[CCED N°4] - Le reportage : OPAH copropriété dégradée : Une rénovation ambitieuse à Vaulx-en-Velin

par Julie Hainaut
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Initiée le 9 décembre 2013, l’opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) copropriété dégradée, concernant l’ensemble immobilier Le François-Ouest à Vaulx-en-Velin, près de Lyon, devrait s’achever en juin 2017. Le point sur le chantier.

Etat des lieux
Construit en 1932, l’ensemble immobilier le François Ouest, situé au 22, 28 et 30, avenue Paul Marcellin à Vaulx-en-Velin, comprend 80 logements, répartis en quatre bâtiments R + 4. Il connaît de multiples problèmes. En premier lieu, en raison du faible entretien des parties communes et à l’existence de malfaçons liées à la pose inadaptée des garde-corps dès l’origine de la construction, l’ensemble a dû faire face à de nombreux et importants travaux. «Il y avait des éclats de béton au niveau des garde-corps. Nous n’en étions pas au stade de péril mais cela posait un problème d’esthétisme et de sécurité, à terme» explique Gwendolyn West-Bienvenue, chargée de projets Habitat Grand projet de ville (GPV) Vaulx-en-Velin. En second lieu, comme le précisent les enquêtes socio-économiques réalisées auprès des ménages, la population de l’ensemble immobilier est fragilisée. Outre la faible capacité d’emprunt des propriétaires occupants, cette fragilité s’explique par l’âge élevé des copropriétaires – 53 % ont plus de 60 ans. En troisième lieu, le fonctionnement de l’ensemble immobilier n’est pas juridiquement sécurisé. Une seule copropriété et donc un seul et même règlement de copropriété régit à la fois Le François-Ouest et Le François-Est, construis à la même époque. Or, ces deux ensembles immobiliers fonctionnent indépendamment avec deux syndics bien distincts, sans formalisation juridique. Si cette organisation a été acceptée par tous les copropriétaires, elle engendre des risques au regard des travaux envisagés par Le François-Ouest. En dernier lieu, Le François-Ouest peine à régler ses fournisseurs depuis l’exercice 2012-2013, en particulier pendant la période de chauffe, où l’impayé représentait environ 13 % de son budget, et était en nette augmentation par rapport à 2009.

Retour chronologique
Entre 1998 et 2002, l’ensemble immobilier a bénéficié de l’opération programmée d’amélioration de l’habitat, copropriété Rhône-Amont, au cours de laquelle la copropriété n’a pas pu, faute d’un conseil syndical structuré et fédéré, se mobiliser pour voter des travaux d’amélioration de ses parties communes. Puis, en 2010, après une première étude cofinancée par la Commune de Vaulx-en-Velin et la Communauté urbaine de Lyon, l’ensemble immobilier a pu démontrer aux pouvoirs publics la difficulté des propriétaires à faire face à l’ampleur des travaux de remise aux normes à effectuer. En 2012, l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) a décidé de lancer, avec la Communauté urbaine et la Commune de Vaulx-en-Velin, une étude pré-opérationnelle afin d’affiner la stratégie d’intervention sur cet ensemble. Ainsi, au cours du comité de pilotage du 14 juin 2013, les partenaires publics ont conclu à la nécessité de mettre en place une OPAH copropriété dégradée, dans le but de pérenniser les solutions aux difficultés rencontrées par la copropriété et viser une réhabilitation ambitieuse du niveau Bâtiments basse consommation (BBC). L’ensemble d’origine ne bénéficiait d’aucune isolation : le bâti avait un niveau de consommation d’environ 275 KwhEp/m2/an (ce qui correspond à l’étiquette énergétique E). «Il convenait de changer les huisseries, de poser du double vitrage, de traiter l’ensemble du bâtiment» précise Gwendolyn West-Bienvenue. Cette opération s’inscrit dans une politique en faveur des copropriétés fragiles engagées depuis plus de 15 ans sur la commune de Vaulx-en-Velin ; elle entre dans le cadre du Plan Climat du Grand Lyon.

Objectifs
Ils sont triples. Dans un premier temps, il convient de réhabiliter de manière globale et durable le bâti, en permettant une amélioration du confort thermique et une réduction des consommations énergétiques d’au moins 50 %, en cohérence avec les objectifs du plan climat de la Communauté urbaine. Il est ensuite nécessaire de conforter la propriété occupante en aidant en priorité les plus modestes, en maîtrisant les niveaux de loyer et en favorisant le conventionnement intermédiaire et social. Enfin, il s’agit d’améliorer le fonctionnement de la copropriété, par une sécurisation juridique, un appui aux instances de gestion et le traitement des impayés.

Volets d’action de l’accompagnement
L’opérateur s’est engagé, en partenariat avec le syndic, à s’assurer que le règlement de copropriété soit bien appliqué pour les travaux engagés dans le cadre de l’OPAH. De plus, un deuxième syndicat, ou une scission, devait être recherchée. L’opérateur doit apporter toute son expertise juridique ; mais également financière, afin d’évaluer les marges de manœuvre envisageables en matière de réduction des charges. Autre engagement : maintenir les propriétaires dans leurs logements, prévenir et traiter d’éventuels conflits ou difficultés sociales et économiques et maîtriser les niveaux de loyers. Autres faits non négligeables : la valorisation de l’image extérieure de la résidence, l’amélioration des espaces extérieurs – augmentation des places de stationnement, entretien des espaces verts, optimisation de la gestion du tri – et un maintien de la mixité sociale.

Où en on est ?
Les travaux devaient initialement commencer à l’automne 2014 et se terminer en décembre 2016. Ils viennent finalement tout juste de démarrer (premier trimestre 2016). «Ce retard est dû à la solvabilité de certains copropriétaires concernant leur reste à charge» note Gwendolyn West-Bienvenue. Le syndic ne souhaitant pas prendre le risque d’impayés, une recherche de financement a été mise en œuvre. Elle aura duré un an et demi. Le partenaire Provicis a eu un rôle primordial en préfinançant des subventions publiques et des prêts Mission Sociale avec un taux de 0 % pour les propriétaires occupants sous conditions de ressources. Tandis que la réforme des aides de l’ANAH a engendré des dispositions plus favorables que les règles antérieures. «L’effet levier des subventions est déterminant pour permettre à un programme de travaux aussi ambitieux de voir le jour, avec des subventions dans le cadre du dispositif d’OPAH copropriété dégradée, l’Anah et les collectivités territoriales (Ville de Vaulx-en-Velin, Métropole de Lyon, Région Rhône-Alpes), qui s’ajoutent aux autres financements existants en matière de rénovation thermique (Habiter Mieux, Plan Climat)... La pérennisation de ces financements des SACICAP est un enjeu au niveau national pour accompagner les interventions publiques sur le parc privé. L’assemblée générale de décembre 2015 a permis d’acter l’engagement de l’opération. Le plus gros des travaux sera effectué d’ici fin 2016, et la totalité est prévue pour juin 2017» précise la chargée de projets. Dans un premier temps (courant de l’année 2016), il sera procédé aux travaux bâtiment par bâtiment, «pour ne pas que les gens aient l’impression de vivre dans un chantier permanent». Les travaux dans les parties communes (dont la réfection des allées) se feront ensuite. Des réunions de chantier auront lieu tous les lundis après-midi sur la copropriété.
Concernant le problème du règlement de copropriété unique entre Le François-Ouest et Le François-Est, rien n’a été fait. «Finalement, ça ne créait pas réellement d’insécurité juridique. Il n’y a pas eu de modification des statuts. Ce sera probablement fait dans un second temps, après la fin des travaux» informe la chargée de projets.
«C’est une opération irréprochable en matière d’exemplarité énergétique dont la qualité du montage financier est à souligner, puisqu’il a pris en compte la situation de chacun des copropriétaires»
conclut-elle.


Le coût et les financements
Le coût de l’opération pour les seuls travaux,  est estimé à 3,3 millions d’euros, soit un coût moyen par logement de 41 800 euros, dont 80 % pour des travaux d’économie d’énergie. Les subventions publiques pour chaque appartement financent en moyenne 35 000 euros et les propriétaires environ 6 800 euros.
«Le financement par les partenaires de l’opération a été rendu possible grâce à la pugnacité de deux membres du conseil syndical qui, dès 2008, ont attiré l’attention des pouvoirs publics sur la situation de la copropriété et le risque de dégradation» explique Urbanis. Le financement comprenant à la fois les travaux et l’ingénierie, s’établit comme suit : Procivis : 1 420 000 euros ; Agence nationale de l’habitat (Anah) : 1 306 700 euros ; Etablissement public de coopération communale (EPCI ) : 633 500 euros ; Communs : 347 650 euros.

Les travaux en cours
Mise aux normes (colonnes électriques, colonnes d’eau), entretien (reprise des peintures des allées et des cages d’escalier, remplacement des boîtes aux lettres et installation d’interphones), rénovation énergétique (isolation des façades, des toitures terrasses et des caves, remplacement des fenêtres et chaudières)… A l’issue des travaux, l’ensemble immobilier Le François-Ouest sera une «copropriété complètement rénovée et métamorphosée», affirme Urbanis. Chaque entreprise va intervenir selon un phasage destiné à optimiser le déroulement du chantier et à apporter le moins de nuisances possibles. De nombreuses interventions vont avoir lieu dans les appartements. Pour faciliter le déroulement du chantier, une mission de maîtrise d’œuvre sociale (MOS) a été confiée par la Métropole de Lyon à Urbanis. Ainsi, les entreprises prendront rendez-vous avec chaque occupant quinze jours avant leur intervention. En cas de problème, Urbanis sera l’interlocuteur privilégié des propriétaires.



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