"Les ruptures d'égalité devant les charges publiques sont censées être compensées."
Thierry POULICHOT, avocat à Rennes
Renouer avec des principes primordiaux du droit public
Le débat lancé sur l’appel à propositions du PUCA d’octobre 2015 permet de remettre en lumière une question importante. Pour atteindre des objectifs d’intérêt général, les pouvoirs publics attendent beaucoup des copropriétaires en matière de résorption du logement insalubre, d’amélioration de l’habitat et de maîtrise de la consommation énergétique.
Or, le fait de confier à des personnes privées des missions d’intérêt général, a des implications juridiques lourdes. En copropriété, celles-ci ont été occultées du fait de la compétence des juridictions judiciaires concernant le contentieux des charges et des assemblées générales. Beaucoup pensent que la copropriété ne concerne donc que les spécialistes du droit des biens et que les problèmes des copropriétaires sont des affaires purement privées. Pourtant, l’administration intervient en copropriété. A ce titre, il est temps de vérifier qu’elle y respecte les principes de droit public qui doivent encadrer son action. Les ruptures d’égalité devant les charges publiques sont censées être compensées. Les conflits d’intérêts doivent être évités. En outre, il faut protéger la continuité, la neutralité et la mutabilité du service public.
Quand l’administration attend le concours d’un citoyen pour un objectif d’intérêt général, ce citoyen ne doit donc pas être pénalisé par rapport à ceux qui n’apportent pas la même aide. Dès lors, l’administration doit résorber toute rupture d’égalité devant les charges publiques. A défaut, les soutiens à l’action de l’Etat se raréfient et la continuité du service public s’en trouve remise en cause. Néanmoins, les agents publics ont tendance à se taire sur ce point pour préserver leurs rémunérations, car l’indemnisation des victimes de ruptures d’égalité aurait un coût. Aussi, laisser l’administration et ses alliés évaluer seuls ces ruptures revient à initier un conflit d’intérêts. Ceux qui bénéficient actuellement des deniers publics ont tout avantage à minorer les injustices infligées aux autres.
Or, quand l’administration se sclérose par manque de regards extérieurs, elle semble s’enfermer dans l’ingratitude et se détache des Français les plus novateurs. La neutralité du service public est ainsi en danger, puisque les pouvoirs publics semblent s’inscrire dans le cadre unique de la défense des privilèges en évinçant les courants de pensée alternatifs. Ensuite, face à l’imprévu, des administrations repliées sur elles-mêmes manquent d’idées iconoclastes et ne peuvent plus s’adapter. La mutabilité du service public devient problématique.
Souhaitons que désormais, le PUCA s’interroge explicitement sur ces principes et que cela constitue l’axe de ses appels à propositions.
©DR
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