[N°626] - Rapport parlementaire sur l’application de la loi ALUR

par YS
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Un bilan en forme de satisfecit en matière de copropriété

Le 25 janvier 2017, a été enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale un rapport d’informations déposé par la Commission des affaires économiques, et présenté par  D. Goldberg (PS) et J.-M. Tétart (LR). Ce rapport parlementaire dresse un bilan de l’application de la loi ALUR, notamment et en matière de fonctionnement des immeubles gérés en copropriété. En voici de larges extraits.

Si les deux rapporteurs pointent du doigt la précipitation (immatriculation des copropriétés de plus de 200 lots) ou la lenteur (le fonds de travaux) ou encore la lourdeur (information des acquéreurs d’un lot) de certaines dispositions de la loi ALUR ou de ses décrets d’application, ce bilan a la forme d’un satisfecit du législateur au gouvernement.


L’information des copropriétaires

Le titre II de la loi ALUR entendait réformer la loi du 10 juillet 1965 avec deux objectifs : assainir les relations entre les syndics et les copropriétaires, d’une part, et prévenir la dégradation des copropriétés en créant des outils destinés à faciliter la réalisation de travaux, d’autre part. La loi ALUR avait prévu que ces différentes mesures entreraient en vigueur soit immédiatement, soit de manière différée, après la publication d’un certain nombre de décrets d’application. Certaines mesures, comme l’obligation de constituer un fonds de travaux, ne sont ainsi entrées en vigueur que le 1er janvier 2017.
Prévenir la dégradation des copropriétés passe, tout d’abord, par une meilleure information des acquéreurs de lots de copropriété sur les données financières et techniques essentielles relatives aux copropriétés concernées. Le candidat acquéreur doit, par exemple, être conscient du niveau de charges dont il devra s’acquitter et des éventuels dysfonctionnements de la copropriété concernée avant de s’engager dans l’achat d’un bien, ce qui a débouché sur de nouvelles informations dès le stade de l’annonce immobilière et la communication des principaux documents relatifs à la copropriété au candidat acquéreur dès le stade de la promesse de vente.
En raison de la difficulté de mise en œuvre des modalités de la vente de lot, en raison de la complexification administrative, l’ordonnance n° 2015-1075 du 27 août 2015 a apporté plusieurs améliorations en autorisant la transmission dématérialisée de tous les documents, sous réserve de l’acceptation expresse de l’acquéreur. Vos rapporteurs regrettent que la mise en application de ces dispositions ait eu lieu dans ces conditions.


Faciliter la réalisation de travaux

Afin de prévenir la dégradation des copropriétés, la réalisation de travaux de conservation et d’amélioration du bâti a été facilitée par la création de nouveaux outils dont les copropriétés peuvent désormais pleinement se saisir.
Tout d’abord, l’article 59 modifie les conditions de majorité requises pour que l’assemblée générale des copropriétaires décide d’engager certains travaux. Depuis la promulgation de la loi ALUR, les travaux emportant amélioration, addition et transformation de la copropriété nécessitent uniquement une majorité des voix de tous les copropriétaires.
L’article 58 oblige, à partir du 1er janvier 2017, chaque syndicat de copropriétaires à constituer un fonds de travaux qui doit être alimenté par une cotisation annuelle obligatoire dont le montant, fixé par l’assemblée générale, ne peut être inférieur à 5 % du budget prévisionnel de la copropriété. Il s’agit d’inciter les syndicats de copropriétaires à épargner régulièrement afin de ne pas se retrouver du jour au lendemain confrontés à des dépenses considérables que les copropriétaires ne peuvent pas assumer.
En outre, la plupart des copropriétés n’ont pas de programmation précise de travaux. Aussi, la loi ALUR a créé deux outils facultatifs permettant aux copropriétés de mieux planifier leurs travaux : le plan pluriannuel de travaux et le diagnostic technique global de la copropriété. Les rapporteurs espèrent que les syndicats de copropriétés se saisiront petit à petit des nouveaux outils.
Cependant, le rapport déplore que le plafond applicable aux livrets A détenus par les syndicats de copropriétaires (art. 58) ne soit pas encore modulé, par décret, selon le nombre de lots de la copropriété. Aujourd’hui, le plafond réglementaire est de 76 500 €, que la copropriété soit constituée de 10 ou de 500 lots.


Identifier les copropriétés fragiles

Le parc des copropriétés représente environ 8 millions de logements en France, mais demeure très mal connu par les pouvoirs publics. Pour saisir les caractéristiques de ce parc et d’identifier plus facilement les copropriétés fragiles, l’article 52 de la loi ALUR a créé un registre national d’immatriculation des copropriétés. Depuis le 1er janvier 2017, de nombreux syndicats de copropriétaires doivent s’immatriculer au registre en fournissant les informations essentielles relatives à leur identification et aux caractéristiques financières et techniques de la copropriété.
Le rapport relève que les délais laissés aux grandes copropriétés pour s’immatriculer étaient extrêmement courts (avant le 31 décembre 2016) alors que les informations à fournir n’ont été connues que le 26 août 2016, et que le site internet n’a été mis en service que le 2 novembre 2016.


Contrat type et compte séparé

L’article 55 impose un contrat type de syndic ainsi qu’une forfaitisation des prestations courantes. Ce contrat type a été défini par le décret n° 2015-342 du 26 mars 2015 et s’applique aux contrats conclus ou renouvelés depuis le 1er juillet 2015.
La liste limitative des prestations particulières correspond à des missions ponctuelles, comme l’immatriculation initiale du syndicat, ou à des charges de travail sortant du cadre ordinaire de la gestion courante, comme l’organisation de réunions supplémentaires avec le conseil syndical au-delà de celles prévues dans le forfait.
L’article 55 de la loi ALUR a mis fin à la dérogation relative à l’obligation d’ouvrir un compte bancaire séparé pour chaque
syndicat.
L’ouverture d’un compte séparé s’applique à tous les contrats de syndic conclus ou renouvelés depuis le 24 mars 2015. Le rapport note que sa mise en œuvre s’est heurtée au manque de préparation des banques confrontées soudainement à une très forte demande.


La hausse des tarifs des syndics

Certaines prestations ayant donné lieu àune rémunération spécifique sont désormais incluses dans le forfait, ce qui fait mécaniquement augmenter son prix. Ainsi, certains syndics professionnels ont augmenté leurs tarifs depuis 2015 en arguant du fait que la loi ALUR avait créé de nouvelles missions et de nouvelles obligations à leur charge, comme l’immatriculation de la copropriété, la réalisation d’une fiche synthétique ou la mise en place d’un extranet. Selon les rapporteurs, ces nouvelles obligations ne justifient nullement de telles hausses de prix. La seule source de hausse légitime et durable concerne l’obligation de créer un compte séparé, qui peut générer le paiement de frais bancaires supplémentaires, bien que limités.
Les rapporteurs considèrent qu’à terme, la concurrence entre les syndics devrait modérer la pratique tarifaire grâce au contrat type de syndic et à l’obligation de mise en concurrence systématique de plusieurs contrats de syndic.

À lire sur www.assemblée-nationale.fr
 Rapport n° 4401