Regards croisés : Réduire les charges de la copropriété

par YS
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Les charges de copropriété explosent.

Les hausses de l’énergie, l’inflation des prix des prestations et des matériaux éreintent les finances des copropriétaires. Les délais de paiement aux syndicats s’étirent.

La situation appelle à la vigilance les conseils syndicaux dans leur mission de contrôle des coûts et place les plateformes en réduction des charges sous les projecteurs.

Échanges avec deux dirigeants, Corentin Le Moal, de la plateforme Econhomes et Édouard-Jean Clouet de la plateforme MeilleureCopro.
                                        

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 689 de juin 2023

Quels sont les trois premiers postes budgétaires sur lesquels une action de réduction des charges est la plus rapide ?

Édouard-Jean Clouet : La revue des contrats d’énergie, de maintenances multi-techniques, et d’assurance MRI représentent les  trois sources d’économies principales, où des gains substantiels peuvent être dégagés en seulement quelques mois.

Corentin Le Moal : À l’exception de l’assurance et de l’énergie, les autres postes budgétaires peuvent être analysés et optimisés très rapidement, en l’espace de trois mois environ. C’est le temps moyen constaté lorsque nous intervenons sur l’ensemble du parc d’un gestionnaire. Dans le cadre d’une démarche d’optimisation rapide des charges, les principaux postes à analyser sont le nettoyage, la maintenance des ascenseurs et l’entretien des espaces verts. L’assurance fait exception car nous ne pouvons intervenir sur les contrats en cours et il nous faut donc attendre l’échéance suivante. Concernant la fourniture d’énergie, il existe le même frein concernant l’échéance. S’ils souhaitent des actions rapides, les copropriétaires peuvent néanmoins agir pour diminuer leurs consommations bien évidemment. On peut considérer qu’une diminution de 1° C de la température de consigne permet une baisse de la consommation de 7 %.

 

Sur le poste chauffage, quels sont les leviers de réduction que vous analysez ?

C. LM. : Nous analysons le P1 (les conditions tarifaires de la fourniture, l’abonnement et les puissances souscrites), le P2 (les contrats de maintenance des installations type chaufferie ou sous-station) et le bon dimensionnement et les conditions du P3 (garantie totale et renouvellement de matériel).

É.-J. C. : Le poste de chauffage collectif peut être optimisé à trois niveaux, en conservant l’installation existante :  sur la consommation d’abord, avec la vérification de l’équilibrage des réseaux, le calorifugeage des conduites, la baisse de la température de chauffe, la réduction de la période de chauffe, et la pose de compteur individuel en télérelève ; sur la renégociation des prix d’achat de l’énergie, les tarifs ayant considérablement reflué ces derniers mois ; et sur le coût d’entretien de la chaudière.

 

Concernant les contrats d’entretien, quels doivent être les points de vigilance de la copropriété ?

É.-J. C. : Les contrats d’entretien sont rarement optimisés en copropriété, les prestataires proposant des contrats standardisés éloignés des besoins réels des immeubles : une analyse approfondie permet d’ajuster le cahier des charges et de pouvoir ainsi les renégocier en maintenant la qualité de services attendue par les occupants.

C. LM. : Un premier levier consiste à bien étudier le périmètre de chacun des contrats afin d’éviter les recoupements de prestations entre différents prestataires. Ensuite, il faut veiller à avoir des prestations en rapport avec les besoins réels de la copropriété. Par exemple, concernant le nettoyage des parties communes, il n’est pas forcément nécessaire d’avoir un passage par jour dans les escaliers s’il y a un ascenseur dans l’immeuble. Cet exemple est un peu caricatural, mais il permet d’illustrer le propos. D’un point de vue contractuel, il faut étudier la durée d’engagement et les conditions de reconduction. Enfin, si on souhaite pousser le curseur plus loin, il est intéressant, à moyen terme, de veiller à avoir une formule de révision annuelle des prix qui soit cohérente avec la nature de la prestation. Cela permettra d’éviter une dérive des prix qui peut devenir très importante au bout de quelques années.

 

Votre société agit-elle à la demande des syndics ou des copropriétaires ?

C. LM. : Nous pouvons agir à la demande des conseils syndicaux mais les projets offrant le plus d’intérêt pour les copropriétés sont ceux lancés à l’initiative des syndics. Econhomes agit comme un service achats pour les syndics de copropriété en intervenant sur une démarche d’analyse globale de l’ensemble des charges courantes de leurs portefeuilles. Cette analyse complète permet ensuite de mener des négociations groupées et massifiées pour maximiser l’impact. Nous travaillons toujours en cohérence avec les syndics et en prenant en compte les relations déjà établies avec les prestataires, ce qui fait que chacun de nos projets est différent.

É.-J. C. : MeilleureCopro intervient principalement à la demande des syndics, pour une révision complète de leur parc de contrats de maintenance et d’énergie. Certains conseils syndicaux sont également amenés à nous solliciter.

 

Comment vos services sont-ils rémunérés ?

É.-J. C. : Quand la demande émane du syndic, notre accompagnement est gratuit pour lui et pour ses clients copropriétaires. MeilleureCopro est courtier, au même titre qu’un courtier en assurance ou en énergie : notre rémunération provient des prestataires, en tant qu’apporteur d’affaires. Lorsque nous sommes sollicités par un conseil syndical, MeilleureCopro est rémunérée par la copropriété, en pourcentage des économies dégagées.

C. LM. : Nous avons privilégié un modèle de rémunération vertueux pour les copropriétés comme pour le syndic puisque nous nous rémunérons uniquement sur le partage des économies. Cela veut dire que s’il n’y a pas d’économie réalisée pour la copropriété à la suite de notre intervention, il n’y a pas de rémunération pour Econhomes. C’est un modèle rassurant, dans lequel nous partageons les mêmes intérêts que la copropriété et qui garantit notre indépendance vis-à-vis des prestataires. Cela nous permet de ne prendre en compte que les intérêts de la copropriété et de son gestionnaire et de proposer ce qu’il y a de mieux pour elle.

 

Des critères autres que financiers sont-ils pris en compte dans vos préconisations de fournisseurs ?

C. LM. : Dans un premier temps, nous préconisons la poursuite de la relation avec le prestataire déjà sous contrat. C’est-à-dire que nous allons avoir une démarche de négociation de gré à gré avant d’envisager une mise en concurrence. Notre objectif n’est pas de “placer” des fournisseurs mais bien de faire en sorte que la copropriété ait le bon niveau de prestation au bon niveau de prix. Cette approche permet de préserver le niveau de qualité et lintuitus personæ qui est une dimension importante dans le monde de la copropriété. Nous travaillons également sur les cahiers des charges et les conditions contractuelles (durée du contrat, clause de reconduction, révision annuelle des prix, etc.).

É.-J. C. : La priorité chez MeilleureCopro est de sécuriser une exploitation sereine du bâti : nous prônons le maintien des prestataires en place au professionnalisme avéré. Cela étant dit, les accords négociés par nos équipes permettent également de proposer des prestataires alternatifs, capables de s’adapter aux spécificités de chaque bâtiment, afin de proposer des tarifs sur-mesure et souvent plus compétitifs.

 

Quelle est la baisse moyenne des charges observée chez vos clients et selon quelle durée ?

É.-J. C. : En fonction des postes révisés, la baisse de charges varie de 5 à 35 %, à prestations équivalentes.

C. LM. : En moyenne, nous observons une baisse de 12 % sur les contrats sur lesquels nous intervenons, mais la fourchette est large, pouvant aller de 3 % à 40 % en fonction de nombreux paramètres. De plus, grâce au travail sur les conditions des contrats, ces baisses sont pérennes, ce qui donne de la visibilité budgétaire mais surtout, les adhérents restent convaincus que la propriété est une source de stabilité et de paix sociales, ce qui explique d’ailleurs les mesures prises par le gouvernement pour faciliter l’accès à la propriété. Les efforts fournis par les propriétaires deviennent très (trop) lourds, même s’ils ont conscience qu’ils jouent depuis longtemps un rôle social.