[N° 584] - Le syndic bénévole en copropriété

par Paul TURENNE
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Volonté de réaliser des économies, d’impliquer davantage les copropriétaires ou de gérer plus directement les affaires courantes… Pour toutes ces raisons, certaines copropriétés choisissent de faire appel à un copropriétaire pour remplir bénévolement le rôle de syndic. Une décision qui impose le respect de règles bien précises.

L’assemblée générale désigne le syndic bénévole à la majorité de l’art. 25 - Crédit : ©syndicatdescramades

 

L’article 28 du décret du 17 mars 1967 précise que «les fonctions de syndic peuvent être assumées par toute personne physique ou morale». Du fait de cette dérogation à la loi sur les conditions d’exercice des professions immobilières (article 2 de la loi du 2 janvier 1970), un copropriétaire peut donc tout à fait être élu à la fonction de syndic. Cette activité doit cependant demeurer occasionnelle, pour ne pas tomber dans une activité professionnelle fortement réglementée.
Le syndic bénévole est élu par ses pairs pour une durée maximum de trois ans, tout comme pour un syndic professionnel. Il doit être propriétaire et posséder, par exemple, un appartement, un garage ou une cave au sein de l’immeuble qu’il gère, sans forcément y habiter. Étant bénévole, il ne peut exiger de rémunération pour ses services ; cependant ses frais de gestion lui sont remboursés.
Au sein de la copropriété, les missions générales du syndic sont nombreuses. Il doit ainsi :
- assurer l’exécution des décisions votées en assemblée générale,
- notifier les décisions de l’assemblée générale aux opposants et aux défaillants (personnes absentes non représentées),
- veiller au respect de l’application du règlement de copropriété,
- administrer et conserver l’immeuble,
- convoquer les assemblées générales,
- assurer le secrétariat des assemblées générales,
- conserver les archives de la copropriété,
- mettre en place et /ou tenir à jour le carnet d’entretien,
- mettre à jour la liste des copropriétaires.
Sans oublier, la tenue de la comptabilité, l’élaboration du budget avec le conseil syndical, le recouvrement des charges, ou bien encore la négociation des contrats d’entretien ou des devis. Des connaissances techniques, comptables et juridiques lui sont donc nécessaires pour remplir cette fonction qui n’a rien d’évidente.

Qualités requises

En dehors de la gestion d’immeubles de taille importante qui nécessite une solide formation, les compétences du syndic non professionnel peuvent être moindres pour les petits immeubles. Ce dernier doit ainsi maîtriser la loi du 10 juillet 1965, son décret du 17 mars 1967, ainsi que le décret et l’arrêté comptable du 14 mars 2005. Il doit d’autre part connaître les obligations en matière de sécurité et de diagnostics, tout comme les règles en matière de contrats. Enfin, si la copropriété emploie des salariés, la connaissance de la convention collective des gardiens et employés d’immeuble sera un préalable indispensable.
De manière générale, un bon syndic devra être motivé et disponible, assimiler les techniques de la gestion de la copropriété et les bases de la comptabilité, tout en possédant un minimum de savoir-faire informatique… et de bon sens. Pour les questions de gestion plus complexes, rien n’empêche la copropriété de faire appel à des experts, d’ailleurs également sollicités par les syndics professionnels.

Multiples outils d’aide

Afin d’assister les syndics bénévoles dans leur gestion, de plus en plus d’offres de services sont par ailleurs disponibles sur le marché. Cela va des sites internet de communication, aux plates-formes internet de devis, en passant par des audits de réduction des charges, ou de l’assistance comptable. Ces solutions sont ainsi un bon moyen d’optimiser la gestion de la copropriété, tout en déchargeant le syndic de tâches parfois fastidieuses, chronophages, voire trop complexes pour lui.
Des logiciels de gestion et comptabilité permettent notamment au syndic non-professionnel d’enregistrer simplement ses opérations en conformité avec la loi. Ce dernier peut ainsi en quelques clics imprimer les informations qu’il doit diffuser aux copropriétaires (états comptables, appels de fonds, relances, convocation et procès-verbal d’AG, etc.), tout en évitant d’utiliser des feuilles de tableur, solution gratuite avec un logiciel libre mais très basique.
D’autre part, certaines copropriétés recherchent un outil de communication internet (forum, publication de documents, etc.) entre copropriétaires, voire entre locataires. Parmi les solutions répondant à ces attentes, on peut citer le logiciel Coprolib’, directement conçue pour les syndics bénévoles. (cf. présentation des logiciels de comptabilité in Gestion et maintenance, IRC n°574, p. 31, “Outils de gestion : la course à la performance“).
A signaler également, Syndics Solutions dont l’offre de services permet aux syndics bénévoles de se faire assister dans la gestion comptable et administrative de leur immeuble, tout en conservant la gestion technique de celui-ci. Depuis un espace client sécurisé, chaque copropriétaire peut ainsi consulter l’état des comptes de sa copropriété ou tout autre document rattaché.

Schéma d’organisation d’une copropriété :

Crédit : ©ARC


Un président d’AG ne peut être élu comme syndic bénévole !

L’article 22 dernier alinéa de la loi du 10 juillet 1965 fait interdiction au syndic, à son conjoint, son partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité et ses préposés de présider l’assemblée générale. Cette disposition est d’ordre public et sanctionnée par la nullité de l’assemblée générale. L’on peut donc effectivement se demander s’il y a risque de nullité de l’assemblée lorsque le copropriétaire, élu président de séance, est également désigné au cours de cette même assemblée comme syndic bénévole.
La Cour de cassation a répondu par l’affirmative à cette question en rappelant le caractère immédiatement exécutoire des décisions d’assemblée générale (Cass. Civ. 3°, 9 juin 2010, n° 08-19696, Bull. civ. III, n° 117). En conséquence, le fait de conférer un mandat de syndic au président de l’assemblée générale vicie la réunion car, sauf à préciser expressément dans la décision de l’assemblée que le point de départ du mandat du nouveau syndic élu est reporté à la fin de la réunion, le président se trouve, dès le vote, en infraction avec l’interdiction posée par l’article 22 de la loi de 1965 précité.
Source : Florence Bayard-Jammes, Courrier des lecteurs, IRC n°568, p. 32.


Les textes

- Loi (n°65-557) du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et dernières modifications (SRU 13 décembre 2000, ENL 13 juillet 2006, MOLLE 25 mars 2009, Simplification du droit 12 mai 2009).
- Décret d’application de la loi du 10 juillet 1965 (n° 67-223) du 17 mars 1967.
- Décret n° 2005-240 du 14 mars 2005 relatif aux comptes du syndicat des copropriétaires.
- Recommandations de la Commission relatives à la copropriété (CRC), notamment la n° 15.
- Et le règlement de copropriété.


A lire :

Disponibles sur notre librairie en ligne :
Le syndic bénévole de Sylvie Savignac, avocate à la Cour d’appel de Paris, spécialiste du droit immobilier aux Éditions du Puits Fleuri, 450 pages, 29,40 € TTC.
• Le syndic bénévole de copropriété, par le collectif Le Particulier, déc. 2011, 21,00 € TTC.


A retenir

• Comme pour tout syndic, l’assemblée générale se prononce à la majorité de l’article 25 (et le cas échéant de l’article 25 -1) de la loi du 10 juillet 1965.
• Le syndic bénévole, par dérogation à la loi du 2 janvier 1970 sur les professions immobilières, n’a pas à disposer de la carte professionnelle, ni à souscrire une garantie financière, ni même une assurance de responsabilité professionnelle.
• Il a cependant tout intérêt à souscrire une assurance responsabilité civile contre les risques liés à ses fonctions, le coût de cette assurance étant supporté par la copropriété, en charge commune générale.
• Il est obligé d’ouvrir un compte bancaire au nom du syndicat, et ce, dès sa désignation, dans un délai de trois mois maximum.
• Le syndicat reste responsable à l’égard de ses membres (les copropriétaires) des fautes commises par son mandataire (le syndic) dans l’exercice de ses fonctions.


Gestion coopérative, un modèle alternatif

Dans le cas d’une copropriété en syndicat coopératif, le syndic n’est plus élu par l’AG, mais au sein du conseil syndical par les membres de ce conseil. D’autre part, il est également de droit le président du conseil syndical, ce qui explique qu’il ne puisse en aucun cas être rémunéré ou indemnisé de son temps. Depuis la loi SRU (2000), la décision de passer en syndicat coopératif ou de revenir à un syndicat normal, se prend à la majorité absolue de l’article 25.
Dans le cadre d’une gestion en syndicat coopératif (définie par les articles 17-1 de la loi du 10 juillet 1965 et les articles 40 à 42-2 du décret du 17 mars 1967), il convient de rappeler que l’assemblée générale est obligée de désigner un ou plusieurs contrôleurs aux comptes, copropriétaires ou extérieurs à la copropriété. Dans ce dernier cas, il doit être expert-comptable ou commissaire aux comptes.
Enfin, il est également possible, via une décision du conseil syndical, d’élire en son sein, un vice-président. Ce dernier pourra éventuellement suppléer au président en cas de besoin.

Craintes infondées

D’aucuns craignent que la gestion coopérative ne soit réservée qu’aux toutes petites copropriétés. Pourtant, même si les petites copropriétés y font très souvent appel, faute d’intérêt des syndics professionnels pour les petits lots, des moyennes et grandes copropriétés ont adopté ce mode de gestion, souvent depuis plusieurs dizaines d’années. Certaines d’entre elles sont même constituées de plusieurs centaines de logements.
Autre inquiétude : la gestion coopérative serait extrêmement chronophage pour les copropriétaires bénévoles. C’est sans compter sur le fait que de nombreuses tâches d’exécution peuvent être et sont souvent confiées en prestation de services à des spécialistes de la gestion ou à des salariés. Les conseillers syndicaux se font, quant à eux, aider par des techniciens et des professionnels dans tous les domaines (architectes, avocats, thermiciens, etc.). Par ailleurs, les bénévoles peuvent recevoir conseils et assistance auprès d’associations.
Enfin, lorsque le syndicat a de nombreux impayés et contentieux, le mode de gestion coopératif n’est pas rédhibitoire. L’expérience montre qu’avec l’aide d’une association, voire d’un avocat, un syndicat coopératif peut rapidement redresser une situation enlisée depuis des années. Depuis 1994, ce dernier bénéficie en effet d’un privilège immobilier spécial. Lors de la vente d’un lot, il est ainsi payé en priorité devant les créanciers hypothécaires et le Trésor Public.

Adopter le mode de gestion coopératif

Il s’agit tout d’abord de constituer une équipe de copropriétaires décidés à participer au conseil syndical gestionnaire. Ensuite, un travail de sensibilisation et d’information sera indispensable pour convaincre l’ensemble des copropriétaires de l’intérêt d’opter pour le mode de gestion du syndicat coopératif.
Puis, un ou plusieurs copropriétaires doivent faire inscrire à l’ordre du jour de l’AG annuelle l’option pour le syndicat coopératif. Pour ce faire, il convient d’adresser une demande au syndic avant que celui-ci n’arrête l’ordre du jour, par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR). A noter que le président du conseil syndical peut lui aussi demander au syndic, à tout moment et par LRAR, la convocation d’une AG supplémentaire en précisant le jour, l’heure, le lieu et l’ordre du jour. Si cette demande reste infructueuse pendant plus de huit jours, le président de conseil syndical peut alors procéder lui-même à la convocation. Le conseil syndical d’un syndicat coopératif n’étant pas rémunéré, aucun contrat n’est à joindre à l’ordre du jour, contrairement à ce qui se passerait avec un syndic professionnel.
Le jour de l’AG, lorsqu’est inscrit à l’ordre du jour le choix entre la gestion par un syndic professionnel ou un syndicat coopératif, chacune des options est soumise au vote. Celle qui recueille le plus de voix fait ensuite l’objet d’un nouveau vote aux majorités des articles 25 et éventuellement 25-1 de la loi du 10 juillet 1965.
Au cas où le syndic professionnel sortant décide d’arrêter le procès-verbal à la résolution constatant son non-renouvellement, il doit remettre au président de séance une copie du procès-verbal de cette première partie de la réunion ainsi que la feuille de présence et les pouvoirs. La réunion pourra alors continuer sans lui. Il sera procédé à la nomination d’un nouveau secrétaire de séance et un nouveau procès-verbal devra être établi pour cette seconde partie de l’AG.
Les deux procès-verbaux et la feuille de présence doivent être signés du président de séance, du ou des scrutateurs et du secrétaire de séance. Le procès-verbal de la seconde partie de l’assemblée et celui de la réunion du conseil syndical ayant désigné à la fin de l’AG le président-syndic et le vice-président, seront adressés au syndic professionnel sortant par lettre recommandée avec accusé de réception afin de lui faire savoir que le syndicat a un nouveau syndic.
Il conviendra ensuite de prendre rendez-vous avec l’ancien syndic qui est tenu de remettre au nouveau l’ensemble des documents de la copropriété dans un délai maximum de trois mois. Sont ainsi concernés les archives du syndicat des copropriétaires et les fonds immédiatement disponibles, le tout sous un mois. Sans oublier, l’état des comptes du syndicat et de chaque copropriétaire, ainsi que le versement du solde des fonds, sous deux mois suivant le premier délai. A noter que le syndic sortant n’étant pas copropriétaire, il n’a aucune qualité pour contester le procès-verbal ayant désigné son successeur.


La Fédération des syndicats coopératifs de copropriété (FSCC)

Créée en 1970, la F.S.C.C., agréée au titre du Code de la consommation, regroupe les syndicats coopératifs de copropriété, les syndicats avec syndic non professionnel et les associations syndicales libres (ASL). Ses missions sont multiples. Ainsi, elle représente et défend le mode de gestion coopératif auprès des pouvoirs publics, tout en apportant une assistance aux copropriétés souhaitant adopter le mode de gestion du syndicat coopératif. Par ailleurs, elle édite une lettre périodique destinée à informer ses adhérents des problèmes d’actualité concernant la gestion des immeubles et met à leur disposition un service gratuit de conseils. Enfin, elle leur apporte une assurance responsabilité civile gestionnaires dont la prime est incluse dans la cotisation annuelle. Elle se charge également d’éditer divers documents utiles : règlement type de copropriété, modèle de statut d’ASL, contrat type de maintenance des ascenseurs…
En savoir plus : FSCC, Résidence “Les Poissons“, App.1276, 20 ter Rue de Bezons, 92400 Courbevoie. Tél. : 01 47 88 82 64. Mèl : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.


A signaler

Lors de l’AG annuelle, les copropriétaires peuvent refuser la réélection du syndic professionnel sortant et décider alors d’opter pour le mode de gestion du syndicat coopératif. Dans ce cas le syndic sera désigné par le conseil syndical.