports les moins polluants que sont les véhicules tout électriques ou hybrides rechargeables, la loi du 12 juillet 2010 a facilité le vote de points de recharge de ces véhicules dans les copropriétés. L’installation de bornes de recharge dans les copropriétés qui en sont dépourvues peut être décidée à la majorité absolue [article 25, L)]. Le raccordement au réseau de l’immeuble pour celles qui sont déjà pré-équipées et la pose de compteurs individuels peuvent visiblement être décidés à la majorité simple sur la base du nouvel article 24-5 de la loi du 10 juillet 1965.
En outre, l’article L 111-6-4 du Code de la construction et de l’habitation prévoit que le syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic, ne peut s’opposer, sans motif légitime et sérieux, à la demande d’un locataire désireux d’équiper à ses frais les places de stationnement d’une borne et d’un système de comptage individuel.
Lire également Réponses ministérielles p.22 et Pratique de la copropriété p.29.

Propos recueillis par la rédaction

Photo : Crédit DR