[N° 598] - Entretien avec Jean-Pierre Lannoy : «Le syndic est la pierre angulaire de la copropriété»

par Edilaix
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Jean-Pierre Lannoy est secrétaire général de l’Association belge des syndics et administrateurs de biens installée à Bruxelles. Il est l’un des fondateurs de l’Observatoire de la copropriété exemplaire francophone (OBCEF) qui réunit des acteurs de la copropriété de Belgique, de France et du Québec. L’objet de cet observatoire est de relever et de valoriser les modèles exemplaires de gestion des copropriétés dans les trois États.

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Quels sont les critères d’une copropriété exemplaire ? Ces critères sont-ils différents selon les États francophones ?
L’exemplarité d’une copropriété se définit par la volonté constante et mutuelle de tous les acteurs :
• de générer une transparence financière (comptable et analytique), premier élément générateur d’économies ;
• d’organiser une collecte permanente de données objectives en vue de la réalisation de travaux pour les intégrer dans des plans pluri-annuels ;
• de susciter la participation des propriétaires pour valoriser le processus de fonctionnement de l’association et de ses organes. 
Ainsi, que les pouvoirs décisionnels soient concentrés au sein d’un conseil d’administration comme c’est le cas au Québec, ou encore au sein d’une assemblée générale souveraine comme c’est le cas en Belgique, les objectifs économiques de préservation du bâti et de valorisation du “mieux vivre en Copropriété” constituent la ligne directrice permanente de tous les acteurs de la copropriété.
C’est la dynamique permanente sur ces trois axes qui génère l’exemplarité. Les moyens de communication étant à ce point développés et peu onéreux que cet objectif est à la portée de toutes les associations ou de tous les syndicats de copropriétaires.
L’observatoire souhaite ainsi promouvoir toutes ces initiatives.

Existe-t-il des points de convergences entre les lois et règlements du Québec, de la Belgique et de la France ?
A des degrés divers et malgré des différences culturelles, la tendance majoritaire s’oriente vers le renforcement de l’intérêt collectif par la mise en place de réglementations techniques obligatoires. C’est le cas en France et en Belgique où des mesures contraignantes visent à améliorer l’efficacité énergétique des copropriétés et la gestion programmée du patrimoine. La France se dote de nouveaux outils d’audits et de plans pluriannuels. Le Québec règlemente les inspections périodiques d’immeubles, par exemple.
Mais la convergence des trois pays est encore plus évidente sur la volonté de mieux encadrer la fonction de syndics ou de gestionnaires de copropriétés.
Alors qu’en France la loi ALUR fait grand bruit, en Belgique, l’organisme public de réglementation de la profession de syndics vient de se doter d’un tableau reprenant non seulement, la liste des syndics mais également la liste des associations de copropriétaires pour lesquels il est mandaté. Le Québec organise la profession de gestionnaires de copropriété en mettant en place une formation spécifique obligatoire de haut niveau. La France agit de même puisque la formation des syndics est désormais rendue obligatoire.
Les législateurs respectifs se rejoignent donc. Ils prennent conscience que le syndic est la pierre angulaire de la copropriété. On attend de lui des compétences techniques, financières et juridiques et également des résultats sur des objectifs basés sur la performance des bâtiments, la prévention des conflits ou encore, la protection de l’environnement. 

Parmi les objectifs de l’observatoire, vous indiquez vouloir assurer la «transparence dans le fonctionnement des associations ou syndicats de copropriétaires» et «définir les bonnes pratiques entre les intervenants». Pouvez-vous préciser les objectifs poursuivis en faveur de ces acteurs ?
Le concept de la copropriété a connu un succès fulgurant lié dans un premier temps à des facteurs strictement économiques et conjoncturels favorables.
Le concept a favorisé l’accès à la propriété privée.
Ces dernières années, les facteurs de son développement se sont multipliés ; la copropriété pouvant, en outre, répondre aux problèmes de densité urbaine, de meilleure intégration de l’habitat dans la ville, du vieillissement de la population grâce à la création de services adaptés.
Les intentions de l’observatoire sont donc de valoriser les bonnes pratiques et de permettre la création d’un véritable “patrimoine Copropriété” au sein des associations ou syndicats de copropriétaires, patrimoine constitué d’initiatives pertinentes visant à mieux vivre en copropriété.
Ainsi, le “patrimoine Copropriété” ne devrait plus se limiter à sa valeur financière mais d’une manière générale, à sa capacité de répondre à des objectifs de performance et d’amélioration de qualité de vie, que les copropriétaires soient occupants ou bailleurs.
L’atteinte de ces objectifs nécessite de définir les bases et les critères du “Mieux vivre en copropriété” avec tous les acteurs, notaires, géomètres, promoteurs, constructeurs, syndics, conseillers syndicaux et copropriétaires ; ils sont les artisans des copropriétés futures.
En outre, une copropriété présentant des problèmes de bâti, associés à des statuts et règlements confus ou contradictoires, sera confrontée à d’importantes difficultés pour susciter l’aspect participatif des copropriétaires.
L’observatoire souhaite ainsi, faire comprendre aux copropriétaires l’intérêt de valoriser ce “patrimoine Copropriété” et espérer que la multiplicité des différents facteurs en faveur du développement des copropriétés aura pour effet qu’au sein même des associations ou syndicats de copropriétaires, on puisse générer des services collectifs complémentaires comme c’est le cas au Québec ou encore, en France pour les “résidences-services”.
Cette démultiplication des services collectifs ne pourra avoir lieu que si la confiance est restaurée entre tous les acteurs (les propriétaires  et les organes de la copropriété), la transparence en constituant la clé de voûte.

Propos recueillis par la rédaction