[N° 581] - Multirisque immeuble : la tranquillité pour la copropriété

par Paul TURENNE
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Index de l'article

Facultative pour la copropriété contrairement à celle applicable au particulier, l’assurance multirisque habitation n’en reste pas moins indispensable. Rappels et conseils pour être couvert au mieux sans dépenser des fortunes.

Photo : Infiltration en pied de mur Crédit DR

Incendies, dégâts des eaux, vandalisme… C’est bien connu, les accidents n’arrivent pas qu’aux autres ! D’où la nécessité de bien s’assurer pour parer à toute éventualité. Réglementairement, rien n’oblige un syndic à souscrire une assurance couvrant l’immeuble et les parties communes ne dépendant pas directement des différents copropriétaires. Dans les faits, très peu s’y risquent, car un syndic qui n’assurerait pas l’immeuble pourrait se le voir reprocher par le syndicat en cas de problèmes. En effet, le syndic ayant pour mission de pourvoir à la conservation de l’immeuble, sa responsabilité pourrait se voir engagée.
Concrètement, les copropriétaires ne souscrivent pas directement l’assurance. C’est le syndic, mandataire de la copropriété, qui est chargé de la contracter après accord préalable du syndicat des copropriétaires réuni en assemblée générale (comme le précise l’arrêté Novelli du 19 mars 2010 modifiant l’arrêté du 2 décembre 1986 relatif aux mesures de publicité des prix applicables dans certains secteurs professionnels). La réalisation des devis nécessite de fournir aux assureurs contactés un état des sinistres survenus et indemnisés au cours des trois dernières années. Par ailleurs, ces derniers devront disposer d’une description de la copropriété comprenant notamment la date de construction, l’indication de la nature des matériaux de construction, le nombre d’immeubles, d’étages, de commerces, de professions libérales présentes, la superficie de l’immeuble en m² développés, les équipements, le nombre de parkings, les installations alimentées par le gaz, une description du voisinage, ainsi que la présence ou non de DAAF (Détecteur avertisseur autonome de fumée). De manière générale, il conviendra de bien déclarer, au moment de la souscription du contrat, voire en cours de validité, l’existence ou l’apparition de risques susceptibles d’aggraver la sinistralité. En effet, si l’assureur venait à mettre en évidence au moment de la déclaration d’un sinistre que ce dernier est en lien avec un risque aggravant non signalé, il pourra opposer, en toute légalité, une déchéance de garantie à l’assuré. Sans compter que toute omission ou déclaration inexacte, entraînerait la nullité du contrat d’assurance dans l’hypothèse où la mauvaise foi de l’assuré serait établie (article L. 113-8 du Code des assurances). Enfin, la mise en concurrence devra, bien sûr, se faire sur la base d’un appel d’offres rédigé en termes identiques.
En fonction des risques propres à chaque copropriété, l’assureur sera alors susceptible d’appliquer des surprimes qui pourront, soit être supportées par l’ensemble des copropriétaires, soit par le ou les copropriétaires des locaux à l’origine de la majoration si une telle disposition figure dans le règlement de copropriété.


Risques couverts

Afin d’éviter toutes discussions visant à déterminer l’origine privée ou non d’un sinistre, le plus simple reste d’éviter les polices se limitant aux seules parties communes et à la responsabilité encourue pour celles-ci, lors d’un accident d’ascenseur par exemple. En souscrivant un contrat global multirisque collectif couvrant les parties tant communes (murs, toit, hall d’entrée, cage d’escalier…) que privatives (lavabo, baignoire…) de l’immeuble, l’assureur ne pourra se défausser. Un risque d’autant plus élevé que les règlements de copropriété et les contrats d’assurance ne définissent souvent pas de la même façon les parties communes et privatives.
Dans les faits, la police de l’immeuble couvre fréquemment les dégâts matériels affectant la totalité des bâtiments et la responsabilité civile des copropriétaires, en garantissant également en général, les aménagements apportés par chaque copropriétaire dans son appartement, comme les cloisons, le parquet, les plâtres ou bien encore l’électricité.

Ainsi, un contrat d’assurance complet devra couvrir trois types de problèmes. Tout d’abord les dégâts matériels causés aux bâtiments en cas d’événements accidentels, tels qu’un incendie, une tempête, un dégât des eaux, une catastrophe naturelle, ou bien encore un attentat. Le bâtiment sera ainsi garanti – dès lors que ce genre d’événements aura été prévu au contrat – tout comme les conséquences de ces dégâts, comme par exemple la perte de loyers ou la privation de jouissance. Attention de bien veiller, pour les parties privatives, à ce que soient assurés les murs, les cloisons et les embellissements, c’est-à-dire les éléments incorporés à l’immeuble et ne pouvant être enlevés sans détériorer le fond, comme les cloisons, placards, papiers peints, moquettes ou cuisines intégrées.
Deuxièmement, les biens et le mobilier collectif devront être garantis, notamment contre du vol de matériel. Cela étant, il convient de garder en tête qu’aucune assurance ne couvrira un sinistre consécutif au mauvais entretien ou à la détérioration de l’immeuble. Le sinistre devra être soudain, spontané ou accidentel.
Enfin, la responsabilité civile de l’immeuble et du syndicat des copropriétaires sera également garantie, lorsque leur responsabilité se trouvera engagée collectivement, avec un distinguo entre la responsabilité découlant d’un événement garanti, vis-à-vis de voisins en cas d’incendie partant d’un appartement par exemple, ainsi que celle découlant d’un événement non garanti, comme la chute d’un visiteur dans l’escalier, ou la chute d’une tuile sur un passant due à un défaut d’entretien. Les conséquences financières, voire juridiques de ces accidents seront ainsi assurées.

Photo : DAAF Crédit DR


Choisir le bon contrat…

Un bon contrat comportera un maximum de garanties assorties d’un minimum d’exclusions, le tout taillé sur mesure. Ainsi, peuvent être prévues les garanties des actes de vandalisme, des dégradations en cas de déménagement, de chocs de véhicules terrestres et aéronefs, la prise en charge de l’assurances-dommage ouvrage en cas de reconstruction totale ou partielle, le remboursement des pertes d’eau en cas de fuite sur parties communes, les chutes d’arbres, les dégâts causés par les bénévoles de la copropriété ou accidents leur arrivant, les dégâts causés par le gel, y compris aux canalisations, ou bien encore, les conséquences des fautes d’un employé d’immeuble. Autant de garanties annexes qui ne figureront que si la copropriété le demande expressément à l’assureur. D’où l’intérêt de faire jouer la concurrence. Les garanties de base du contrat peuvent également être enrichies par des extensions le plus souvent payantes mais utiles qui vont de la prise en charge des frais d’hébergement si l’immeuble est jugé inhabitable après un sinistre, à la recherche d’une fuite d’eau, aux frais de déblaiement des décombres ou encore à la prise en charge des honoraires d’un expert mandaté par le syndic. Reste cependant à veiller à limiter au maximum les exclusions. Ainsi, un nombre de m² de glaces ou vitres assurées peut parfois être fixé par l’assureur, la définition des «bâtiments assurés» peut exclure les clôtures extérieures, ou la garantie, en cas de recours des voisins, exclure les dommages immatériels. Et les questions en la matière sont nombreuses : les glaces séparatrices de balcons mitoyens, parties communes à usage privatif, sont-elles bien couvertes en cas de bris de glace ? Le mécanisme de la porte automatique du garage est-il bien couvert en cas de vandalisme ? Le recours à un courtier ou à un spécialiste à même de lire entre les lignes pourra ainsi permettre de réaliser de substantielles économies sur le contrat… ou sur de potentiels travaux, réparations ou remplacements qui n’auraient autrement pas été pris en charge !


… ou résilier un mauvais

En cas de garantie insuffisante ou de coûts trop élevés, mieux vaut résilier sans tarder le contrat d’assurance qui ne convient plus à la copropriété. Le risque de perdre de l’argent ou de se voir mal, voire pas remboursé augmente en effet dans ce cas. Attention également aux contrats qui prévoient un plafond de garantie. En cas de sinistre, l’indemnisation ne pourra pas dépasser le montant fixé à l’avance, contractuellement. En ce qui concerne la prime, si elle progresse au-delà de l’indice du coût de la construction, la résiliation peut s’opérer dans les quinze jours après réception de l’avis d’échéance, sous réserve que le conseil syndical soumette au syndic son avis de changer d’assureur. Le syndic sera alors chargé de signifier la résiliation à la compagnie d’assurance, par lettre recommandée, comme pour une assurance classique. Bien que les primes évoluent le plus souvent en fonction de l’indice de la Fédération nationale du bâtiment (FNB) et que l’indice de départ doive être indiqué, tout comme les conditions de calcul, mieux vaut vérifier chaque année le niveau de l’indice. Si l’assureur n’a pas respecté la clause d’indexation prévue au contrat, le syndic peut alors résilier le contrat au moment de la réception de l’avis d’échéance. Dans tous les cas, le contrat pourra être résilié au moins deux mois avant l’échéance annuelle du contrat, sans que la copropriété n’ait à se justifier. La résiliation interviendra alors un mois après l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception.

Photo : Crédit MRI


Vocabulaire utile

Surface développée : superficie totale des bâtiments prise à l’extérieur des murs de l’immeuble, multipliée par le nombre d’étages, plus le rez-de-chaussée. Le calcul du montant de la prime d’assurance se base sur cette surface, sachant que les caves, les combles non aménagés, les parkings et les remises sont réduits à 50 % de la surface réelle.

Sinistralité : indicateur d’assurance mettant en relation le montant des sinistres à dédommager par une compagnie d’assurance avec la somme des primes qu’elle a encaissées. Le résultat de ce rapport, qui doit être supérieur à un, correspond au taux de sinistralité.

Valeur réelle : valeur de l’immeuble déduction faite de la vétusté pour tenir compte de sa dépréciation par l’usage. Cette «valeur de reconstruction vétusté déduite» correspond au coût de reconstruction à neuf moins un pourcentage de vétusté, qui tient davantage compte de l’état d’entretien et de la qualité des matériaux que, de l’âge des bâtiments. Lorsque la vétusté est égale ou en dessous de la limite fixée dans le contrat, l’assureur versera une indemnité égale à 100 % de la valeur de reconstruction. Si le taux de vétusté dépasse 25 % ou 30 %, la somme versée par la compagnie d’assurance pourra ne pas suffire à remettre en état la partie de l’immeuble endommagée.


Contenu d’un contrat d’assurance

Un contrat se compose de plusieurs parties. A commencer par les conditions générales qui, comme leur nom l’indique, traitent de la vie du contrat et des droits et obligations des parties. Elles se fondent en grande partie sur le Code des assurances. Les conditions particulières, souvent dactylographiées, permettent de personnaliser le contrat en précisant quels sont les événements et les pertes assurés. Enfin, un intercalaire s’y ajoute parfois. Ce dernier permet d’étendre et d’adapter le champ des garanties et le régime d’indemnisation pour mieux répondre à la demande des usagers. Les «garanties de base», comme l’incendie, l’explosion ou la chute de foudre peuvent ainsi être complétés avec des extensions facultatives concernant d’autres événements ou d’autres dommages en fonction des «besoins» de la copropriété. Ces trois parties du contrat doivent ainsi être lues avec beaucoup d’attention, en prêtant notamment attention aux terminologies usitées. Les termes «agencements» ou «aménagements» n’ont par exemple aucune base légale dans le Code civil, ce qui implique de se reporter à la partie lexique pour bien comprendre le détail du contrat.


Bien déclarer un sinistre

Le syndic souscrivant l’assurance, c’est lui qui est chargé, en toute logique, de la déclaration en cas de sinistre. Les copropriétaires victimes ou témoins doivent de ce fait l’avertir au plus vite par téléphone et par lettre recommandée afin qu’il puisse agir sans tarder. Ce dernier va ensuite se rapprocher du conseil syndical afin de rédiger avec lui une lettre descriptive du sinistre qui sera adressée en recommandée à la compagnie d’assurance. Outre le numéro de contrat, ce courrier devra comporter le maximum d’éléments susceptibles d’éclairer l’assureur, à commencer par la date du sinistre, son origine, sa localisation précise, un descriptif des dégâts avec, si possible, un état estimatif des pertes cautionné par un devis de professionnel. A noter : en cas de dégât des eaux, la fourniture d’un constat amiable est obligatoire, même si la partie adverse refuse de le signer. Par ailleurs, en cas de vol ou de vandalisme, il faudra déposer plainte dans les 48h au commissariat le plus proche. Dans tous les cas, des photographies permettront de rendre les choses plus claires.


En plus

• Les clauses d’un contrat doivent être exemptes d’interprétation, c’est-à-dire sans aucune ambiguïté, faute de quoi, le flou profitera théoriquement toujours à l’assuré en cas de litige.
• Quelles que soient les clauses du contrat en cours, la loi permet, depuis mai 1990, de résilier un contrat tous les ans et de résilier celui-ci à tout moment après cette durée minimum, moyennant un préavis de deux mois.
• En cas d’augmentation de la prime au-delà de l’indice du coût de la construction, la résiliation peut s’opérer dans les quinze jours après réception de l’avis d’échéance.
• Si un sinistre sur l’immeuble a eu des répercutions sur les parties privatives, les copropriétaires comme les locataires concernés doivent le déclarer à leur propre assureur sous cinq jours ouvrés.
• La garantie «vol» en copropriété ne s’appliquera que si des mesures de protection ont été mises en œuvre (serrures sécurisées et fermées, digicode, vidéophone, etc.).