[N°618] - Jurisprudence : Droit de préemption urbain et l'état descriptif de division

par JEAN-MARC ROUX
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L’arrêt n° 15-10.215 de la 3e chambre civile de la Cour de cassation du 24 mars 2016 revêt une importance particulière et pourrait considérablement impacter la pratique notariale en matière de vente de lot de copropriété. Ainsi, des copropriétaires ayant vendu divers lots dépendant d’un immeuble à usage d’habitation, la commune a poursuivi la nullité de cette vente au motif que les biens vendus avaient été inclus dans le périmètre de son droit de préemption urbain et qu’il n’avait pas été établi de déclaration d’intention d’aliéner. Pour accueillir les demandes en nullité de la vente et en dommages-intérêts, un arrêt de la cour d’Aix avait retenu que seul l’état descriptif de division avait été publié au fichier immobilier et que l’immeuble n’avait jamais fait l’objet d’un règlement de copropriété de sorte que, si les lots litigieux étaient compris dans un immeuble soumis au régime de la copropriété au jour du projet d’aliénation, aucun règlement n’avait été publié depuis dix ans au moins, et que les conditions de l’exemption n’étaient pas réunies. Sous le visa de l’article L. 211-4 du Code de l’urbanisme, dans sa rédaction antérieure à la loi ALUR, la Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel pour violation de la loi, au motif qu’elle avait constaté que l’immeuble avait fait l’objet d’un état descriptif de division publié au fichier immobilier depuis plus de dix ans à la date de l’aliénation des lots de copropriété.
Ainsi, dès l’instant où un document a fait l’objet d’une publication au service chargé de la publicité foncière, qui porte à la connaissance des tiers qu’une copropriété existe (ou est sensée exister) depuis plus de dix ans, le droit de préemption de la commune s’éteint. Il semble que l’esprit de la loi l’emporte ici sur sa lettre.

Cet arrêt publié au bulletin, fera l’objet d’un commentaire dans un prochain numéro