[N° 605] - La réforme de la réforme ou la modification du processus de vente d’un lot par la loi du 20 décembre 2014

par JEAN-MARC ROUX
Affichages : 2105

La première mesure du train de modifications de la loi Alur annoncé par le gouvernement est intervenue à la fin de l’année 2014. Elle ne répond que très partiellement aux attentes des praticiens de la copropriété.

Les IRC se sont faits l’écho des dispositions de la loi Alur qui aboutissaient, contrairement aux vœux affichés par le législateur, à alourdir, voire à complexifier notre droit actuel de la copropriété1. Les praticiens, au premier rang desquels figurent les notaires mais aussi les syndics, reprochaient principalement au dispositif mis en place son manque de pertinence en obligeant le vendeur et le gestionnaire de l’immeuble à communiquer au candidat acquéreur d’un lot une quantité parfois astronomique de documents au nom de la sacro-sainte transparence qui doit permettre de prendre une décision en pleine connaissance de cause (la masse des pièces transmise à l’acquéreur conduit souvent ce dernier à ignorer le contenu des quelques kilos de papier qui lui ont été remis, et qui font souvent référence à des données qui ne concernent pas directement le bien objet de la vente).
C’est donc en partie dans une optique d’allègement que les pouvoirs publics ont entamé un processus qui a eu pour but de modifier (déjà !) la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 (dite loi Alur).
Ainsi, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 (JO 21 déc.) a autorisé le gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour «simplifier les modalités d’information des acquéreurs prévues aux articles L. 721-2 et L. 721-3 du Code de la construction et de l’habitation et en préciser le champ d’application» (L. 20 déc. 2014, art. 15-I). Nous attendons avec impatience ce qui pourra en résulter.

Par ailleurs, l’article 15 de cette loi est venu d’ores et déjà apporter des correctifs au texte de la loi Alur. Au demeurant, il est très loin de réaliser le toilettage tant attendu par les utilisateurs des règles du droit de la copropriété. En effet, le gouvernement s’est seulement attaché à réformer deux aspects précis du dispositif consacré à la vente de lot.
1 - On se souvient que la loi du 24 mars 2014 avait introduit au sein de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 l’obligation de mentionner la surface habitable du lot vendu. Il a été décidé finalement de ne pas maintenir cette exigence à l’avenir.
Par ailleurs, si ledit article 46 continue de prévoir la mention de la superficie de la «partie privative» du lot cédé, seul l’alinéa 1er du texte continue de faire allusion à l’objet du mesurage (les autres alinéas parlent désormais de la «superficie» sans autre précision).

2 - Dans un autre registre, l’article  L. 551-1 du Code de la construction et de l’habitation, créé par l’article 77 de la loi Alur, faisait obligation au notaire chargé d’établir l’acte authentique de vente d’un lot à usage d’habitation de vérifier si l’acquéreur a fait l’objet d’une condamnation à l’une des infractions prévues par les articles L. 225-14 et L. 434-41 du Code pénal, par l’article L. 1337-4 du Code de la santé publique, et par les articles L. 123-3 et L. 511-6 du Code de la construction et de l’habitation.
Cet article L. 551-1 est abrogé et, à compter du 1er janvier 2016, il est ainsi rétabli :
«Art. L. 551-1.-I.- Pour l’application de la peine d’interdiction d’acheter un bien immobilier à usage d’habitation ou un fonds de commerce d’un établissement recevant du public à usage total ou partiel d’hébergement prévue au 5° bis de l’article 225-19 du code pénal, au 3° du IV de l’article L. 1337-4 du code de la santé publique et au 3° du VII de l’article L. 123-3 et au 3° du III de l’article L. 511-6 du présent code, le notaire chargé d’établir l’acte authentique de vente d’un bien immobilier à usage d’habitation ou d’un fonds de commerce d’un établissement recevant du public à usage total ou partiel d’hébergement vérifie si l’acquéreur personne physique ou l’un des associés ou mandataires sociaux de la société civile immobilière ou en nom collectif se portant acquéreur a fait l’objet de l’une de ces condamnations.
«A cette fin, le notaire interroge l’Association pour le développement du service notarial placée sous le contrôle du Conseil supérieur du notariat, qui demande consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire de l’acquéreur au casier judiciaire national automatisé.
« L’Association pour le développement du service notarial indique au notaire si l’acquéreur a fait l’objet d’une condamnation définitive à la peine mentionnée au premier alinéa du présent article.
«Lorsque l’acquéreur a fait l’objet d’une telle condamnation, l’acte authentique n’est pas signé et l’avant-contrat de vente signé antérieurement est réputé nul et non avenu aux torts de l’acquéreur.
«II.- L’acte authentique de vente d’un bien immobilier à usage d’habitation au profit d’un acquéreur ayant fait l’objet d’une condamnation définitive à la peine mentionnée au I peut toutefois être signé si l’acquéreur atteste, dans l’acte de vente, que le bien est destiné à son occupation personnelle. Dans ce cas, l’acte de vente et l’attestation sont notifiés à l’administration fiscale par le notaire.»

On le voit, les modifications opérées par la loi du 20 décembre 2014 sont très limitées. Il est donc nécessaire que nos dirigeants reviennent en profondeur sur d’autres dispositions qui posent, elles, les véritables difficultés.

1-  Roux, La vente de lot de copropriété au lendemain de la loi Alur, IRC décembre 2014, p. 27.
2-  Loi relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives.