[N°641] - Entretiens croisés avec la directrice générale et le chef de projet “copropriétés” de l’ANAH - Valérie Mancret-Taylor est la directrice générale de l’ANAH

par YS
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Valérie Mancret-Taylor est la directrice générale de l’ANAH depuis janvier 2018. Architecte urbaniste en chef de l’État, elle a officié précédemment en qualité de directrice adjointe de l’Urbanisme à la Ville de Paris.

Comment se répartissent les sommes allouées par l’ANAH ?
En 2017, 80 720 ménages ont pu rénover leur logement grâce aux aides de l’ANAH, pour un montant total de 650 millions d’euros :
- au titre de la lutte contre la précarité énergétique, près de 53 000 logements ont été bénéficiaires des aides du programme Habiter Mieux (près de 420 millions) ;
- la lutte contre l’habitat indigne et très dégradé a concerné 11 290 logements rénovés soit 117 millions d’euros d’aides ;
- le redressement des copropriétés en difficulté a permis la rénovation de 15 487 logements avec plus de 56 millions d’euros d’aides ;
- 18 185 logements ont été adaptés à la perte d’autonomie, pour un montant de près de 61 millions d’euros de subventions ;
- dans  le cadre du développement du parc privé à loyers maitrisés, plus de 4 000 logements ont fait l’objet d’une convention avec des travaux à hauteur de 73,5 millions d’euros ;
Enfin, l’ANAH accompagne l’ingénierie des collectivités territoriales par le financement des chefs de projet (programme action cœur de ville par exemple) et animation des OPAH (opérations programmées d’amélioration de l’habitat).

Comment l’ANAH intervient-elle en faveur des copropriétés ?
Le redressement des copropriétés fait partie des missions historiques de l’ANAH. Dès les années 1980, les copropriétés les plus fragiles - encore peu nombreuses- commencent à basculer dans des situations difficiles. S’impose alors la nécessité d’une intervention publique pour les redresser. Les premiers outils et procédures portés par l’Etat et les collectivités locales émergent. Depuis 1994, les pouvoirs publics ont bâti des dispositifs règlementaires et des outils techniques pour prévenir les difficultés ou guérir ces copropriétés fragiles et/ou dégradées avec, notamment, la création de l’Opération programmée d’amélioration de l’habitat (Opah)-copropriétés puis des plans de sauvegarde pour les cas les plus difficiles. Depuis, la palette des outils et des procédures publiques n’a cessé d’être enrichie et de se renforcer jusqu’à la loi ALUR de mars 2014.
Aujourd’hui, l’Agence déploie plusieurs outils : des outils d’observation du parc. Ils sont très importants. Le registre d’immatriculation ouvert aux services de l’Etat et des collectivités permet de vérifier la santé des copropriétés pour pouvoir intervenir et éviter leur basculement dans la dégradation le plus en amont possible. La veille et observation des copropriétés (VOC) permet d’aider les collectivités à connaître plus précisément celles qui sont fragiles et en difficulté afin de définir et de prioriser les actions à entreprendre. La VOC tient compte des données du registre, mais également de données sociales et urbaines indiquant les facteurs de fragilités endogènes et exogènes de la copropriété.
L’ANAH déploie également des actions de prévention. Le programme opérationnel de prévention et d’accompagnement des copropriétés (POPAC) permet, par sa flexibilité, de pouvoir répondre à toutes les problématiques. Conçu pour agir très tôt sur les premières difficultés, avant même que le bâti ne se dégrade, il assure le suivi et la gestion du projet en tenant compte du contexte urbain et social des copropriétés. Toutes les actions préventives mises en œuvre se font en lien avec les copropriétaires qui restent maitres du jeu et votent les décisions en assemblée générale. La lutte contre les passoires thermiques est le deuxième axe de la prévention déployée par l’ANAH. C’est tout l’objet de l’aide collective Habiter Mieux conçue pour les copropriétés fragiles. Elle est accordée au syndicat de copropriétaires ; tous les copropriétaires occupants ou bailleurs en bénéficient, en fonction de leur quote-part, sans conditions de ressources des occupants du logement. Cette aide permet de passer un cap nécessaire à l’engagement de travaux souvent coûteux.
Par ailleurs, l’ANAH propose des outils spécifiques pour le traitement des copropriétés en difficulté. Ce sont des outils qui ont fait leur preuve pratique depuis près de 25 ans : les Opah-copropriétés dégradées et les plans de sauvegarde durent de 3 à 5 ans, et même plus longtemps si nécessaire. L’ANAH accorde des aides aux travaux mais aussi un accompagnement dédié avec un opérateur spécialisé. Les acteurs de la copropriété bénéficient ainsi d’une véritable assistance à maîtrise d’ouvrage de nature technique, sociale en assumant le suivi, la gestion, la renégociation des contrats des grands fournisseurs de fluides (gaz, eau, chauffage urbain…). Il s’agit d’un travail en profondeur portant sur l’ensemble de la copropriété afin de permettre son redressement et le rétablissement de son autonomie.

Comment l’ANAH est-elle associée au plan de mobilisation annoncé par le gouvernement ?
Nous sommes  pleinement impliqués dans la mobilisation nationale en faveur des habitants des quartiers annoncée le 18 juillet dernier par Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires et Julien Denormandie, secrétaire d’Etat. Il s’agit de renforcer les outils de redressement des copropriétés dégradées pour mieux répondre aux problématiques soulevées par le constat de terrain établi par les préfets de région. Le ministre de la Cohésion des territoires a confié à l’ANAH le pilotage opérationnel de l’élaboration d’une nouvelle stratégie, de sa mise en œuvre et de son suivi. La conception de cette stratégie d’intervention s’est faite en concertation avec tous les acteurs déjà engagés dans cette problématique : l’ANRU, le réseau des Etablissements Publics Fonciers (EPF) notamment l’EPF IDF -pilote des ORCOD-IN de Clichy-sous-Bois, Grigny et bientôt Mantes la Jolie, l’USH, la Caisse des dépôts-Banque des Territoires, Action logement.
Ce travail a permis de concevoir l’élaboration d’un nouveau mode d’intervention intitulé «Initiative copropriétés». Il s’agit en effet de reprendre l’initiative avec les collectivités et les habitants des copropriétés : des dispositifs seront proposés à la carte ; chaque collectivité pourra les utiliser en fonction des difficultés propres à la copropriété ou aux copropriétés en difficulté de son territoire. Chaque copropriété a une histoire et des besoins différents. Elle doit pouvoir bénéficier d’aides publiques tout en restant maitre de son destin.

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